Communiqué de presse du Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants et de Solidaridad Fronteriza, en date du 11 aout 2005
Soumis à AlterPresse le 14 aout 2005
Du vendredi 5 au samedi 6 août, 286
haitien-nes sont rentrés en Haïti par le point frontalier Ouanaminthe-Dajabón, en fuite de la situation de violence qui s’est
établie à Pueblo Nuevo suite à l’assassinat d’un adolescent dominicain
attribué à un haïtien.
Le Service Jésuite des Réfugiés et Migrants, Solidaridad Fronteriza-Solidarite Fwontalye lancent un appel à la localité de Pueblo Nuevo pour que des citoyen-nes en colère n’exercent de représailles ni
se fassent justice, parce que la solution aux crimes et à la migration irrégulière ne consiste pas à entreprendre des actions violentes contre
une minorité vulnérable.
Après environ trois mois depuis que se sont passés les évènements de
Hatillo Palma (Montecristi), la Province de Valverde Mao continue à
enregistrer des actes de violence contre la minorité haitienne résidant
dans cette zone.
Cette fois-ci, la mort du jeune dominicain Diocronis de Jesús Caba a injustement affecté tous les haitien-nes et dominicain-nes d’origine haitienne qui vivent et travaillent dans la zone sous prétexte qu’un de leurs compatriotes aurait commis ce crime. Concrètement Orlando Simon, travailleur Haïtien, a été grièvement blessé et il est à l’hôpital de la ville de Mao.
Comme conséquence, des centaines d’haitien-nes ont abandonné Pueblo
Nuevopar peur d’être victimes des persécutions menées par quelques
citoyens dominicains armés de bâtons, de « colinas » et de machettes.
Obligés de laisser leurs propriétés, biens et même leurs parents et
enfants, ils/elles sont retournés en Haiti, ou bien directement de façon
volontaire, ou bien après avoir reçu protection dans la caserne
militaire de Mao et dans les commissariats de police de la région.
D’autres restent « cachés » chez des amis dominicains ou aux alentours
de la localité. Des témoignages nous ont confirmé que plusieurs d’entre
eux, quoique blessés, sont poursuivis.
L.G. de 27 ans et son enfant de 10 mois sont arrivés à Ouanaminthe le
samedi 6 août : « Un groupe de dominicains arrivaient chez moi et
détruisaient ma maison au complet. J’ai eu le temps de me cacher chez
une voisine dominicaine et celle-ci m’a remise par la suite aux
militaires. Si je ne m’ étais pas cachée, ils m’auraient tuée. Depuis
lors, je n’en sais rien de mon mari qui, en ce moment, était en train de
travailler dans la ferme agricole†.
A.P., de 19 ans, était aussi dans une plantation de banane : “C’était
jeudi matin quand j’avais vu arriver un groupe de 10 dominicains armés
de machettes et de bâtons : j’ai pris la fuite, mais le jour suivant je retournais au travail. Puis, un autre groupe de dominicains y arrivait
avec les mêmes intentions, c’est ainsi que le patron décidait de nous
conduire à la caserne militaire de Mao où nous étions restés jusqu’à
samedi. Les militaires nous ont conduits à la frontière, mais je ne peux
pas rester là : à Pueblo Nuevo, j’ai laissé mes choses, ma motocyclette
et mon travail†.
Le vendredi 5 et le samedi 6 août, nous avions observé 286 haitien-nes traverser la frontière en direction d’Haiti comme conséquence de ce qui
s’était passé à Pueblo Nuevo. De cette quantité nous avions pu recevoir
au Centre d’accueil provisoire de Solidarite Fwontalye/SJRM à
Ouanaminthe 64 haitien-nes, dont 26 hommes, 13 femmes, 2 mineurs non
accompagnés et 23 enfants. Ces personnes nous ont témoigné de cette
vague de violence dont elles se sont échappées.
Le SJRM - Service Jésuite des Réfugiés et Migrants, Solidaridad Fronteriza-Solidarite Fwontalye, nous savons gré à l’Armée Nationale Dominicaine sous le commandement du général Pedro Cáceres Cestano et à
d’autres autorités militaires et civiles de la Province de Mao pour les mesures et actions rapides et efficaces qu’ils ont prises pour contrôler
la situation. Tout en regrettant la mort de Diocronis de Jesús Caba et,
par la suite, celle du travailleur haitien Orlando Simon entre les mains
de quelques personnes furieuses de la comunauté, nous demandons aux
autorités dominicaines de maintenir leur ferme détermination de rétablir
l’ordre et la paix, ces deux éléments qui ont toujours caractérisé la
communauté de Pueblo Nuevo.
De la même façon, nous lançons un appel aux habitants de la communauté
de Pueblo Nuevo pour qu’ils sachent distinguer entre quelqu’un qui a
commis un crime et les haitien-nes qui vivent et travaillent
pacifiquement dans la zone. Quoiqu’il y ait une forte présence
d’haitien-nes qui résident de
manière irrégulière dans la communauté, il ne faut pas pour autant les traiter comme s’ils/ellles étaient tous et toutes des criminels.
Nous demandons aux autorités et à la société civile dominicaines de travailler à définir une nouvelle politique migratoire entre la
République Dominicaine et Haiti qui puisse contrecarrer le phénomène de
la migration irrégulière.
José Nuñez SJ,
Service Jésuite des Réfugiés et Migrants
Contacto : santodomingo@sjrdom.org
Lissaint Antoine SJ,
Solidarite Fwontalye/Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants
Contacto : solidarite@sjrdom.org
Regino Martànez SJ
Solidaridad Fronteriza,
Contacto : solidaridad@sjrdom.org