P-au-P, 18 août 05 [AlterPresse] --- L’Association de Santé Publique d’Haïti (ASPHA) a exprimé ce 18 août sa préoccupation face au danger que représente la consommation du tabac pour l’être humain et appelé les Haïtiens à faire front commun en vue d’éradiquer la promotion de ce produit à travers les médias.
Le docteur Vély Jean François, président de l’ASPHA, citant le Directeur général de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), a fait savoir que le tabac reste l’une des principales causes de mortalité dans le monde avec près de 6 millions de décès par an. Chez nous en Haïti, bien que nous n’ayons pas encore de chiffre officiel, la situation reste préoccupante, a-t-il ajouté.
Une première enquête réalisée en 2001 par l’Association de Santé Publique d’Haïti au niveau des écoles de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince, révèle que parmi les adolescents de 15 à 18 ans et au niveau des classes de 6e à 4e, 24% ont déjà fait l’expérience du tabac et 12% fument régulièrement. Les résultats d’une deuxième enquête menée cette année en partenariat avec les universités privées Notre-Dame, Quisqueya et l’Institut des Hautes Etudes Commerciales et Economiques (IHECE) sont en train d’être analysés.
« Il faut prendre des mesures pour réduire le tabagisme en faisant bannir la publicité pour le tabac, bannir le tabac dans les lieux publics et interdire la vente de cigarettes aux mineurs et par les mineurs, car l’épidémie du tabac est une maladie entretenue par la publicité », a lâché le docteur Jean François.
Le spécialiste de la santé a fait savoir que cette épidémie affecte de plus en plus les pays en développement et les populations pauvres, faisant perdre à ces pays des sommes importantes qui auraient pu être investies dans la santé.
Selon l’OMS, le tabagisme provoque un décès toutes les 6,5 secondes. Les chercheurs estiment, quant à eux, que ceux qui commencent à fumer à l’adolescence et continuent pendant 20 ans ou plus ont une espérance de vie réduite de 20 à 25 ans par rapport à ceux qui n’ont jamais touché une cigarette.
Les préoccupations de l’ASPHA rejoignent la vision des pays qui ont adopté à l’unanimité le 23 mai 2003, à l’assemblée mondiale de la santé, la convention-cadre de lutte anti-tabac de l’OMS et à laquelle Haïti a souscrit.
L es turbulences politiques qui secouent Haiti n’ont jusqu’ici pas favorisé la ratification de cette convention, selon Rudy Magloire de l’OMS.
« Nous nous réjouissons de l’engagement pris par l’ASPHA de faire connaître cette convention-cadre et de (...) faire la promotion pour que ce qui est proposé dans ce document arrive à voir le jour dans notre pays », a-t-il souhaité.
Le docteur Joseline Francesca Marhône Pierre du Ministère de la Santé Publique et de la Population (MSPP), a, pour sa part, appelé les forces vives de la nation à promouvoir la lutte contre le tabagisme « afin de libérer nos jeunes de cette dépendance qui ne fait que les diminuer dans leur productivité » et prévenir chez eux l’apparition et/ou l’installation de maladies cardio-vasculaires.
« Haïti a besoin de nous, surtout de nos jeunes, continuons notre engagement pour faire d’elle un espace sans tabac où il n’y aura plus de fumeurs passifs subissant les conséquences d’une habitude qu’ils ne pratiquent pas », a-t-elle martelé.
Le docteur Marhône Pierre a fait savoir que si dans le maintien de l’équilibre de la faune et la flore, le tabac peut avoir un quelconque avantage, chez l’homme il n’est d’aucune utilité et est plutôt dévastateur des différents systèmes biologiques vitaux.
Des pays développés comme le Canada et les pays membres de l’Union Européenne ont déjà pris des dispositions contre la consommation du tabac par les adolescents. Au Canada, l’interdiction totale de fumer est entrée en vigueur depuis le 1er juillet 1996.
Selon le spécialiste Jacques Antoine Jasmin, dans les pays sous-développés la consommation du tabac est la plus répandue. En Afrique, la campagne mondiale contre le tabagisme pose un grave défi au Malawi, pays dont les recettes publiques, l’emploi et le financement du développement dépendent presque exclusivement de la culture du tabac.
Jasmin a précisé que le tabac est cultivé dans plus d’une centaine de pays dans le monde entier et le secteur emploie environ 33 millions de personnes. Cependant, a-t-il dit, seul un petit nombre de pays en développement comme le Malawi et le Zimbabwe sont fortement tributaires de cette culture.
L’Afrique du Sud est considéré comme un modèle dans la lutte anti-tabac sur le continent. En 1990, 40 milliards de cigarettes ont été consommées. Grâce à une vigoureuse campagne anti-tabac menée par le gouvernement et des groupes de la société civile, la consommation de ce produit a chuté à 24 milliards de cigarettes en 2003.
De l’avis des responsables de l’Association de Santé Publique d’Haïti, les autorités étatiques et les divers secteurs de la société haïtienne doivent joindre leurs énergies en vue d’inciter la population, particulièrement les jeunes, à ne pas consommer le tabac et à ne pas se laisser influencés par les spots publicitaires des compagnies de tabac. [do gp apr 18/08/05 16 : 00]