P-au-P., 13 mars 2024 [AlterPresse] --- Le parti politique Grand rassemblement pour l’évolution d’Haïti (Greh) demande de prendre en compte la problématique de la violence armée dans toute perspective de solution à la crise qui secoue Haïti, en proie à une escalade d’attaques de gangs sur la capitale depuis le jeudi 29 février 2024.
Dans la mise en place du prochain pouvoir, cette question doit être à l’ordre du jour des discussions, souligne le président du parti politique Greh, l’ancien colonel Himmler Rébu, dans une interview spéciale diffusée sur AlterRadio 106.1 F.m. et diverses autres plateformes Internet, et suivie par l’agence en ligne AlterPresse.
« Je ne dis pas que les gangs doivent être représentés dans le prochain gouvernement. Mais, il faut qu’il y ait un espace où cette problématique puisse être posée », précise Rébu, également ancien secrétaire d’Etat à la sécurité publique et ex ministre de la jeunesse et des sports.
Quelqu’un qui veut gouverner doit non seulement aborder la question des victimes des gangs armés, mais encore chercher à connaitre les réseaux, qui alimentent les bandits en armes et munitions, et les financent, suggère Rébu.
Il revient à l’État en Haïti d’être à l’écoute des victimes des gangs armés, afin de trouver des solutions à leurs problèmes, avance le parti politique Greh, conseillant de ne pas aborder la problématique des gangs armés avec légèreté.
L’ancien titulaire (24 mars 1999 - 2 mars 2001) du Ministère de la justice et de la sécurité publique (Mjsp), Me. Camille Leblanc, préconise de désarmer les gangs armés, qui sèment la terreur en Haïti, et de les juger pour leurs actes., dans une interview spéciale sur AlterPresse et AlterRadio
Les chefs de gangs armés, qui ont des dossiers lourds, peuvent se rendre volontairement à l’État, qui les désarmera, pour qu’ils soient jugés, souhaite Me. Camille Leblanc.
Il suggère aussi d’identifier les moyens de désarmer les milliers de jeunes, qui font partie de ces gangs armés, et de les intégrer dans des processus de formation.
La question des gangs armés, qui ont empêché le premier ministre de facto, Ariel Henry, de retourner en Haïti, est au centre des débats, ces derniers jours.
Ayant été bloqué à Porto Rico depuis le mardi 5 mars 2024, le premier ministre de facto, Ariel Henry, l’air affaissé, a finalement démissionné dans une vidéo pré-enregistrée, qui a été diffusée dans la soirée du lundi 11 mars 2024.
Après cette démonstration de force des gangs armés, l’ancien officier de police Guy Philippe, qui déclare prôner une « révolution » dite « pacifique », a avancé qu’il serait prêt à implémenter un programme d’amnistie pour les chefs de gangs en Haïti, une fois élu président, dans une interview donnée à l’agence Reuters.
C’est le jeudi 30 novembre 2023 que l’ancien officier de police, Guy Philippe, 55 ans (né le 29 février 1968), a ete déporté vers Haïti, à bord d’un vol avec plus d’une douzaine d’autres personnes. Il a purgé une peine d’emprisonnement de 6 ans, aux États-Unis d’Amérique, pour blanchiment d’argent lié au trafic illicite de drogue, après son arrestation à Pétionville le jeudi 5 janvier 2017.
Pour sa part, le juriste Jacques Letang, président de la Fédération des barreaux d’Haïti, prône l’approche de la « justice transitionnelle » suite au traumatisme causé par la violence armée qui a fait des milliers de morts et blessés en Haïti durant les dernières années.
Selon l’Onu, la justice transitionnelle est « l’éventail complet des divers processus et mécanismes mis en œuvre par une société pour tenter de faire face à des exactions massives commises dans le passé, en vue d’établir les responsabilités, de rendre la justice et de permettre la réconciliation ».
Aborder les problèmes existentiels
Il faut aborder les problèmes existentiels, connaître leur nature, leur profondeur et leur origine avant de prétendre prendre le pouvoir, considère le parti politique Greh.
« Connaître, au départ, les ingrédients de la réalité que nous vivons pour stopper le désordre généralisé, recadrer chaque personne et trouver des solutions pour les personnes victimes ».
Le parti politique Greh demande de tenir compte de l’existence des agresseurs armés et de chercher à connaitre leur méthodologie pour les neutraliser.
Il déconseille de mettre un pouvoir en place, dont le premier projet consiste à faire la guerre.
Tout en déplorant une absence de stratégie pour arriver à juguler le problème des gangs armés, il appelle à empêcher que celles et ceux qui détiennent les armes fassent du mal à la population haïtienne.
« C’est toute une stratégie à mettre en place. Elle n’est pas obligée d’être guerrière », dit-il.
Le parti politique Greh se dit très pessimiste par rapport à un éventuel succès de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (Mmas) en Haïti, dont le déploiement, qui tarde encore, a été autorisé le lundi 2 octobre 2023 par le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (Onu).
Une force de police n’est pas capable d’affronter des hommes avec des armes de guerre, capables d’assiéger une ville, ayant la technique et la tactique de l’étranglement, avertit-il.
Concernant l’envoi de policiers kényans et de militaires béninois dans le pays, le parti politique Greh rappelle combien l’armée ne fonctionne pas en symbiose avec la police, car elle ne prend pas des ordres de la police.
« L’armée et la police n’ont pas le même mode opératoire, ni la même philosophie, la même doctrine », précise-t-il.
Le gouvernement du Kenya a décidé de suspendre l’envoi prévu de policiers kenyans en Haïti, dans le cadre d’une Mission multinationale d’appui à la sécurité (Mmas) en Haïti, selon un haut responsable du Ministère kényan des affaires étrangères, cité par la presse internationale consultée AlterPresse.
Korir Sing’oei, secrétaire général du Ministère kényan des affaires étrangères, évoque un changement radical, à la suite de l’effondrement complet de l’ordre public et de la démission du premier ministre de facto Ariel Henry. [mff emb rc apr 13/03/2024 11:55]