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Obligations morales et éthiques de la communauté internationale envers Haïti, exige l’ambassadeur d’Antigua-et-Barbuda Ronald Sanders

P-au-P., 28 février 2024 [AlterPresse] --- L’ambassadeur de l’archipel Antigua-et-Barbuda auprès des États-Unis et de l’Organisation des États américains (Oea), Ronald Sanders, demande à la France et aux États-Unis d’Amérique, qu’il tient pour responsables dans le malheur d’Haïti, d’être les premiers à réparer les torts causés depuis de longues années à la république caribéenne d’Haïti, dans un document publié sur l’agence de presse Caribbean News global et dont a pris connaissance l’agence en ligne AlterPresse.

« La France et les États-Unis ont une responsabilité particulière, car ils ont largement profité du pays et l’ont ensuite déstabilisé. Aucun des deux pays, quels que soient les problèmes de politique interne auxquels ils sont confrontés, ne peut être exonéré de sa responsabilité dans l’appauvrissement d’Haïti », analyse-t-il.

Ronald Sanders se réfère à la lourde dette, imposée au début du XiXe siècle par la France après la proclamation de l’Indépendance d’Haïti le 1er janvier 1804, et à l’ingérence financière et politique prolongée des États-Unis, qui ont laissé « de profondes cicatrices sur la capacité d’Haïti à s’autogouverner et à prospérer ».

La responsabilité première de l’aide à Haïti incombe à la France et aux États-Unis, soutient Ronald Sanders, qui les appelle à être à l’avant-garde des efforts visant à rétablir l’ordre et à reconstruire la nation haïtienne.

La France et les États-Unis devront contribuer « non seulement par la présence policière immédiate, mais également en investissant dans les infrastructures et les systèmes sociaux d’Haïti, en rectifiant les injustices historiques qui continuent d’entraver son progrès », insiste-t-il.

« Il est temps pour les nations, les plus impliquées dans son exploitation historique, de remplir leurs obligations morales et éthiques envers Haïti ».

Bien qu’il soit nécessaire d’intervenir en Haïti pour mettre fin à l’anarchie actuelle, le soutien à une telle intervention devrait venir d’une plus large représentation du peuple haïtien, recommande sanders.

Cet appui devrait également inclure un calendrier et un plan global, assorti de ressources, pour construire les infrastructures physiques, sociales, politiques et de gouvernance indispensable à Haïti à la fin de l’intervention, ajoute-t-il.

Très peu d’enthousiasme sur le dossier d’Haïti à la réunion du G-20

Ronald Sanders est revenu sur la réunion, ayant rassemblé à Rio de Janeiro (Brésil), le 21 février 2024, les ministres des affaires étrangères des pays les plus riches du monde (G-20).

Il a critiqué la mise à l’écart, dans l’ordre du jour principal, de la situation désastreuse d’Haïti, qui a trouvé un bref moment d’attention, en marge de la réunion des ministres des affaires étrangères du G20 à Rio de Janeiro.

Cette mise à l’écart est emblématique de la faible priorité, accordée à Haïti par ces puissances mondiales, examine-t-il.

Le 23 février 2024, les principaux pays du G20 n’ont pas montré de réponses enthousiastes à l’initiative du secrétaire d’État américain Antony Blinken de mettre Haïti à l’ordre du jour.

Blinken avait souligné les préoccupations américaines, concernant l’instabilité du pays et l’arrivée continue de réfugiés haïtiens sur les côtes américaines.

« Ce manque d’enthousiasme reflète la rivalité aiguë, avec les États-Unis, d’autres grands pays du G20, en particulier la Russie et la Chine, qui ont des intérêts divergents concernant Haïti », selon l’ambassadeur d’Antigua-et-Barbuda auprès des États-Unis et de l’Oea.

« Jusqu’à présent, les États-Unis n’ont pas réussi à obtenir des engagements de troupes, sauf du Kenya et de quelques pays de la Communauté des Caraïbes (Caricom) », fait-il savoir.

Ronald Sanders déplore l’absence, particulièrement notable, d’engagements de troupes de la part des pays européens, en particulier de la France, ancienne puissance impériale en Haïti et principale bénéficiaire de ses richesses produites par les esclaves.

Au lieu d’engager ses propres troupes, les États-Unis eux-mêmes se sont efforcés d’amener les pays d’Afrique et des Caraïbes à envoyer leur personnel militaire, souligne-t-il.

« Les réticences de l’administration Biden à envoyer des troupes en Haïti pourraient être influencées par la position de Donald Trump, le rival présidentiel de Biden, connu pour ses réticences à déployer des troupes américaines à l’étranger », explique-t-il.

L’ambassadeur d’Antigua-et-Barbuda évoque certains pays, qui « sont irrités que les États-Unis leur demandent de fournir des troupes qui seraient en danger en Haïti, tout en choisissant de garder leurs soldats chez eux ».

Il dénonce un racisme passif – un mépris pour Haïti - qui n’existerait probablement pas si sa population était blanche.

Il estime aussi que la Caricom n’a pas la capacité d’apporter de contribution militaire significative à une intervention en Haïti.

La Caricom a généralement accepté de soutenir une intervention humanitaire en Haïti et moins de cinq de ses 15 membres ont effectivement proposé des troupes, rappelle-t-il.

« La Caricom l’a fait, parce qu’Haïti est un État membre et, plus important encore, parce que les Haïtiennes et Haïtiens ont été la première nation à se soulever contre l’esclavage et à créer une nation noire indépendante en 1804 ».

L’urgence du déploiement de la Mmas en Haïti

Par ailleurs, l’ambassadrice américaine auprès des Nations-Unies, Linda Thomas-Greenfield, continue d’insister sur l’urgence du déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (Mmas) en Haïti.

Elle a fait cette déclaration, lors d’une rencontre avec le premier ministre de facto Ariel Henry, le dimanche 25 février 2024, en Guyana, en marge de la 46e réunion ordinaire de la Conférence des gouvernements de la Caricom.

Linda Thomas-Greenfield informe avoir discuté de la « nécessité urgente de favoriser une voie inclusive et crédible vers des élections libres et équitables », et un retour à l’ordre démocratique en Haïti.

L’ambassadrice américaine et Ariel Henry continuent d’appeler au déploiement d’une force multinationale, autorisée le lundi 2 octobre 2023 par l’Organisation des Nations unies (Onu) pour aider la Police nationale haïtienne à rétablir la paix et la sécurité et à atténuer la crise humanitaire en Haïti.

Thomas-Greenfield a réaffirmé le soutien indéfectible des États-Unis au peuple haïtien, notamment à travers la fourniture continue d’une aide humanitaire, de développement et de sécurité.

Linda Thomas-Greenfield a aussi appelé les partis d’opposition, qui exigent la démission du premier ministre de facto Ariel Henry, à s’asseoir ensemble et à discuter d’une solution politique.

Elle a réitéré, le lundi 26 février 2024, le soutien du gouvernement américain au rétablissement de la paix et du calme en Haïti.

Thomas-Greenfield a salué les informations, selon lesquelles le Bénin, un pays d’Afrique de l’Ouest, aurait proposé d’envoyer 2,000 soldats pour rejoindre le déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti.

Ce déploiement de la Mmas a été validé le 2 octobre 2023 par une résolution du Conseil de sécurité de l’Onu, autorisant une mission multinationale en Haïti sous le commandement d’un des pays membres de l’Onu (en l’occurrence le Kenya), suite à une demande, le vendredi 7 octobre 2022, du gouvernement de facto d’Ariel Henry.

Ariel henry exhorté à se retirer du pouvoir en Haïti

Le premier ministre de facto haïtien Ariel Henry doit plier bagages, en vue de faciliter une solution à la crise en Haïti.

C’est ce qu’a déclaré, le lundi 26 février 2024, le premier ministre d’Antigua et Barbuda, Gaston Browne, lors de sa participation à la 46e réunion ordinaire de la Conférence des gouvernements de la Caricom), à Georgetown (Guyana), a rapporté un article du journal Caribbean Times, consulté par AlterPresse.

Ariel Henry devrait permettre que les efforts se poursuivent sans entraves, pour trouver une solution aux problèmes socio-économiques et politiques en Haïti, encourage Browne.

« Sans vouloir manquer de respect, mon cher ami Henry fait partie du problème, et beaucoup en Haïti pensent que les interventions prévues par les groupes de parties prenantes visent à soutenir Henry », affirme Gaston Browne. [emb rc apr 28/02/2023 13:20]