P-au-P, 06 nov. 2024 [AlterPresse] --- Le Cadre de liaison inter-organisations (Clio) demande aux autorités dominicaines de traiter dignement les migrantes et migrants haïtiens, lors de leurs déportations massives et forcées de la République Dominicaine vers Haïti, dans une note transmise à l’agence en ligne AlterPresse.
Tout en appelant au respect des droits des ressortissantes et ressortissants haïtiens dans les déportations en cours, le Clio exhorte les autorités dominicaines « à rechercher une solution plus digne, qui respecte les droits fondamentaux de toutes les personnes, indépendamment de leur nationalité et la couleur de leur peau ».
Toutes les organisations internationales et nationales, les groupes de la société civile et la diaspora haïtienne doivent s’unir pour accueillir humainement et dignement les Haïtiennes et Haïtiens déporté-e-s, encourage-t-il.
Le Clio demande d’offrir également un accueil digne aux Dominicaines et Dominicains noirs, jusqu’à ce qu’ils puissent retourner dans leur pays.
Le Cadre de liaison inter-organisations estime essentiel qu’un réseau de soutien soit créé, à travers Haïti et au-delà de ses frontières, pour offrir l’assistance et les ressources nécessaires à ces personnes vulnérables.
Il suggère d’agir rapidement « pour mettre en place des installations et des services d’accueil adéquats et inclusifs, et renforcer les capacités d’accueil de celles qui sont présentes le long de la frontière, afin de répondre aux besoins urgents des Haïtiennes et Haïtiens déporté-e-s ».
Ces besoins concernent l’accès à la nourriture, aux abris, aux soins médicaux, la mise à disposition de kits de dignité, l’accès à l’assistance juridique, afin de garantir le respect de leurs droits et de leur dignité, souligne-t-il.
Face à la crise humanitaire, le Clio exprime sa solidarité avec le peuple haïtien et toutes celles et ceux, qui s’engagent à défendre les droits humains et la dignité humaine.
Riposte de la ministre dominicaine de l’intérieur à une déclaration de Dominique Dupuy
Lors d’un forum citoyen, organisé le samedi 2 novembre 2024 dans la commune de Kenscoff (périphérie est de Port-au-Prince), la ministre haïtienne des affaires étrangères et des cultes (Maec), Dominique Dupuy, a salué la réduction des déportations des migrantes et migrants haïtiens en République Dominicaine.
Cette réduction serait le « fruit de nos efforts et de notre solidarité avec nos alliés », a-t-elle déclaré sur son compte X, soulignant combien Haïti aspire à un dialogue franc et respectueux avec la République Dominicaine, « pour un partenariat où chaque nation y trouvera ses avantages ».
« La politique d’immigration est un droit souverain de chaque État. Aucun pays ni organisation internationale n’a le pouvoir d’interférer dans les décisions internes de la République Dominicaine », a réagi sur son compte X, la ministre de l’intérieur de la République Dominicaine, Faride Virginia Raful Soriano.
Elle réaffirme l’engagement du gouvernement dominicain dans la mise en œuvre de son plan de rapatriements.
« Nous poursuivrons l’objectif de rapatrier 10,000 migrantes et migrants sans papiers par semaine, dans le plein exercice de notre souveraineté, protégée par les lois nationales et la Constitution dominicaine ».
Les chiffres
Du mercredi 2 octobre au mardi 5 novembre 2024, la migration dominicaine a rapatrié 60 mille 961 migrantes et migrants sans papiers, conformément au plan de rapatriement ordonné et sûr du gouvernement dominicain, indique Faride Virginia Raful Soriano.
Jusqu’au mardi 29 octobre 2024, 25 mille 575 Haïtiennes et Haïtiens, Dominicains d’origine haïtienne et autres ont été déportées par la République Dominicaine vers Haïti depuis le lancement, le mercredi 2 octobre 2024, par la République Dominicaine, d’une campagne d’expulsion de 10 mille migrantes et migrants haïtiens par semaine sur le territoire dominicain, selon l’Organisation internationale pour les migrations (Oim).
Pour sa part, la plateforme Groupe d’appui aux rapatriés et réfugiés (Garr) a enregistrée 26 mille 739 personnes expulsées par la République Dominicaine, du 1er au 30 octobre 2024.
De ce nombre, on dénombre des enfants mineurs non accompagnés, des femmes enceintes sur le point d’accoucher, des Dominicains noirs ainsi que des ressortissantes et ressortissants noirs d’autres pays, qui n’ont donc jamais mis les pieds en Haïti, note le Clio.
Contrairement aux garanties données par le gouvernement dominicain, les expulsions sont mises en œuvre en dehors des protocoles stricts visant à respecter les droits humains et la dignité de la personne, relève le Clio.
« Les personnes déportées sont souvent maltraitées, blessées, démunies de leurs documents d’identité et entassées dans des camions surchargés. Ces pratiques indignes sont une atteinte à notre humanité et au respect de la dignité humaine », dénonce le Cadre de liaison inter-organisations.
Ces déportations massives risquent d’entraîner de graves conséquences pour les migrantes et migrants haïtiens, ainsi que pour les zones frontalières avec la République Dominicaine, met en garde le Clio, une alliance collaborative réunissant 50 organisations nationales et internationales œuvrant en Haïti. [emb rc apr 06/11/2024 10:45]
Photo : Site X de l’Organisation internationale pour les migrations (Oim)