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Haïti : Grand Sud, visages de la crise

Entre attraits et abandon

Carnet multimédia de voyage

Par Gotson Pierre

Dernière actualisation, 09 oct. 2024 à 16:00 / Correction de quelques noms de lieux

P-au-P, 06 oct. 2024 [AlterPresse] --- La beauté naturelle côtoie l’abandon et le dénuement des régions géographiques du Sud d’Haïti, impactées comme les autres par la crise multidimensionnelle qui affecte gravement le pays depuis plusieurs années.

L’impression d’une couverture végétale très étendue domine, dans les départements du Sud, des Nippes et du Sud-Est, ainsi que dans une partie de l’Ouest. Grâce aux pluies de septembre. Sous le soleil, le vert est éclatant. Cocotiers, manguiers, bananiers, etc. se montrent en bonne santé. Mais les récoltes ne voyagent que difficilement. Tout comme les agents qui vivent de ce type de production ou du commerce des produits agricoles. Les autorités locales ou régionales en place sont incapables d’assurer la protection des personnes et d’effectuer les interventions publiques minimales attendues par les communautés.

Le Sud souffre terriblement du morcellement du territoire, depuis que les gangs empêchent la circulation de personnes et de biens en occupant violemment de nombreux espaces de vie ainsi que les principales routes qui relient les régions, notamment avec la capitale Port-au-Prince. C’est la conséquence du blocage par les gangs de Martissant (secteur sud de la zone métropolitaine de la capitale) depuis 2021, puis progressivement la plupart des zones limitrophes, jusqu’à Gressier (31 km), via Carrefour (13 km). Il faut prendre la dangereuse « route » de montagne de Laboule à Jacmel (93 km au sud-est de Port-au-Prince) en passant par Seguin (1,800m d’altitude). Ou prendre l’avion vers les Cayes (200 km au sud) pour reprendre la direction du Sud-Est. Trajet qui n’est réservé qu’à une toute petite minorité.

Du Sud aux Nippes

Une partie de la piste d’atterrissage de l’Aéroport Antoine Simon des Cayes

L’avion, qui décolle de Port-au-Prince pour se rendre aux Cayes, est quelques fois incertain. Patience. Mi-journée, atterrissage en douceur sur la piste de l’Aéroport Antoine Simon. Quelques branle-bas accompagnent l’arrivée de l’appareil. Un petit aérogare à 9 kilomètres au nord de la ville. Cet aéroport devient, par la force des choses, une plaque tournante pour le Grand Sud. Quatrième aéroport d’Haïti en terme de capacité d’accueil. Taxis, mendiants, vendeurs, etc. Ciel bleu, nuageux. Soleil pesant. Mario, le chauffeur, qui vient de Jérémie, dans la Grande Anse (une partie du Sud-Ouest), est à l’heure. Il connait trop bien toutes les régions de cette partie méridionale du pays.

Vue de la Plaine des Cayes en avion

Mario connait également les réalités de l’Ouest, où la violence des gangs fait rage. Sa famille habitait à Carrefour. Il a du déménager sa femme et ses deux enfants vers Jérémie. Ces derniers comptent désormais parmi les plus de 700,000 personnes déplacées à ce jour, en raison des violences armées qui ont fait 3,638 morts au cours du premier semestre 2024, une hausse de près de 74 % par rapport à 2023, calcule l’Onu. Les siens ont eu le temps de s’enfuir peu avant que la ville de Gressier soit bloquée, à cause des exactions des bandits et de leurs affrontements avec la police. Gressier est dans l’œil du cyclone depuis mai 2024. La maison de Carrefour gardée par un cousin est heureusement encore intacte. Dans cette commune métropolitaine, abandonnée par la police, c’est le va-et-vient incessant d’individus armés, raconte-t-il. Sous leurs yeux, les activités socio-économiques se déroulent tant bien que mal. Ils font constamment pression sur la population et multiplient des actes criminels.

Sortie de l’Aéroport Antoine Simon. Après les airs, la route. Pas de grande affluence. Véhicules privés, de transports en commun, y compris des motocyclettes relativement plus nombreuses. Apparence de circulation normale. Peu d’activités sur cette route secondaire reliant les Cayes à Camp-Perrin, derrière nous. La coquette petite ville de Camp-Perrin. Plus loin encore, ce serait Jérémie ou des communes voisines comme Dame Marie, Anse-d’Hainaut, Chambellan, etc. La route des Cayes vers la Grande Anse, relativement récente, est plutôt en bon état, dit Mario, quoique quelque peu abimée au niveau de quelques tronçons, par les derniers événements météorologiques et sismiques. Souvenirs de paysages magnifiques.

Ville des Cayes. Le rond point du Carrefour 4 Chemins, l’ombre de lui-même… Ou est passée la nuée de marchandes de tablettes de noix, pistaches et autres produits typiques ? La pompe a essence qui semblait au cœur d’une dynamique commerciale fébrile parait aujourd’hui désaffectée. Comme partout dans le Grand Sud, le commerce illégal et dangereux de carburant au détail prend de l’ampleur. Les pompes à essence sont devenues, pour certaines, des aires de stationnement.

Ruban routier dans le Sud d’Haïti

Voici le ruban de la nationale numéro 2. Le plan, c’est de rouler jusqu’à Carrefour Dufort, au Sud de Léogane, après avoir traversé une partie du Sud et une petite portion des Nippes. Avant de prendre la Route de l’Amitié qui mène à Jacmel, puis Cayes-Jacmel et Marigot.

Vaste plaines vertes. Des champs de Vétiver, de Pois Congo. Toutes sortes d’arbres fruitiers. Route plutôt fluide. Comme on le sait, le Sud est pratiquement isolé de la capitale. On croise des camions remplis de denrées se dirigeant vers le Sud. Quelques camionnettes en partie vides.

Pois congo et arbres fruitiers quelque part dans le Sud d’Haïti

Les montagnes sont majestueuses. La route va-t-elle s’y perdre ? C’est l’illusion que crée l’ensemble, comme un tableau de maître. Toujours cette merveille de la ligne de l’horizon maritime en toile de fond des cocotiers lorsqu’on atteint le sommet du morne Saint-Georges, à Aquin. Puis l’étendue bleue à droite, tandis que des bananiers partagent la lumière solaire avec les cocotiers et les Palma Christi.

Vue de la baie d’Aquin à partir du morne Saint-Georges

L’arrondissement d’Aquin s’offre en spectacle. En prime, sa magnifique baie. On entrevoit de petites îles, des plages à n’en plus finir. Mer turquoise. Sable blanc. Qui désespèrent d’accueillir des visiteurs, des baigneurs, des amoureux de la mer… Les portes des installations de plages demeurent fermées. Même celles de la célèbre Kokoye Anglade ! Il y a des dizaines d’années, des familles entières ou des groupes d’amis voyageaient directement de Port-au-Prince pour une journée à Kokoye Anglade. Et reprenaient la route avec le soleil couchant. Maintenant, c’est chose du passé.

Plage dans l’arrondissement d’Aquin le long de la nationale numéro 2
Plage dans l’arrondissement d’Aquin le long de la nationale numéro 2

Vendredi, jour de marché à Fond des Nègres, importante ville des Nippes, traversée par la nationale numéro 2. Ralentissement de la circulation, mais ça roule. Il devrait y avoir aujourd’hui un bouchon terrible, glisse Mario. C’est le plus important marché de toutes les régions du sud. Situé à un point presque central entre le Sud, les Nippes et le Sud-est, ce marché constitue un lieu d’échanges incontournable. Des produits agricoles spécifiques à divers micro-climats se côtoient (légumes, fruits, manioc, pistaches…). C’est, en ce sens, en temps normal, un carrefour de produits alimentaires agricoles et non-agricoles, précise Mario, un centre d’interactions entre les trois départements, sans compter des zones de l’Ouest.



Motos, véhicules privés et publics, dont de lourds camions, se frayent un chemin parmi les marchandises et leurs vendeurs et vendeuses qui cherchent à attirer des acheteurs. Les yeux cherchent dans la masse informe une image à retenir. La caméra prend tout et ne rejette rien : vendeurs ambulants, commerçants installés sous des parasols, marchands de volailles, de cordes synthétiques, de canne a sucre tranchée dans une petite cuvette, de foulards et autres produits en tissu accrochés à une barre d’exposition, d’unités téléphoniques… Vendeurs d’eau en sachets ou de jus en bouteilles, marchand d’eau censée potable dans un récipient promené sur la tête. Sous le soleil, on suce des sachets d’eau. Le reste est à jeter dans la rue. Sacs de denrées empilés sur le bas coté de la route ou rangés à l’arrière de camionnettes.

La caméra continue de tourner. Dans son champ, une camionnette remplie de bananes. Encore des étalages de produits et des tréteaux vides. Attention aux enseignes : « Immaculée borlette », « La vie en christ dépôt », « Dieu d’amour produits divers ». Ici, évidemment, l’argent circule. Activités de change « dollar, euro, dollar canadien ». En toute sécurité, présume Mario. Car les Nippes, où se trouve la ville de Fond-des-Nègres, c’est le département où on observe un peu partout l’influence du Commissaire du gouvernement Jean Ernest Muscadin. Chef du parquet de la ville voisine de Miragoâne, il ne badine pas avec les bandits. Il clame à qui veut l’entendre que ce département est un « cimetière » pour les membres de gangs. Il ne rate aucune occasion pour en faire la preuve. Des voix approuvent, d’autres critiquent. Parmi ces dernières, le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), qui qualifie d’anti-déontologique le comportement du commissaire du gouvernement de Miragoâne. « Accompagné de civils lourdement armés, Jean Ernest Muscadin, circule, avec en sa possession, des armes illégales. Il exécute souvent des personnes, qu’il présente comme étant des bandits, après les avoir soumises à un interrogatoire expéditif », lit-on dans un rapport.

Route nationale numéro 2 à hauteur des Nippes

Par un bel après-midi ensoleillé, le véhicule, avance vers Miragoâne. Entre vert et bleu, le fil de la route se déroule avec fluidité jusqu’au Carrefour Desruisseaux. Un repère inévitable, particulièrement pour se restaurer lors de tout périple incluant ce tronçon de la route nationale numéro 2. Les générations anciennes comme les nouvelles savent qu’on doit s’y arrêter pour déguster un plat de « bananes pesées et griot » préparé par des « cordons bleus » ayant leurs installations sur les trottoirs. Mais, Carrefour Desruisseaux a perdu de son éclat. Les activités sont réduites autour d’un Rond point crasseux et des infrastructures délabrées.

Par contre, il n’y pas de statistique sur les avantages que tirerait Miragoâne de la crise et de la déconnexion des villes par voie terrestre. Mario affirme que cette ville serait devenue le point de chute de beaucoup de biens embarqués sur des bateaux à Port-au-Prince. Entre autres des camions chargés de marchandises qui, une fois dans la principale ville des Nippes, poursuivent leur itinéraire vers d’autres destinations. Il ne se prive pas de le rappeler à chaque croisement de ces lourds véhicules.

La route nationale numéro 2 évite le cœur de la ville de Miragoâne, quelque peu coincée et d’une densité de population plutôt élevée. Ce ne sont que des souvenirs. Sont-ils fidèles ? En tous cas, c’est connu que le port international de Miragoâne est un des plus importants du pays. D’ailleurs, une bonne partie des installations, qui servaient au transport de la Bauxite entre les années 1940 et 1980 par la compagnie américaine Reynolds Mining, n’est pas utilisée. On ne sait même pas si un jour l’État peut avoir les capacités de réguler toutes les activités et transactions effectués à travers ce port. De Miragoâne, on peut rejoindre les hauteurs de Paillant, ou se rendre à Petit Trou de Nippes en contemplant des mangroves à perte de vue.

Vers l’Ouest

Mais, la prochaine étape de l’itinéraire est l’Ouest. Avant de tourner complètement dos à la commune de Miragoâne, Mario ne peut pas s’empêcher d’avoir un mot sur l’explosion, le 14 septembre 2024, d’un camion-citerne, qui a tué 27 personnes et blessé une cinquantaine d’autres. Le drame s’est produit quand beaucoup de riverains imprudents et non conscients des risques éventuels d’explosion, incluant des chauffeurs de motos-taxis, ont accouru pour essayer de récupérer le carburant du camion-citerne en panne, qui commençait à se répandre dangereusement sur la chaussée dans la zone de Calebassier. Promesse formelle des autorités : un tel drame ne se reproduira plus. Mais, sur toutes les régions du Grand Sud, une bonne partie de l’essence, très volatile, est débitée dans des gallons au bord de diverses artères.

Ce n’est plus le ruban lisse du Sud. Désormais, attention à des portions défoncées. Bientôt la commune de Petit-Goâve, porte d’entrée, au sud, de la région des Palmes, avec Grand Goâve, Léogane et Gressier. Cette région partage un certain nombre de caractéristiques, qui se notent depuis la principale voie qui les rattache. Aspects ruraux et urbains informels, plaines littorales et villages de montagne. Avec les dernières averses, la dégradation environnementale est quelque peu camouflée. La région est aussi directement concernée par la menace de l’insécurité et de la violence, qui vient de l’Ouest. Petit-Goâve se laisse parcourir facilement. Vendredi n’est pas jour de marché dans la localité de Vialet, où des échanges concernent toute la région des Palmes et au-delà.

Une partie du morne Tapion

Entre Petit-Goâve et Grand-Goâve, le Morne Tapion, célèbre pour les nombreux accidents qui s’y sont produits. Les risques n’ont pas totalement disparu. Il y a de nombreuses années, c’était la grande frayeur lorsqu’on devait gravir le millier de mètres d’altitude de cette chaîne, si bien que Tapion a inspiré un refrain populaire. « Lè m ap monte Mòn Tapion, kenbe do m mezanmi ». Appel à l’aide pour gravir une pente abrupte, qui a été, bien entendu, depuis longtemps, améliorée, grâce à d’importants travaux d’infrastructures. Qu’on ne s’y trompe pas cependant : « le moteur souffre », dit Mario, en poussant sur l’accélérateur sans trouver la réponse espérée de la part du véhicule. Mais, une fois là-haut, la vue sur un enchevêtrement de montagnes, qui se confondent avec l’horizon bleuté, est époustouflante.

A Grand Goâve, le circuit serpenté entre collines, d’un coté, et plaine littorale, de l’autre, remet en mémoire les plages magnifiques de la région des Palmes. Grand-Goâve, tout comme Petit Goâve et Léogane, a son propre cachet. Les trempettes sur de si jolies petites plages cachées, à l’abri de vagues violentes, ne s’oublient pas. Malheureusement, impactés par la crise, la plupart des auberges ou hôtels de plages de la zone ont dû fermer.

Carrefour Dufort, localité de Léogane. L’insécurité n’est pas loin. Le parfum de la canne-à-sucre en cours de transformation, qui identifiait cette zone, a peut-être disparu. Pas le temps de vérifier vraiment. Ce n’est pas un lieu où l’on s’attarde. De la station-service, ne restent que les seules installations, qui ne servent quasiment à rien. Avant, on s’y arrêtait particulièrement pour s’approvisionner en mangues. Léogane, vaste plaine fertile, est reconnue pour ses mangues juteuses. On avait le choix entre de nombreux étalages et les marchandes étaient gentilles. On pouvait négocier les prix. Elles ne cédaient, en fin de compte, que lorsque les acheteurs faisaient semblant d’abandonner, en remontant dans leurs véhicules. A ce moment précis : « pran l non cheri ».

Direction Sud-Est

Vue de la plaine de Léogane à partir de la Route de l’Amitié

Carrefour Dufort, ce n’étaient pas que des achats. Mais aussi des échanges, des conversations. Ces jours-ci, pas de risque. Vite, tourner à droite vers la Route de l’Amitié, ou Route Nationale numéro 4, don de la France à Haïti dans les années 1970. Direction Jacmel, Sud-Est, en passant par le morne La Selle, massif dont certaines élévations atteignent plus de 2,600 mètres. En flanc de montagne, des camions de sable arrivent en sens inverse. Ils avancent avec précaution. Heureusement. La route ne fait que commencer à s’élever. Déjà à droite, une vue de la plaine de Léogane de haut. Au fur et à mesure que l’altitude augmente, nait une autre perspective des massifs montagneux des Palmes. Entre l’Ouest et le Sud-Est, les mêmes régions de forte altitude sont vues autrement. Suite infinie de sommets plus ou moins couverts à cette saison de l’année. Un coup d’œil à gauche capte rapidement d’autres montagnes assez dénudées.

Vue de montagnes sur la Route de l’amitié
Vue de montagnes sur la Route de l’amitié
Portion défoncée de la Route de l’amitié, globalement très abimée

Durant tout le trajet, l’attention porte sur la route elle-même, parsemée de crevasses sur la plupart de ses 42 kilomètres. Fond d’Oies ou Fondwa se reconnait facilement. Les enseignes ne manquent pas. Malgré la progression en hauteur, la limite de la commune de Léogane n’a pas encore été franchie. Fond d’Oies a innové en mettant sur pied sa propre Université. Cela remonte à bien des années. Pignon sur rue. Petite devanture en bordure de la voie publique.



Le principal marché de Fond d’Oies, Tombe Gâteau, était, il y a quelques années, une référence absolue. Les voyageurs observaient un temps d’arrêt pour se restaurer ou pour se mélanger un moment à la population locale. Sentir battre le cœur du village à travers son marché emblématique. L’offre était plurielle : ignames, patates, manioc, bananes, pois Congo, haricots, maïs, café. Surtout le café. Oranges, chadèques, citrons, mandarines. C’est au retour vers Port-au-Prince qu’on s’approvisionnait vraiment. A l’aller, on se régalait du griot de porc… Que reste-t-il de tout cela ? Question lancinante ? Elle revient sans cesse. Pareil pour Decouze, localité de la commune de Jacmel. Voilà bien le Sud-Est.

Marché de Decouze - Activités nettement en baisse
Marchande solitaire sur la Route de l’Amitié, vers Jacmel

Decouze, un vendredi, jour de marché. Les Jacméliens n’en croient pas leurs yeux. En général, ça grouille et il faut mettre de la patience et des coups de Klaxon persistants pour franchir un espace plutôt compact. Pas aujourd’hui, dans un contexte de crise multidimensionnelle qui affecte le pays dans son ensemble. Des hommes et des femmes reviennent de marché, petits paniers ou sacs de produits sur la tête. Invendus ou provisions pour la maison ? Des commerçants s’attardent au bord de la route. Des minibus surmontés de sacs de produits agricoles à destination de Léogane ou d’une autre ville de la région des Palmes. Des moto taxis. Pas beaucoup de revenus à espérer. Les prix des produits agricoles ont beaucoup chuté.

Minibus prêt à partir, dans la zone de Decouze

Situation similaire dans plusieurs zones du pays sous l’emprise directe des gangs ou affectées indirectement par la violence des bandits, qui défient les forces de l’ordre. Récemment, dans la commune de Fonds-Verrettes, département de l’Ouest, des agriculteurs dénonçaient les conséquences néfastes de cette situation sur l’agriculture. Le blocage des routes a causé des pertes énormes : choux, oignons, haricots, carottes, etc. Isolement et gaspillage également dans le Nord et l’Artibonite, alors que les prix ne cessent point d’augmenter dans la capitale du fait de la rareté des produits cultivés dans les régions.

La descente. Aperçu aérien de la superbe baie de Jacmel. Bientôt le carrefour de La Vallée, paisible commune de l’autre coté de la Grande Rivière de Jacmel. Elle longe la route par endroit. Son lit ne fait que s’étendre inexorablement. Généralement, cours d’eau tranquille. Il accompagne les derniers kilomètres près de l’entrée de la ville, avant d’aller se jeter dans la Mer des Caraïbes. Rien à voir avec le phénomène extrêmement dangereux que représente cette Grande Rivière par temps de pluies, voire de cyclones.

Jacmel n’est pas accueillante. L’entrée de la ville devient de plus en plus repoussante. Constructions en dehors des normes urbanistiques. Anarchie. Piles d’ordures. Marchés sauvages. Partout, la débrouille. Le règne sans partage de l’informel. Tel est, en partie, le tableau offert par la ville où on observe, dans les rues les plus animées, une nuée de motos. Rareté artificielle de carburant. Le précieux produit est distribué à même le trottoir sous les yeux passifs des autorités. Rares sont les stations d’essence qui sont en fonctionnement. Pourtant, le carburant est livré, par des camions qui viendraient de Miragoâne suite à la traversée maritime depuis Port-au-Prince. L’impact sur les prix des produits de première nécessité et les services essentiels est catastrophique.

Vente de carburant dans une station-service de Jacmel

De jour en jour, les choses se compliquent davantage, constate Alcindor, directeur d’un centre d’enseignement supérieur. « Je suis très inquiet pour la rentrée ». Les familles ne sont pas en mesure de payer. Jusqu’à cette fin du mois de septembre, a peine quelques étudiants se sont acquittés des frais à payer. « Je comprends. Moi-même, je n’ai jamais connu une fin de mois d’aout aussi difficile » ! C’est une situation terrible que connait le pays, estime l’enseignant, alors que les autorités tant locales que nationales paraissent dépassées. « Un pays à l’abandon » où la corruption fait rage. Le niveau d’insalubrité et de délabrement des infrastructures publiques, notamment les routes et les rues, en témoigne. « Je ne vois pas où nous mène cette transition », s’inquiète-t-il, tandis que de nouvelles crises politiques se profilent à l’horizon. Les luttes de pouvoir, la corruption effrénée et la détérioration de la situation sécuritaire n’augurent pas d’une réussite de l’expérience. Depuis l’entrée en fonction du Conseil présidentiel de transition (Cpt), il y a six mois, de nouveaux territoires ont été investis par les bandits et de nouveaux massacres perpétrés, comme à Pont Sondé, dans l’Artibonite (Nord), le 3 octobre 2024. 70 morts. La veille, l’Unité de lutte contre la corruption (Ulcc) a publié un rapport demandant la mise en mouvement de l’action publique contre trois membres du Cpt sur neuf, Smith Augustin, Emmanuel Vertilaire et Louis Gérald Gilles, pour abus de fonction, réception de pot-de-vin et corruption passive.

Au cœur du Sud-Est

Vue depuis la côte de Cayes-Jacmel au crépuscule

Jusque dans les confins du Sud-Est, la route qui relie les principales communes est totalement défoncée. Elle fatigue les usagers. Et ne laisse pas contempler comme il se doit un si beau paysage. Vers Cayes-Jacmel, la plupart des auberges de plage demeurent fermées depuis des années. Le volume de visiteurs a fortement chuté et les maisons de plage ou propriétés installées sur le littoral semblent désaffectées. Le jour se lève et le soleil se couche seul. Peu d’yeux pour goûter de cette beauté impressionnante du ciel qui s’enflamme sur une ligne d’horizon salée.

L’horizon depuis la côte de Cayes-Jacmel au crépuscule

Comme diverses petites villes du Sud, des Nippes, des Palmes ou de l’Ouest, celles du Sud-Est semblent tristes. Peu d’activités socio-culturelles dans des espaces urbains pratiquement délaissés. Accumulation d’immondices, insalubrité, activités économiques sérieusement handicapées. Guerline, agricultrice et commerçante de Cayes-Jacmel, ne cesse point de se plaindre de la crise qui frappe de plein fouet la commune. Ses infrastructures routières n’ont jamais été aussi dégradées. La liaison avec Jacmel, principale ville du département, à quelques kilomètres, devient un calvaire. A cause de l’isolement forcé, les prix des produits agricoles sont divisés par 4. « Un régime de bananes, dont le prix normal devrait être de 4,000.00 gourdes, est liquidé à seulement 1,000.00 gourdes ».

Valse de départs et d’arrivées. Cayes-Jacmel se vide de ses ressources humaines. Le programme (d’immigration de l’administration du président américain Joseph Robinette) Biden constitue une saignée. Nombreux sont ceux qui s’en vont. Près de 200,000 Haïtiennes et Haïtiens admis, selon les statistiques récentes du ministère de la sécurité intérieure des États-Unis. Parmi les départs, ceux des Organisations non gouvernementales (Ong), auparavant nombreuses dans la région. « Elles se sont au fur et à mesure envolées ». Très peu de véhicules d’Ongs sont en effet remarqués.

Un après-midi à Cayes-Jacmel

D’autre part, les familles font de leur mieux pour gérer l’arrivée massive de personnes déplacées de la zone métropolitaine de la capitale, de Gressier et de Léogane. Certaines résidences tendent à devenir des campements de réfugiés, où la précarité domine. Une famille modeste est brusquement passée de 5 à 17 personnes. 17 couches à aménager. 17 bouches à nourrir. L’accès à la nourriture est donc de plus en plus improbable. Ce sont au moins 6,000 des plus de 700,000 personnes déplacées à l’intérieur d’Haïti qui sont menacées par la famine, selon un dernier rapport d’expert. « Le nombre de personnes confrontées à une faim aiguë atteint désormais la moitié de la population du pays », estime ce rapport conjoint de la Coordination nationale de la sécurité alimentaire (Cnsa) et des Nations unies.

« J’habitais à Mariani dans une propriété où je ne manquais de rien », se souvient Marianne, grand-mère dynamique. « Ayant au fil du temps investi dans plusieurs secteurs, j’avais des ressources suffisantes pour m’assurer une qualité de vie jusqu’à la fin de mes jours. Mais, il y a 6 mois, les bandits sont arrivés à Mariani et ont fait main basse sur la communauté. Ils ont pillé ma maison. Ils ont tout emporté. Meubles, appareils sanitaires et électroménagers, vaisselles et mes affaires personnelles. Ils ont également volé les marchandises qui étaient sur place et la centaine de cabris que j’élevais dans la cour. J’ai pris la fuite les mains vides. Les seuls biens que j’ai pu garder ne sont que la robe et les sandales que je portais ».

Marianne vit comme elle peut à Cayes-Jacmel depuis 6 mois. Elle n’a aucun espoir de pouvoir se reconstruire. « Je m’adapte difficilement. Vivre dans la précarité, sans aucun accès à l’électricité, est un cauchemar. Parfois, face à la mer, je me prends à rêver de ma vie d’avant. Je crois que je ne pourrai plus jamais récupérer mon espace de vie, conçu sur mesure, et, non plus, mes ressources. Je suis à jamais foutue ».

Installations de plages presque désaffectées à Cayes-Jacmel
Une partie de la plage de Raymond-les-Bains à Cayes-Jacmel

De retour à Cayes-Jacmel également, Jean-Claude, agronome et enseignant à l’université. « Il y a deux ans, j’ai été contraint de fuir la capitale avec ma femme et mes deux enfants. J’habitais à Torcelle où le nombre des actes de kidnappings est monté en flèche au cours de l’été 2022. A deux reprises, j’ai failli me faire enlever en compagnie d’un de mes enfants. Il a été traumatisé après avoir avoir assisté aux forfaits des bandits. J’ai ramassé tout ce que je pouvais et, à bord de deux véhicules, nous sommes partis pour ma ville natale. En passant par Laboule (périphérie est de la capitale), nous avons pris la périlleuse route de Seguin, la peur au ventre, pour parvenir enfin à Cayes-Jacmel, où nous nous sommes installés ».

L’agronome-enseignant se réjouit d’avoir pu bénéficier d’un transfert à l’Université publique du Sud-Est, branche de l’Université d’État d’Haïti, où il continue d’offrir ses services. « Depuis deux ans, ma famille est bien établie ici. Notre actuelle maison de Cayes-Jacmel, qui était autrefois une résidence secondaire, est à présent notre véritable repère familial. Les travaux ont été complètement achevés. De temps à autre, me parviennent les nouvelles de ma résidence de Torcelle à Port-au-Prince. Les bandits l’ont plusieurs fois cambriolée ».

Pour oublier, Jean-Claude vient quelques fois faire une parenthèse dans un petit bar de la côte. Aux échos recommencés à l’infini des vagues, se mélange une musique tantôt triste, mélancolique, nostalgique, tantôt animée, invitant à danser. Rythmes binaires, mouvements chaloupés, sous une lumière tamisée variant du rouge au vert. Pipo chante. Anciens tubes d’Haïti. Coupé Cloué. Tabou Combo. Anciens succès français les plus inattendus. « Ce soir, le vent vient de la mer… Et le bonheur est éphémère ».



L’ambiance peut brusquement chavirer sur des « chansons pointes » de l’univers vodou. Le tambour prend alors des accents provocateurs. Le « tchatcha » ponctue le rythme. Le bandjo suit. Le « mannouba », basse rustique, se met au pas. Assis sur le « mannouba », une grosse boite avec des morceaux de métal disposés sur la face trouée de l’instrument, Jules monopolise le chant. Il chante à tue-tête. « Haïti est alitée… ». Appel insistant aux dieux du vodou… Ferney, jeune père de famille, écoute. Il ne danse pas. Il est pensif. Il pense à son quotidien à Cayes-Jacmel. Il s’en sort difficilement. Quel espoir ? Il est agriculteur et pêcheur. Il s’occupe de ses jardins dans les hauteurs de Modèle, une localité qui surplombe la petite ville.

Vue des côtes de Cayes-Jacmel

Matin humide. Il a plu la nuit dernière. Mais cela ne dissipe pas tout-à-fait la chaleur. Ferney est à la plage. La plage, c’est juste en face de la maison. Il n’y a qu’à traverser la rue. La mer est moins agitée aujourd’hui. « C’est ce que nous appelons ici une belle mer. J’en profite pour faire nager mes enfants ». Deux garçons en bas âge. Dans l’eau salée, il est dans son élément. Sa vraie passion, c’est la pêche, c’est les bateaux. Ceux-ci, il les connait bien. En compagnie du collègue Marc, il sait courir la mer. Il sait comment « trancher les flots » avec un moteur 40. « Il ne faut jamais être seul en mer ». Leçon bien apprise depuis qu’il a vu sombrer le bateau de son beau-frère dont il avait la charge. Il avait jeté l’ancre pour aller prendre un café. Cela ne devait pas durer. Mais la mer de Cayes-Jacmel est parfois imprévisible. Brusquement, elle se déchaine. La barque devient folle. Elle se met à tanguer autour de son ancre, jusqu’à recevoir une puissante vague en plein milieu. Ferney s’affole et tente toutes les manœuvres. Ce n’est que pour assister finalement au naufrage.



Ferney n’a pas peur des espaces marins pour autant. Surtout pour aller pêcher en haute mer. Mais les pêcheurs sont également confrontés à de graves difficultés. Le prix exorbitant de l’essence affecte le secteur. L’essence est un produit de luxe à Cayes-Jacmel. Les pêcheurs se montrent très prudents pour ne pas s’exposer à d’énormes pertes. « Je suis découragé. Je vis de petits jobs. Quand l’occasion se présente, j’organise des promenades en mer pour de rares visiteurs. Plus rien à faire vraiment dans cette commune. Je voudrais m’enfuir ».

Vue de quelques régions du Sud-est au large

Le beau-frère de Ferney, pêcheur aussi, se voit beaucoup plus comme un entrepreneur. Il vit entre Cayes-Jacmel et Aquin. Sa femme, jeune agronome sans emploi, est d’ici. Ils ont deux enfants. « Voici mon bateau, ramené à terre depuis très longtemps », dit Philippe, en montrant l’écran de son téléphone intelligent. Il voudrait investir un capital plus important dans la pêche, avoir des associés, bien s’équiper et faire de bonnes affaires. Développer une clientèle à la capitale. Il a essayé, dans le quartier périphérique de Pétionville. « Je veux recommencer ». Mais, le risque élevé de conduire des opérations de pêche sans possibilité d’écoulement des produits au delà du marché local fait réfléchir à deux fois. Du coup, d’importants investissements de pêcheurs moyens sont gelés.

L’horizon vu des hauteurs de Corail Soult, Marigot

Comme pour Cayes-Jacmel, la pêche constitue une des principales activités de la commune côtière voisine de Marigot, plus à l’est. On y construit également des bateaux, souligne Philippe. « Et ce n’est pas d’aujourd’hui ». Marigot est en train de devenir un pôle très important, estiment plusieurs habitants de Cayes-Jacmel. Son port s’impose pour le cabotage régional, avec des accidents regrettables. Mais aussi pour le commerce. « C’est le samedi qu’il faut aller le constater : des bateaux en provenance de plusieurs pays des Caraïbes, notamment de Martinique, Guadeloupe (Départements français d’Amérique) ou de la République Dominicaine », témoignent des riverains. Quel impact sur l’économie des communes de la côte ? Et surtout quel contrôle de la part des autorités locales ou du Service maritime national ? Trafics de produits illicites ? Trafics d’armes et de munitions ?

Tronçon de route Marigot/Cayes-Jacmel, les infrastructures ont disparu

Malheureusement, aujourd’hui est vendredi. Sur une route construite vers le milieu des années 1990 et qui n’en est plus une, le véhicule roule avec précautions. Il suit une camionnette rouge, transportant peu de passagers. La camionnette bifurque pour éviter des travaux d’infrastructures, suspendus depuis très longtemps. Quelques drains sont éparpillés dans les accotements. Bientôt, il faudra tourner à gauche et laisser la route principale. Rendez-vous à Corail Soult, première section communale de Marigot. Juste un tracé qui se hisse entre grosses pierres et précipices à travers la montagne escarpée. Tout au long de la route, quelques constructions, dont certaines inachevées, soulignent la volonté de retours périodiques de membres de la diaspora ou de personnes vivant à la capitale. La couverture végétale est relativement imposante. Arbres fruitiers se mélangent aux arbres forestiers pour former une végétation dense par endroits. Manguiers, chênes, cocotiers, palmistes, pins, arbres véritables, corossoliers, avocatiers, palma christi, etc. Des parcelles de jardins familiaux sont observés dans les enclos de maisonnettes assez souvent élégantes.

Coquette petite maison sur la route de Corail Soult, Marigot
Jardin familial à Corail Soult, Marigot

Seuls de puissants 4x4 peuvent s’aventurer à Corail Soult. En fait, les véhicules ne fréquentent que rarement la localité relativement haut perchée et qui est avant tout la terre des palmiers. On en trouve à chaque pouce de ce village de montagne. Il y a quelques années, c’était une importante source de revenus pour les familles. La production artisanale de Jacmel, fortement demandée par les touristes, comptait beaucoup sur le latanier de Corail Soult. « Quand le tourisme était florissant à Jacmel, les opérateurs venaient ici acheter des feuilles de lataniers soit pour confectionner des produits artisanaux, soit pour construire des toits de ‘choucounettes’ (tonnelles) de plages », indique une responsable locale. La température est agréable. La vue sur la mer des Caraïbes et les côtes de Cayes-Jacmel et Marigot est magnifique.



Une population composée en majorité de jeunes vit dans cette petite et tranquille communauté. Des voix au loin se mélangent au bruit des insectes et aux chants d’oiseaux. Sans compter le bruit de l’eau de la fontaine communautaire. Une jeune fille remplit son seau, alors que des hommes d’âge mur se mobilisent pour diminuer les obstacles sur le chemin. Ils travaillent à casser les plus grosses pierres. Ce n’est pas tâche facile.

Jeune fille à la fontaine de Corail Soult à Marigot
Hommes au travail sur la route de Corail Soult à Marigot

Au bout, la chapelle Sainte-Thérèse, qui reçoit de nombreuses visites chaque 6 octobre, jour de fête patronale. La chorale est en répétition. On se prépare à recevoir de nombreux pèlerins, se réjouit une femme. Les jeunes anticipent déjà l’ambiance. Ils ont l’air content. Ils jouent dans les jardins de la chapelle et se taquinent l’un l’autre.

Chapelle Sainte-Thérèse à Corail Soult, Marigot
Dans les jardins de la chapelle Sainte-Thérèse de Corail Soult, à Marigot, des enfants jouent

Dans un espace dégagé, non loin de la chapelle, une tonnelle au toit de feuilles de latanier. Ici, on vient s’amuser, danser, chanter, boire et manger à l’occasion de la Sainte Thérèse ou à d’autres occasions festives. Les commerçants de la zone en profitent pleinement. Pour le moment, en fin de matinée, une trentaine de femmes y tient une réunion. Ce sont des femmes mures et des jeunes filles. Elles discutent de la participation des femmes aux affaires de la communauté. Du haut de leur montagne isolée, comment vivent-elles leur appartenance à la société haïtienne ? Quel regard portent-elles sur la « République de Port-au-Prince » ou sur Haïti ?

Réunion de femmes de Corail Soult sous une tonnelle

Haïti est un « pays enchaîné ». La femme qui l’affirme est énergique. Soudain, elle se met debout. Elle dit des choses. Elle dessine des gestes. Comment libérer le pays ? Elle n’a pas la réponse. Réflexion. Une autre prend la parole : « pour sortir de l’impasse, seules les élections peuvent ouvrir une voie ». Mais il faut préalablement, souligne-t-elle, régler le problème de la violence et de l’insécurité. Les autorités y parviendront-elles ? Le plus gros défi, soupire une femme en prenant sa mâchoire dans ses deux mains, est de mettre fin à l’insécurité en éradiquant les réseaux de gangs. Elle n’a pas le temps de parler de la corruption qui gangrène l’administration publique, de la base jusqu’au sommet. « Quelle tête (autorité) pourra ramener la sécurité » et remettre le pays sur les rails ? Se sont-elles approprié les discours de la capitale ? Dans leur quotidien, quelle différence ferait l’existence d’autorités légitimes ? Autorités locales. Quel véritable statut de la présidente du Conseil d’administration (Casec) de la première section communale de Marigot ? Est-elle toujours présidente depuis huit ans ? Quel est son rapport à l’État et comment son statut sert-il Corail Soult ? Quelle articulation d’une éventuelle gouvernance locale avec les structures de sécurité ? Dans quelle mesure la population, les biens de la communauté, les exploitations agricoles, le bétail et toutes autres ressources sont-ils protégés ? Ailleurs, des autorités locales se sont enfuies depuis longtemps, à la faveur du « Programme Biden ». Sauve-qui-peut. Au niveau de ces petites communautés, c’est également l’incertitude. Couplée à une bataille contre le désespoir. Comme le Sud qui se reverdit, c’est Haïti toute entière, toute la société, qui a besoin de renouvellement. D’un nouveau printemps. [gp apr 06/10/2024 06:00]

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Photos et vidéos : Gotson Pierre
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