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Haiti : Le RNDDH dénonce la libération de quatre présumes kidnappeurs

Communiqué du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH)

Soumis à AlterPresse le 5 janvier 2006

Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) rappelle que depuis quelque temps la question de « main levée de mandat d’écrou » est devenue une vraie plaisanterie, une source importante d’impunité. De mars 2004 à mai 2005, les Juges d’Instruction du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince ont rendu quatre-vingt-douze (92) ordonnances de main levée du mandat d’écrou contre seulement vingt-six (26) ordonnances de renvoi. Plusieurs leaders de « l’Opération Bagdad », des dealers de drogue, des kidnappeurs, des tueurs à gage, des accusés de viols sur des mineurs avaient quitté la prison par ce biais. Les ordonnances de clôture ne sont jamais rendues. (Voir Rap./N02 /A05 : Situation Générale des Droits Humains en Haïti à la veille des Elections annoncées pour la fin de l’année 2005 sur le site WWW. rnddh.org)

En août 2005, le nommé Nathaà« l GENELUS, employé de la succursale de la UNIBANK de Damien est arrêté par la Police et conduit au Sous-Commissariat de Police de Delmas 62. Il est depuis porté disparu. L’affaire a fait beaucoup de bruit dans les médias et la Police a procédé à l’arrestation de l’Inspecteur de Police James BOURDEAU, responsable de ce Sous-Commissariat en compagnie d’autres policiers dénoncés d’avoir organisé le kidnapping pour le compte d’un riche homme d’affaires de la place, Stanley HANDAL. Le dossier est, depuis le mois de septembre 2005, transmis au Cabinet d’Instruction du Juge Jean Pérez PAUL, Président de l’Association Nationale des Magistrats Haïtiens (ANAMAH). Avec un rapport accablant de la Direction Centrale de la Police Judiciaire (DCPJ) sur ce réseau de kidnappeurs, de la criminalité organisée et du blanchiment d’argent. Le pays attend encore l’ordonnance de clôture malgré l’échéance du délai imparti par la loi.

Le 11 décembre 2005, l’ANAMAH, sous la direction du juge Jean Pérez PAUL, décrète un arrêt de travail (la justice est en deuil) pour protester contre l’arrêté du 9 décembre 2005 de l’Exécutif qui renvoyait à la retraite cinq (5) juges de la Cour de Cassation. La justice est depuis paralysée. Même la Chambre des référés du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince ne fonctionne pas. Les assises criminelles de décembre ont été renvoyées sine die.

Le RNDDH juge indécent que ce soit au cours de cette période de « deuil » (arrêt de travail total de l’appareil judiciaire) que le Président de l’ANAMAH décide, à la date du 30 décembre 2005, d’octroyer « main levée de mandat d’écrou » à quatre (4) des six (6) présumés kidnappeurs incarcérés dans le cadre de ce dossier.

Les présumés kidnappeurs libérés par le Président de l’ANAMAH sont :

Stantley HANDAL, riche homme d’affaires de la Capitale ;

Wilfrid FRANà‡OIS, Agent 1 ;

Sony LAMBERt, Agent 3 ;

Rénald CINEUS, Agent 4 ;

Le RNDDH se demande comment un Juge qui a ordonné un arrêt total de travail au sein de l’appareil judiciaire puisse prendre une telle décision pendant la période dite de deuil de la justice. N’est-il pas, pour le moins inconvenant de continuer à travailler sur des dossiers à « caractère spécial », pour des « personnes spéciales », pour des « raisons spéciales » en demandant aux autres magistrats de faire la grève sans se soucier du droit des justiciables à la justice et de celui de la nation à la vérité ?

Le RNDDH croit qu’il est urgent pour l’Etat de réglementer la question de « main levée de mandat d’écrou » qui est une arme à scandale mise aux mains de Magistrats souvent très peu respectueux de la sécurité des gens, de la mémoire des disparus et des demandeurs de justice.

Le RNDDH ose espérer que cette ordonnance de main levée de mandat d’écrou en faveur de ces quatre (4) présumés kidnappeurs ne mettra pas fin à ce dossier, comme il est souvent le cas.

Port-au-Prince, le 5 janvier 2006