Communiqué de l’organisme de défense des droits humains de l’eglise catholique, Justice et Paix
Soumis à AlterPresse le 24 septembre 2005
Le Comite Exécutif de la Commission Justice et Paix s’est réuni en date du 21 septembre 2005. Il exprime son inquiétude concernant les préparatifs des élections de 2005.
1. Pendant que le CEP se félicite des 2.300.000 personnes inscrites pour obtenir leur carte de citoyenneté, nous nous inquiétons que nous ne soyons engagés dans un chemin d’élections qui marginaliseront davantage un bon nombre de personnes. Combien de personnes dans les zones rurales ont effectivement pu obtenir leur carte de citoyenneté ? Combien d’habitants dans les sections communales ont pu se faire enregistrer ? Dans combien de zones rurales on n’a jamais vu un bureau d’inscription ? Ceux qui ont réussi de se faire enregistrer, combien de temps ont-ils dû mettre pour le faire, et combien d’humiliation ont-ils dû subir ? Comment vont se dérouler les élections pour les CASEC et ASEC dans les sections où par exemple seulement 10 % des habitants ont pu obtenir une carte de citoyenneté ? Depuis le début des opérations électorales, on a opté pour des techniques avancées pour faire les cartes de citoyenneté ; on a perdu du temps précieux pour satisfaire des intérêts particuliers ; tout cela dans un pays où il n’y a pas de courant électrique 24 sur 24 dans les villes ; ne parlons pas des conditions de vie dans les sections communales. A plusieurs reprises, Justice et Paix a attiré l’attention des responsables sur cette situation dans la presse locale, et par des lettres à des Conseillers électoraux. Aujourd’hui nous nous approchons vers la fin de la période d’inscription, nous craignons que ces élections ne viennent consacrer l’exclusion du monde paysan.
2. Une réalité du pays est celle du grand nombre d’analphabètes. Ce n’est pas de leur faute, mais de la responsabilité de l’Etat et de ceux qui détenaient le pouvoir dans les années passées, si cela est toujours la réalité sociale. Mais les analphabètes sont des citoyens à part entière. Le Décret électoral ne prévoit rien pour les permettre de voter correctement. Tous ceux qui ont fait de l’observation électorale en 2000 se souviendront du fait que cette situation constituait une source de fraude durant les élections. Comment ces personnes pourront-elles exprimer leur choix quand elles se trouvent confrontées avec près de 50 photos, numéros et emblèmes de candidats à la présidence et parmi une multitude d’emblèmes et de chiffres pour un nombre important de partis politiques ? La Commission Justice et Paix avait proposé de permettre aux analphabètes de se faire accompagner d’une personne de leur choix au jour du scrutin. Aujourd’hui, la veille des nouvelles élections, nous constatons une nouvelle exclusion des analphabètes.
3. Considérant le grand nombre de candidats à la présidence, il devient clair que la préparation des élections par le CEP a été réalisée avec et en fonction des partis politiques. Peu de considération a été donnée à la population elle-même, depuis que les élections se déroulent à la mesure des politiciens. Pourtant, les citoyens eux-mêmes devraient être les principaux acteurs des élections. Les élections ne devraient être une lutte entre partis et politiciens, mais un moment où les citoyens d’un pays confient un mandat à ceux et celles qui ont comme tâche d’organiser le pays selon ses besoins et dans ses intérêts. Les politiciens devraient suspendre à tromper la confiance des gens avec de fausses promesses et de programmes politiques sans contenu réel. Travailler pour une démocratie réelle ne demande pas de courir derrière la position présidentielle. Si l’acteur social le plus important est le citoyen à la base, voyons plutôt ce qu’il faudrait faire pour intégrer les paysans marginalisés à la construction du pays.
Voici ce que nous proposons :
1. L’éducation civique aurait dû avoir lieu déjà .
2. Prolonger le temps pour permettre d’enregistrer les citoyens dans les sections communales où cela est nécessaire, et aller les trouver sur place.
3. Clarifier le Décret électoral pour permettre aux analphabètes de voter correctement.
4. Il faut que le CEP respecte tous ses engagements envers les personnes dans l’appareil électoral, pour les empêcher d’entrer dans des pratiques de corruption.
5. Il faut que le CEP étudie bien la localisation des bureaux de vote pour éviter toute confusion au jour du scrutin.
C’est le Comite Exécutif National de Justice et Paix qui envoie cette note.
(Suivent les signatures)
P. Gérald Domond et Marie-Ange Dagrin (Sud-Est), P. Antoine Paul-Vérèl et Xavier Edwitch (Grand’Anse), Menelus Elianne et Joseph Nardège (Nord-Est), P. Attilus Desca (Ouest), Désumé Israck et Marc-Edy Dessalines (Artibonite), Jn René Aubain, Rosemonde Sauray et Agéna Dominique (Sud), Joseph Alucia et Nicolas Valcimond (Nord), Odulson Désarmé et Céné Francklin (Centre), P. Jean Hanssens, Chrislaine Beaubrun (Comité Directeur National).