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Haïti-Eau potable : Dans le silence des oublié-e-s de Port-au-Prince

Par Elmano Endara Joseph*

Soumis à AlterPresse le 15 juillet 2024

Aujourd’hui, en 2024, la criminalité et la misère sont omniprésentes à Port-au-Prince, la capitale d’Haïti.

En raison de la terreur et d’autres violences des gangs armés, Port-au-Prince, une des villes côtières d’Haïti, abrite, depuis plusieurs mois, de nombreux camps de personnes déplacées.

Des milliers de personnes y vivent dans des conditions précaires, luttant quotidiennement pour leur survie dans des conditions cauchemardesques, dans un paysage où, jadis, prévalaient une beauté naturelle et un environnement agréable.

Inaccessible, l’eau potable reste un défi majeur dans plus de 85 sites de personnes déplacées à Port-au-Prince. Ce besoin fondamental de droits humains est devenu un luxe inatteignable pour beaucoup.

« Nous demeurons dans des espaces très réduits. Quand il pleut, nous devons user d’acrobaties, surtout, le soir, pour arriver à dormir avec les enfants, Car, l’eau de pluie arrive à flots », témoigne Évelyne, une mère célibataire de 6 enfants, devenus orphelins de leur père, tué par les gangs armés lors des attaques sanglantes à Carrefour Feuilles.

Robinets vides, ventre creux

Il est 10:00 am (14:00 gmt).

Il n’y a plus d’eau, qui coule dans les robinets. Les réservoirs sont secs.

Seulement 10 mètres séparent les deux sites de personnes déplacées, à l’avenue Christophe et à la rue Roy, non loin de l’Institut national d’administration, de gestion et des hautes études internationales (Inaghei) de l’Université d’État d‘Haïti (Ueh).

La situation sanitaire y est critique. La pénurie d’eau potable y est criante.

Depuis plus d’une année, ces lieux manquent d’infrastructures de base, rendant extrêmement difficile l’accès à l’eau potable et à des installations sanitaires adéquates pour les résidentes et résidents.

« Nous n’avons pas d’eau, ni de quoi manger. Nous n’avons rien. Il faut que le pays change, pour que nous puissions reprendre nos activités régulières », souhaite Tania.

Mère veuve de quatre enfants, Tania se bat pour survivre. Ses enfants sont dispersés, avec la multiplication des violences des gangs armés, depuis février 2024, dans la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince. Le père de ses enfants a été tué par balles, provenant de tirs de gangs armés.

« J’ai 4 enfants, mais les violences armées à Port-au-Prince les ont séparés de mes bras. Je ne sais pas où ils sont pour l’instant », murmure Tania, à bout de soufflé, dans un silence qui ronge les souvenirs de sa vie antérieure avec ses enfants.

A la mi-juillet 2024, plusieurs centaines de personnes déplacées se retrouvent sans accès à l’eau potable depuis plus de 60 jours, dans plusieurs camps à Port-au-Prince.

Le quotidien de ces personnes oubliées est marqué par la dure réalité d’une quête incessante d’eau et de moyens pour subvenir à leurs besoins fondamentaux les plus élémentaires.

Jusqu’à quand un verre d’eau potable cessera-t-il d’être un cauchemar pour les personnes déplacées dans la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince ?

Jusqu’à quand les autorités entendront-elles les cris de ces personnes déplacées, pour répondre à cette crise humanitaire en garantissant à toutes et tous l’accès digne à leurs besoins fondamentaux ?

Insatisfaction des besoins essentiels les plus élémentaires

« Je vis dans une situation extrêmement grave. Je ne sais pas quoi faire. Je n’en peux plus », lâche Junia, essayant de contenir ses propos amers.

Les habitantes et habitants, y compris des dizaines d’enfants de moins d’un an, sont contraints de vivre dans une résignation hygiénique lamentable. Cette situation risque d’aggraver les précarités et de provoquer des maladies bucco-dentaires ainsi que d’autres infections, selon des spécialistes.

Au moins 1,000 enfants meurent chaque jour dans le monde, à cause de l’eau insalubre, relève l’Organisation des Nations unies (Onu).

Cette statistique alarmante souligne l’importance cruciale de l’accès à l’eau potable pour la survie et la santé des enfants, une réalité encore plus pressante dans les camps de personnes déplacées à Port-au-Prince.

Depuis l’année 2023, plus de 600 mille personnes ont été contraintes de se déplacer de leurs maisons, avec la terreur et d’autres violences des gangs armés dans la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince.

* Étudiant finissant en communication sociale à la Faculté des sciences humaines (Fasch) de l’Université d’État d’Haïti (Ueh)