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Histoire : Une vingtaine d’Ongs exigent de la France le remboursement des milliards versés par Haïti pour son indépendance

P-au-P, 23 avril 2024 [AlterPresse] --- Une coalition d’environ une vingtaine d’Organisations non gouvernementales (Ong) demandent à la France de rembourser les milliards de dollars, versés par Haïti pour son indépendance, acquise le 1er janvier 1804 contre les colons français, dans un nouvel appel exprimé lors du forum permanent de l’Organisation des Nations unies (Onu) pour les personnes d’ascendance africaine (Pfpad), déroulé du mardi 16 au vendredi 19 avril 2024 à Genève (Suisse), rapporte le site du journal français « Libération », consulté par l’agence en ligne AlterPresse.

La France doit plus de 100 milliards de dollars (Ndlr : US $ 1.00 = + 140.00 gourdes ; 1 euro = 143.00 gourdes ; 1 dollar canadien = 97.00 gourdes ; 1 peso dominicain = 2.40 gourdes aujourd’hui) à l’île des Caraïbes, qui a consenti à payer des réparations après son indépendance en 1804, selon ces organisations citées par « Libération ».

Cette coalition d’Ongs cherche à mettre en place une nouvelle commission indépendante, pour superviser la restitution de la dette, qu’elles qualifient de rançon, relate le journal français.

« Je me joins à vos demandes d’action immédiate », a déclaré, le vendredi 19 avril 2024, l’Autrichien Volker Turk, haut commissaire des Nations unies aux droits humains, dans un discours prononcé lors de la clôture du Pfpad, qui s’est déroulé du mardi 16 au vendredi 19 avril 2024.

Le Haut commissariat des Nations unies aux droits humains appelle les gouvernements à « faire preuve d’un véritable leadership, en s’engageant sincèrement à passer rapidement de la parole aux actes, afin de réparer les torts du passé ».

« En matière de réparations, nous devons enfin entrer dans une nouvelle ère », affirme Volker Turk, qui soutient le Forum d’avril 2024 à Genève.

« Il est temps que la France reconnaisse cela et que nous avancions », a déclaré à l’agence Reuters, l’Haïtienne Monique Clesca, une militante de la société civile haïtienne, qui coordonne les efforts dans le sens de la restitution des fonds extorqués par la France à la nouvelle nation indépendante d’Haïti.

Le ministère français des affaires étrangères n’a pas réagi, pour le moment.

Dans une tribune publiée, en 2010, dans « Libération », le groupe de soutien au Comité pour le remboursement immédiat des milliards envolés d’Haïti demandait à Nicolas Sarkozy, de rendre à Haïti « son argent extorqué », rappelle « Libération ».

« Considérant les besoins financiers criants de ce pays, dévasté par le terrible séisme du 12 janvier [2010], nous vous pressons donc, monsieur le Président, de restituer à Haïti, la première république noire de l’histoire, la dette historique de son indépendance », écrivaient les signataires.

« Même si je n’ai pas commencé mon mandat au moment de Charles X, j’en suis quand même responsable au nom de la France », avait déclaré Sarkozy, évoquant, quelques mois plus tôt, une présence française sur l’île, qui « n’a pas laissé que de bons souvenirs ».

En 2015, François Hollande avait, lui, parlé d’une « dette morale » envers Haïti.

Controverses autour du montant de la dette française à Haïti

Il existe des controverses au sujet du montant exact de la dette. Le montant payé à la France est aujourd’hui contesté par les historiens.

Le New York Times avait estimé la dette envers Haïti à 21 milliards de dollars, alors que les partisans du remboursement de cette dette affirment que le montant est bien plus élevé.

« C’est 21 milliards de dollars, plus 200 ans d’intérêts, dont la France a bénéficié. Donc, nous parlons plutôt de 150 milliards, 200 milliards ou plus », a insisté la Docteure en anthropologue, la professeure Jemima Pierre (Professor of Global race in the Institute of race, gender, sexuality and social justice / Grsj at the University of British Columbia).

Haiti est devenue la première république noire de l’histoire à obtenir son indépendance, le 1er janvier 1804, après une révolte des esclaves, qui ont battu l’armée de Napoléon Bonaparte, la plus puissante au début du XIXe siècle.

De sévères réparations lui ont été imposées par la France, qui a allégué la perte de ses revenus.

Dans une ordonnance en date du 17 avril 1825, Charles X, fraîchement installé sur le trône, déclara « concéder » au jeune État son indépendance contre une indemnité de 150 millions de francs-or, pour dédommager les anciens colons et l’assurance d’échanges commerciaux privilégiés en faveur de la France.

Cette dette ne fut totalement remboursée qu’en 1947. [emb rc apr 23/04/2024 12:00]