Communiqué de la Coordination Europe-Haïti [1] en date du 24 octobre 2005
Soumis à AlterPresse le 24 octobre 2005
A l’occasion de la quatrième conférence internationale sur Haiti organisée par l’Union européenne les 20 -21 octobre 2005 à Bruxelles, les principaux bailleurs internationaux, à savoir des Etats européens et d’autres pays donateurs, des représentants des Nations Unies et de la Minustah, des Institutions financières internationales, des Organisations régionales et internationales, impliqués dans la transition et la stabilisation en Haiti, ont renouvelé leurs promesses de soutien aux programmes de développement en Haiti.
Le but de la conférence, la quatrième, après les conférences de Washington (juillet 2004), Cayenne (mars 2005) et Montréal (juin 2005), était de définir les actions prioritaires à entreprendre par la Communauté internationale et les parties haïtiennes, d’identifier les prochaines étapes du développement du pays pour contribuer à la stabilisation post-électorale durable et de soutenir les réformes engagées par le gouvernement de transition qui devront être mises en œuvre par le prochain gouvernement élu.
La conférence a permis de dresser un bilan des actions du gouvernement de transition et de la communauté internationale pendant un an et demi dans le Cadre de Coopération Intérimaire (CCI), démarré en juillet 2004, cadre que la communauté internationale s’est engagée à financer pour plus d’un milliard de dollars.
Nous donnons ci-après un aperçu schématique des points et des décisions importantes de cette conférence.
La conférence a traité différents thèmes, notamment le processus électoral, la question sécuritaire, la performance du CCI, la bonne gouvernance, les priorités pré et post électorales. Les acquis de la conférence concernent principalement :
L’engagement du gouvernement intérimaire de faire respecter le calendrier électoral et le transfert du pouvoir au nouveau gouvernement conformément aux échéances constitutionnelles, à savoir le 7 février 2006 ;
L’extension du CCI jusqu’à fin 2007. Une nouvelle conférence internationale des bailleurs de fonds afin de mobiliser des nouveaux financements sera organisée au cours de l’année 2006 ;
Une mission des Nations Unies, à court terme, pour identifier un appui institutionnel de stabilisation post-électoral dans les domaines : i) du renforcement des capacités législatives du nouveau Parlement et des capacités organisationnelles du Comité électoral provisoire (CEP) ; ii) de l’appui à la réforme du secteur de la Justice et de la Sécurité ; iii) de la réforme de l’Etat, de la décentralisation et la gouvernance locale ; iv) des Droits Humains ;
Le lancement de la part du gouvernement intérimaire d’un Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté Intérimaire (DRSPi) qui sera ensuite validé par le nouveau gouvernement, en consultation avec la société civile et le secteur privé. Ce DRSPi est censé faciliter l’accès aux financements des Institutions Financières Internationales dans le cadre de la « Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance » (FRPC), ainsi qu’à l’allégement de la dette dans le cadre du programme pour les pays pauvres les plus endettés (PPTE) ;
L’engagement de la Commission européenne et d’autres acteurs de la communauté internationale, entre autre la Banque Mondiale, de mobiliser une partie des fonds destinés à Haïti via l’instrument de l’appui budgétaire ;
Le renforcement des mécanismes de suivi du CCI pour améliorer la coordination de l’aide et permettre d’accélérer les décaissements et la mise en place de politiques sectorielles et d’une politique nationale .
La Coordination Europe-Haïti ,qui était présente à cette conférence, reconnaît les efforts de la communauté internationale et en particulier celles de l’UE qui vient de débloquer 72 millions d’ euros pour la reprise de la coopération officielle avec l’Etat haïtien. Cependant elle insiste pour que les promesses faites se traduisent en réalisations concrètes pour soutenir l’Etat haïtien dans sa demande pour :
• La mise en place d’un cadre macroéconomique stable et cohérent et des réformes et mesures permettant une meilleure distribution de la richesse ;
• L’application de politiques structurelles et sectorielles et la planification d’un plan de réduction de la pauvreté, en incluant les principales réformes pour Haïti et en développant des mécanismes participatifs qui impliquent tous les secteurs de la société civile et qui tiennent compte des nécessités régionales et locales ;
• L’appui au développement local, comme moyen pour octroyer des financements directs à la population locale et lui permettre de survivre indépendamment de l’aide externe ;
• La restructuration et le renforcement de la police nationale haïtienne (PNH), en lui donnant les moyens et en fournissant le cadre juridique nécessaire pour exercer son mandat, de même que dans la mise en place de stratégies appropriées pour soutenir un programme de désarmement et de réintégration ;
• L’allégement de la charge de la dette externe et surtout celle contractée auprès des créanciers bilatéraux, en premier lieu les pays de l’UE tels que la France, l’Espagne et l’Italie.
Enfin, la Coordination Europe-Haïti réitère son soutien à ses organisations partenaires haïtiennes qui oeuvrent sur le terrain dans les domaines de la Souveraineté Alimentaire, des Droits socio-économiques et culturels et des Droits civils et politiques.
Elle insiste pour que les organisations et mouvements de la société civile soient largement impliqués lors de la mise en exécution de tous les programmes de longue durée. Les programmes bénéficiant d’un plus large consensus de la société civile sont mieux acquis et ont davantage des chances de succès. Dans leur mise en place, les processus participatifs sont devenus une étape obligatoire.
Ceci dit, il est extrêmement important de créer des mécanismes fonctionnels permanents et de les doter de moyens efficaces et plus durables pour la participation de la société civile à l’élaboration, le suivi et l’évaluation de tous programmes de développement en Haiti, en tirant les leçons identifiées au cours de l’élaboration du CCI.
[1] La Coordination Europe-Haïti est un réseau d’associations de solidarité et d’organisations non-gouvernementales (ONG) européennes qui travaillent avec Haïti, en contact direct avec leurs partenaires haïtiens, eux-mêmes organisations non gouvernamentales et mouvements de base. Elle regroupe 60 organisations de 8 pays européens, Belgique, Hollande, France, Angleterre, Allemagne, Irlande, Espagne et Suisse et 98 organisations partenaires haïtiennes sur le terrain.