P-au-P, 13 sept. 2024 [AlterPresse] --- La détérioration de la situation sécuritaire dans la commune de Fonds-Verrettes, dans le département de l’Ouest, entraîne des conséquences néfastes sur l’agriculture.
Les difficultés d’accès aux principales routes de la commune empêchent l’écoulement des produits sur le marché local. Ce qui provoque une perte des différentes récoltes à Fonds-Verrettes comme les choux, les carottes, les pois, les oignons, rapporte un jeune agriculteur à l’émission PouDemenKaBèl diffusée sur AlterRadio 106.1 FM ainsi que diverses plateformes Internet, et suivie par l’agence en ligne AlterPresse.
Le blocage, depuis plusieurs semaines, des routes à Fonds-Verrettes engendre le gaspillage des produits cultivés, ajoute-t-il, soulignant combien la survie des habitantes et habitants dans cette commune dépend, en grande partie, de l’agriculture.
Les agricultrices et agriculteurs « ont tout perdu : les choux, les oignons, les pois, les carottes. Ils n’ont pas pu écouler les produits à destination », se désole-t-il, demandant à l’État d’intervenir.
Les voisins dominicains, dès fois, achètent nos pommes de terre et nos mais à des prix rabaissés, tout en sachant que les vendeurs haïtiens n’ont pas d’autres choix, regrette l’agriculteur.
Isolement et gaspillage dans le Nord et l’Artibonite
Dans la commune de Quartier Morin (Nord), les prix de plusieurs denrées ont chuté de manière significative, confiait à AlterPresse/AlterRadio, durant l’été, l’ancien député et entrepreneur agricole Hugues Celestin.
Un sac de patates, qui se vendait à 7,500.00 gourdes, peut être vendu aujourd’hui à 2,500.00 gourdes en raison de l’abondance sur le marché local, car il est impossible de transporter les produits vers les marchés régionaux, souligne-t-il.
Des productions, comme celles de l’arbre véritable (fruit), pourrissent sur place et « c’est grave ». Tomates et oignons sont en « liquidation ».
L’accroissement anormale de l’offre sur les marchés locaux est également du aussi à l’impossibilité pour les productrices et producteurs dans l’Artibonite - autre département dans le Nord du pays, un grenier gangrené par la violence des gangs - d’atteindre les points de vente de la capitale, Port-au-Prince, dans l’Ouest.
Ces agentes et agents économiques sont obligés de se tourner vers des localités du Nord.
Les transporteurs et marchands se font extorquer, sont en danger de mort et les femmes sont sauvagement violées par les gangs armés qui occupent divers tronçons de routes inter-régionales ou nationales.
La situation de terreur et de criminalité, entretenue en toute impunité par les gangs armés a entraîné des conséquences négatives sur la production agricole, pas seulement le riz, mais aussi les produits maraîchers, comme l’aubergine, le mirliton, les épinards, le lalo, les haricots, le poireau, le persil, l’oignon, les tubercules, la patate, la tomate, les choux, les fruits à teneur en vitamine C, etc.) dans la Vallée de l’Artibonite.
L’alerte avait été lancée en février 2023 par l’ingénieur-agronome Jean André Victor, ancien directeur général de l’Organisme de développement de la Vallée de l’Artibonite (Odva), dans une interview accordée à la plateforme AlterPresse/AlterRadio.
L’Artibonite considérée comme le grenier à blé du pays, représente le deuxième département d’Haïti où « la sévérité des besoins multisectoriels est la plus élevée après celui de l’Ouest », relève le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations unies en Haïti (Ocha), citant le plan de réponse humanitaire 2024.
Très actifs dans le Bas Artibonite, ainsi que L’Estère et Gros Morne, les groupes armés exercent leur influence sur près de 60 % du territoire du département, ajoute l’Ocha dans un document publié le jeudi 12 septembre 2024.
Faim aiguë
Lors d’une visite en Haïti, la semaine dernière, des hauts responsables de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (Fao) ont signalé combien l’escalade de la violence et l’augmentation des déplacements de personnes, depuis février 2024, ont considérablement réduit la production agricole et perturbé les marchés, laissant la moitié de la population haïtienne dans une situation de faim aiguë.
La Fao s’est dit déterminée à fournir un soutien agricole d’urgence pour les prochaines saisons de plantation en Haïti.
Elle estime nécessaires des fonds supplémentaires pour sauver des vies, prévenir la faim et la famine et aider les populations vulnérables à rétablir leurs moyens de subsistance dans un contexte de violence et de déplacements sans précédent.
« Près de cinq millions de personnes connaissent des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë et environ 125,000 enfants souffrent de malnutrition aiguë sévère ».
Le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations unies en Haïti (Ocha) a aussi mentionné une situation socio-économique et humanitaire sans précédent dans le pays, subissant l’impact de la crise sécuritaire et l’augmentation de la violence contre la population, ainsi que l’effondrement de la production agricole, des marchés et des moyens de subsistance. [mff emb 16/09/2024 11:00]