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Haiti : L’ambassadeur américain qualifie de scandale la libération d’un ex paramilitaire et le maintien en prison d’un ancien premier ministre

P-au-P., 12 aout 05 [AlterPresse] --- L’ambassadeur américain en Haiti, James B. Foley a sévèrement condamné ce 12 aout la libération par la justice, la veille, d’un ex para-militaire, Louis Jodel Chamblain, et le maintien en prison de l’ex premier ministre Yvon Neptune.

« L’élargissement de l’ex-paramilitaire Louis Jodel Chamblain (précédemment condamné pour son implication dans divers crimes) est un scandale pour le pays » et pour limage d’Haiti à travers le monde, a déclaré le diplomate lors d’une conférence de presse d’adieu, avant son départ du pays.

l’ex paramilitaire Louis Jodel Chamblain, emprisonné depuis avril 2004, pour implication dans plusieurs crimes, a été libéré ce 11 aout, en vertu d’une décision de la Cour d’Appel de Port-au-Prince, sur la base de vice de forme. Une disposition précédente de la justice, condamnant Chamblain par contumace en l’an 2000 pour son implication dans un massacre en 1994 aux Gonaives (nord).

« Nous savons que Chamblain c’est un monsieur qui a été jugé coupable à plusieurs reprises pour des crimes horribles », s’est indigné Foley. « Imaginez un seul instant l’image ternie d’Haiti aujourd’hui dans le monde avec un Chamblain qui sort de son incarceration et un ancien premier ministre qui continue à croupir en prison », a poursuivi foley.

L’ambassadeur américain a considéré l’emprisonnement de Neptune comme un cas « violation des droits de l’homme » et menacé les fonctionnaires ayant une responsabilité dans ce dossier de se voir refuser l’entrée aux Etats-Unis. « Les responsables de ce cas judicaire, qui sont, à notre sens, impliqués dans une violation des droits de l’homme, (...), ne seront pas les bienvenus dans mon pays » a-t-il averti.

Neptune « est en prison depuis 14 mois ; pendant presque un an il n’a jamais vu un juge ; on n’a pas l’impression du tout qu’une enquête se poursuivait et ça continue aujourd’hui », a déclaré James Foley.

Neptune a comparu le 25 mai au cabinet d’instruction de St Marc (Nord) pour répondre aux interrogations de la juge Cluny Pierre Jules. L’audition avait duré environ 4 heures. Un mois plus tôt, le 22 avril, Neptune été conduit à St Marc, mais n’a pas été entendu par la juge.

Foley a admis qu’un crime a été perpétré à St Marc en février 2004, peu avant la chute de l’ancien président Jean Bertrand Aristide, que Neptune s’était rendu sur les lieux quelques temps avant la perpétration du crime. Mais, selon l’ambassadeur américain, personne n’a montré « la moindre indice » de l’implication de l’ancien premier ministre ce crime.

Foley a mis en exergue le rôle que l’ancien premier ministre lavalas a joué dans le cadre de la transition, suite à la chute d’Aristide en février 2004. « Il avait choisi de remplir son devoir patriotique de rester en place et d’assurer une bonne transition constitutionnelle », a estimé l’ambassadeur américain.

Depuis quelques jours, de sérieuses inquiétudes planent au niveau des secteurs de droits humains qui soupçonnent le gouvernement et la communauté internationale d’exercer des pressions en vue de la libération de Neptune. Le 9 aout, le chef civil de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation d’Haiti (MINUSTAH) Juan Gabriel Valdès avait déclaré qu’« il n’y a aucune raison valable » pour garder en prison Yvon Neptune aussi longtemps. Pour sa part, le ministre de la justice Henry Dorléans avait affirmé que « quand on n’est pas en mesure de juger une personne pendant des mois et des mois, il faut la relâcher ».

D’autre part, concernant la situation de violence en Haiti, Foley a fait savoir que les partisans armés de l’ancien régime, qui luttent en faveur du retour physique de l’ancien président Jean Bertrand Aristide, se lancent dans une entreprise sans avenir. « Ils doivent prendre conscience qu’ils sont seuls et la communauté internationale dans son ensemble ne va pas tolérer une telle démarche », a dit l’ambassadeur américain. « Aristide est lié à divers actes de violence dans le pays, et la communauté internationale connait bien l’héritage de la violence qu’il a laissé », a ajouté Foley.

Par ailleurs, a propos du départ de l’ancien président le 29 février 2004, James Foley a tenu à préciser que « Aristide n’a pas été kidnappé, il m’a appelé personnellement pour lui venir en aide ». Il a martelé qu’en février 2004, tout comme lors du coup d’état militaire de 1991, les Etats-Unis avaient « sauvé la vie » d’Aristide, qui a été ramené en Haiti par 20000 militaires américains en 1994. [fl gp apr 12/08/2005 17:00]