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Crise : Désarmer les gangs en Haïti et les juger, préconise Me. Camille Leblanc

P-au-P., 12 mars 2024 [AlterPresse] --- L’ancien titulaire (24 mars 1999 - 2 mars 2001) du Ministère de la justice et de la sécurité publique (Mjsp), Me. Camille Leblanc, appelle à désarmer les gangs armés, qui sèment la terreur en Haïti, et à les juger pour leurs actes.

Les chefs de gangs armés, qui ont des dossiers lourds, peuvent se rendre volontairement à l’État, qui les désarmera, pour qu’ils soient jugés, souhaite Me. Camille Leblanc, dans une interview spéciale diffusée sur AlterRadio 106.1 F.m. et diverses autres plateformes Internet, et suivie par l’agence en ligne AlterPresse.

Tout en encourageant les chefs de gangs à se présenter devant la justice pour répondre de leurs actes, il suggère aussi d’identifier les moyens de désarmer les milliers de jeunes, qui font partie de ces gangs, et de les intégrer dans des processus de formation.

Toutefois, « il n’est pas question d’intégrer les gangs dans les gouvernements. Les gangs ne peuvent pas faire partie d’une solution à la crise », avertit Leblanc, qui intervenait sur la problématique des gangs armés dans le pays.

« Si on n’arrive pas à montrer combien quelqu’un a participé dans des actes d’assassinats, des crimes et viols, il faut l’intégrer dans le dialogue politique », nuance-t-il, notant combien l’intransigeance de la communauté internationale a conduit Haïti à cette situation délétère.

L’aggravation, depuis le jeudi 29 février 2024, de la situation sécuritaire à Port-au-Prince place les gangs armés au cœur des préoccupations actuelles.

L’escalade de violences, provoquées depuis le jeudi 29 février 2024 dans la capitale, Port-au-Prince, par les gangs armés, a empêché le premier ministre de facto, Ariel Henry, de retourner en Haïti.

Après cette démonstration de force des gangs armés, qui ont contraint Ariel Henry à rester à l’étranger, l’ancien officier de police Guy Philippe, qui déclare prôner une « révolution » dite « pacifique », a avancé qu’il serait prêt à implémenter un programme d’amnistie pour les chefs de gangs en Haïti, une fois élu président, dans une interview avec le journal Reuters.

Ayant été bloqué à Porto Rico depuis le mardi 5 mars 2024, le premier ministre de facto, l’air affaissé, a finalement démissionné, dans une adresse à la nation, qui a été diffusée dans la soirée du lundi 11 mars 2024.

L’annonce de sa démission a été aussi faite à Kingston, Jamaïque, par Mohamed Irfaan Ali, président de Guyana et de la Communauté des Caraïbes (Caricom).

Les groupes armés ont détruit les institutions de l’État. Certains d’entre eux ont commis des actes extrêmement graves, comme les viols, les kidnappings, dénonce Camille Leblanc.

Il faut mettre un terme aux réseaux, qui blanchissent l’argent pour les gangs et les alimentent en armes et munitions, exige-t-il.

Il estime important de régler le problème des gangs armés, qui sèment la terreur en Haïti, tout en appelant à la création d’une structure pour réfléchir, proposer et traiter cette question.

Réagissant sur le couvre-feu, décrété le dimanche 3 mars 2024 par le gouvernement de facto pour faire face aux violences des gangs armés à Port-au-Prince, l’ancien ministre de la justice affirme qu’il fallait un travail de réponse sécuritaire, avant de déclarer un état urgence pour le département de l’Ouest.

Le gouvernement de facto devrait convoquer un Conseil supérieur de la police nationale (Cspn), élargi au haut-commandement des Forces armées d’Haïti, pour poser le problème de la sécurité et envisager les réponses sécuritaires, conseille-t-il.

Pour résoudre la situation actuelle, il faut le rétablissement de l’ordre public, insiste-t-il.

État d’urgence et interdiction de toutes manifestations sur la voie publique

Dans le cadre de l’état d’urgence, décrété jusqu’au 3 avril 2024 sur le département de l’Ouest, qui comprend la capitale, Port-au-Prince, les autorités de facto ont encore reconduit un couvre-feu, du 11 au 14 mars 2024, de 7:00 du soir (23:00 gmt) à 5:00 du matin (9:00 gmt).

« A l’occasion de la période de l’État d’urgence, toutes manifestations sur la voie publique sont interdites, de jour comme de nuit, dans le département de l’Ouest », a rappelé, dans un communiqué daté du lundi 11 mars 2024, le titulaire de facto du Ministère de l’économie et des finances (Mef), Michel Patrick Boisvert, qui assure l’intérim en l’absence d’Ariel Henry.

« En conséquence, les forces de l’ordre ont reçu l’ordre d’user de tous les moyens légaux à disposition, en vue de faire respecter le couvre-feu et d’appréhender tous les contrevenants », lit-on dans le communiqué.

Rétablir l’autorité de l’État

L’ancien titulaire du Ministère de la justice et de la sécurité publique (Mjsp), Me Camille Leblanc, recommande de créer un conseil, qui aura comme tâche de mettre en place un gouvernement pour rétablir l’autorité de l’État et l’ordre public.

Ce conseil devrait être composé de cinq membres, avec des personnes ayant la capacité d’apporter des solutions, propose-t-il, tout en se prononçant en faveur d’une commission de dialogue continue de pacification et d’apaisement.

Suite à la proposition des secteurs haïtiens, un conseil présidentiel de transition de sept membres votants et deux observateurs, sera mis en place, a fait savoir, le président de la Communauté des Caraïbes (Caricom), lors de la conférence de presse de Kingston, le lundi 11 mars 2024.

Les membres votants seront issus des entités et secteurs suivants : Collectif 30 janvier 2023, Accord du 21 décembre 2022, Résistance Démocratique (Red)/Engagés pour le développement (Ede), Lavalas, Montana, Pitit Dessalines et secteur privé.

Les deux observateurs sans droit de vote viendront de la société civile et du secteur religieux.

Ce conseil, qui aura à nommer un nouveau premier ministre par intérim, ne devrait inclure ni des personnes inculpées, ni celles qui sont sous sanctions internationales, qui sont opposées à la résolution de l’Organisation des Nations unies (Onu) en faveur du déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (Mmas) en Haïti ou qui sont candidats aux prochaines élections.

7 propositions de sortie de crise ont été transmises à la Caricom, durant le week-end écoulé, par les secteurs politiques haïtiens. [mff emb rc apr 12/03/2024 12:10]