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Haïti-Crise : Installation du premier ministre Garry Conille et de son cabinet ministériel

P-au-P, 12 juin 2024 [AlterPresse]--- Le Conseil présidentiel de transition (Cpt) a procédé, ce mercredi 12 juin 2024, à l’installation du nouveau premier ministre Garry Conille ainsi que des 14 ministres de son gouvernement, a observé l’agence en ligne AlterPresse.

La cérémonie d’installation s’est déroulée à la Villa d’Accueil (siège de l’administration politique), en présence des membres du Cpt, du premier ministre sortant, Michel Patrick Boivert, d’autorités judiciaires, des responsables des hauts commandements de la Police nationale d’Haïti (Pnh) et des Forces armées d’Haïti (Fad’h), de protagonistes politiques, de représentantes et représentants de la société civile et des membres du corps diplomatique accrédités en Haïti.

Une mission délicate et historique à accomplir par les autorités de la transition

La mission de ce gouvernement de transition, installé conformément à l’accord du 3 avril 2024, consiste à travailler conjointement avec le Conseil présidentiel, en vue de juguler pleinement la crise multidimensionnelle, c’est-à-dire la crise politique, sécuritaire, humanitaire, qui s’est aggravée depuis l’assassinat du président de la république le 7 juillet 2021 », déclare le coordonnateur des actions du Cpt, Edgard Leblanc Fils, dans un discours de circonstance.

« Le Cpt et le gouvernement ont une mission délicate et historique à accomplir. Nous devons réussir pour faire renaitre l’espoir en l’avenir du pays. Nous devons nous mettre à la hauteur de cette difficile tâche, pour combler les attentes d’une population qui a tant souffert dans sa chair, ses biens, son esprit et sa dignité ».

Il revient à son gouvernement de transition de rétablir la sécurité, relancer les activités économiques et sociales de ce pays, ravagé par les violences des gangs armé, rappelle le Cpt au premier ministre.

Il faut aussi « réveiller les consciences et mobiliser toutes les énergies, afin d’ouvrir la voie à l’organisation d’élections libres, démocratiques, crédibles, transparentes, dont les résultats seront acceptés par toutes et tous ».



Edgard Leblanc Fils a insisté sur la réforme et le renforcement des forces nationales de sécurité, la préparation de la Conférence nationale, le renforcement des institutions étatiques de lutte contre la corruption et l’impunité.

La feuille de route de la transition, prévue dans l’article 45 de l’ « accord du 3 avril 2024 pour une transition pacifique et ordonnée », est appelée à guider les actions du gouvernement pendant la période de la transition, souligne le Cpt..

La réforme et le renforcement des institutions nationales de sécurité sont indispensables à la survie de la nation haïtienne.

« Il vous faudra définir une stratégie de sécurité nationale, qui passera par les objectifs à atteindre, les moyens à mettre en œuvre et les ressources à mobiliser par l’État pour assurer la sécurité du territoire, protéger la population haïtienne et ses intérêts vitaux ».

Les engagements de Garry Conille

« Haïti est confrontée à des défis majeurs. Les violences et l’insécurité paralysent notre quotidien. Les crises humanitaires exacerbent les souffrances de nos compatriotes les plus vulnérables. Et l’instabilité politique sape les fondations mêmes de notre société », décrit le chef du nouveau gouvernement de transition, dans des propos de circonstance.

Il appelle toutes et toutes à faire preuve de courage et de détermination, pour surmonter ces réalités douloureuses.

« Ensemble, nous pouvons transformer ces défis en opportunités, pour rebâtir notre pays sur des bases plus solides et plus justes », reste convaincu Garry Conille.

« Mon gouvernement travaillera, sans relâche, pour améliorer les conditions de vie de chaque Haïtienne et de chaque haïtien, pour bâtir un avenir plus sûr et plus prospère pour rétablir la dignité de notre peuple ».



Le premier ministre demande à ses ministres de participer vaillamment à un effort commun, pour promouvoir et alimenter une culture du changement dans les sphères d’activité relevant de leurs compétences respectives.

Un contrat collectif a été signé avec le peuple haïtien par l’entremise du Cpt pour matérialiser l’accord du 3 avril 2024, qui prévoit un ensemble de grands chantiers, comme la sécurité publique et nationale, le redressement économique, la réhabilitation des infrastructures, la sécurité alimentaire et sanitaire, la conférence nationale et la question constitutionnelle, l’état de droit et la justice, ainsi que les élections pour le renouvellement du personnel politique, signale Conille.

« Ce paradigme du changement », qui « irrigue à toutes les altères de l’action gouvernementale, inspirera et illustrera notre posture et tous les actes que nous serons appelés à poser à la tête du gouvernement ».

Conille estime crucial que « nos policiers et nos soldats soient bien préparés pour faire face aux défis sécuritaires actuels », promettant de veiller à ce qu’ils disposent d’outils nécessaires pour accomplir leur mission avec efficacité et professionnalisme.

Comme demandé par Garry Conille, une minute de silence a été observée en l’honneur des trois policiers nationaux de l’Unité temporaire antigangs (Utag), Emelin Fermetus, Peterson Clovis et Wilkens Jean Junior Piton, lâchement assassinés, le dimanche 9 juin 2024, par la coalition des gangs armés, dénommée Viv ansanm,, et de toutes les victimes de la terreur et d’autres violences des gangs armés .

L’arrêté du Cpt, nommant les 14 membres du cabinet ministériel de Garry Conille, a été publié officiellement le mardi 11 juin 2024, dans le journal officiel de la république « Le Moniteur »

En charge jusqu’au 7 février 2026, date de la passation de pouvoir aux élu-e-s des scrutins de 2025, le gouvernement de transition comprend 14 ministres, dont 4 femmes, pour 18 ministères.

Relever Haïti d’un desastre criminel

Le dossier de loin le plus épineux sur lequel doit se pencher le nouveau gouvernement de transition est celui de la sécurité. Rien n’a significativement changé, depuis le début, en février dernier, de l’offensive implacable des gangs coalisés sur la capitale.

Les quartiers contrôlés par les gangs demeurent déserts et les derniers habitants contraints de vivre dans ces zones sont soumis à des menaces et un harcèlement constants, rapportent des riverains.

Des personnes continuent d’être tuées, des femmes violées, des maisons vandalisées, des déplacements attentivement surveillés dans des quartiers ou des zones périphériques de Carrefour, Plaine du Cul-de-Sac, Croix-des-Bouquets, Tabarre, Pernier, Gros-Jean, etc.

Même situation dans plusieurs quartiers du centre-ville ou des zones avoisinantes : bas de Delmas, Solino, Bel-Air, Carrefour-Feuilles et beaucoup d’autres secteurs.

Le récent assassinat des trois policiers porte à 21 le nombre d’agents tués par des bandits armés depuis le début de l’année 2024.

Ce sont maintenant 578,000 personnes qui sont obligées de se déplacer à travers le pays, en raison de l’escalade de violence des gangs, selon l’Organisation internationale pour les migrations (Oim). Jusqu’à mars, ce chiffre était évalué à seulement 362,000.

Un afflux de personnes déplacées de la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince, vers le grand Sud d’Haïti a été observé.

Alors que le pourcentage de déplacées dans la zone métropolitaine est de 15%, celui des personnes qui se dirigent vers les départements au sud du pays est estimé à 130%.

Une reprise est constatée à l’aéroport international de Port-au-Prince, ce qui devrait apporter un peu d’air à l’économie. Mais tous les axes reliant Port-au-Prince aux départements régionaux sont contrôlés par les gangs, qui multiplient des postes de péages.

Cette situation a un effet désastreux sur la production agricole, qui pourrit dans les régions où les prix chutent, alors que les produits ne sont pas disponibles à la capitale où leurs prix grimpent.

Tant du point de vue de la sécurité que de l’économie ou de l’humanitaire, les problèmes ne font que s’accumuler, alors que la population se débat seule avec ses problèmes. [emb rc gp apr 12/06/2024 14:35]


Le Collectif 30 janvier, partie prenante dans la mise en place du Conseil présidentiel de transition, a renoncé à entrer dans le gouvernement. Clarens Renois, coordonnateur du parti Unir, membre de ce regroupement, a apporté des explications à AlterRadio 106.1 FM et en ligne.