P-au-P., 28 nov. 02 [AlterPresse] --- Le premier mort et les premiers blessés au sein de la police ont été enregistrés ce 28 novembre en Haïti, où la situation ne semble pas près de se calmer, après plus de 2 semaines d’agitation politique à dominante anti-gouvernementale. Depuis le début de ces troubles également, pour la première fois le Président Jean-Bertrand Aristide a rompu le silence en déclarant qu’il n’avait pas l’intention de démissionner.
Un militant du parti Fami Lavalas au pouvoir, le juge de paix de Belladeres (Centre), Christophe Losama, a été tué par balles puis brûlé, lors d’affrontements entre manifestants anti-lavalas et partisans du régime à Lascahobas, proche de Belladères. "Les deux camps étaient armés et la police était impuissante", ont indiqué des correspondants locaux.
Selon la première version des faits, le juge de paix était à la tête d’un groupe de partisans du régime qui voulaient disperser la manifestation. A Lascahobas, l’ancien Sénateur contesté lavalas, Dera Dieuseul Simon, a plutôt jeté la responsabilité de l’acte sur la coalition d’opposition, Convergence Démocratique.
Des tirs nourris étaient entendus dans toute la ville et un vent de panique a soufflé parmi la population. Lascahobas était complètement paralysé, ont rapporté des correspondants.
Aux Gonaïves (Artibonite), "l’armée cannibale", du fugitif Amiot Métayer, s’est encore illustrée ce 28 novembre en dispersant violemment une manifestation anti-lavalas, conduite par des secteurs réunis sous le label Union Citoyenne. Cette marche a été
renforcée par la présence d’un groupe de personnes avec à leur tête un autre évadé de prison, le nommé Jean Pierre.
La manifestation avait démarré sans incident. Elle allait dégénérer quand des
membres de "l’armée cannibale" sont intervenus, faisant usage d’arme blanche, de bâton et de fouet pour évacuer la foule. On a dénombré plusieurs blessés.
Dans d’autres circonstances, deux policiers du Corps d’Intervention et de Maintien d’Ordre (CIMO) ont été blessés par balles, dont l’un à la tête. Le porte-parole de la police, Jean Dady Siméon, a fait savoir à la presse que les deux policiers ont été agressés par des hommes armés. Il a déclaré ne pas être en mesure de préciser à quel camp appartenaient les agresseurs.
"La police est censée perdre le contrôle de la ville", a témoigné un confrère revenant des Gonaives. Des responsables locaux de la police ont indiqué que les activités des policiers se limitaient au périmètre des Commissariats, selon ce qu’a confié le journaliste. Les autorités policières paraissent déboussolées, a-t-il ajouté.
L’autre point du pays qui a été agitée ce 28 novembre, est Jacmel (Sud-Est), ville réputée calme. Plusieurs milliers d’élèves ont marché pour réclamer le retrait d’une mesure gouvernementale de révocation de trois enseignants en raison, selon les manifestants, de la participation de ces derniers à un récent rassemblement anti-gouvernemental. Les lycéens et collégiens qui demandaient également la démission du Président Aristide ont pu manifester dans le calme et encadrés par la police.
Par contre, aux Cayes (Sud), de nombreux partisans du pouvoir sont descendus dans les rues ce 28 novembre afin de réclamer que Aristide termine son mandat, qui prend fin en 2006, selon ce qu’ont rapporté des correspondants de presse. La manifestation, qui s’est déroulée dans une ambiance de carnaval, a bénéficié de la participation des élus lavalas au niveau du département.
Le Président Aristide, qui a rompu le silence qu’il observait depuis le début des troubles, a fait part de sa volonté de poursuivre son mandat, déclarant qu’il n’y a pas de place pour les "coups d’Etat". Aristide a fait ces déclarations lors d’une rencontre avec la presse au palais national, où il était accompagné de sa femme, Mildred Trouillot, et des membres du gouvernement.
Aristide a condamné les violences qui secouent le pays et inviter les politiciens à se ressaisir et à prendre par au processus qui doit conduire à des élections en législatives et municipales en 2003. Aristide n’a cependant pas voulu faire des commentaires sur le dossier du fugitif Amiot Metayer, dont l’arrestation est réclamée par le secteur privé haïtien, les Etats-Unis et l’Organisation des Etats Américains (OEA). [vs/gp apr 28/11/02 21:59]