P-au-P., 23 janv. 2024 [AlterPresse] --- Le sociologue Kepler Aurélien, professeur à l’Université d’État d’Haïti (Ueh), souligne l’urgence d’une reprise des luttes démocratiques en Haïti, à l’émission TiChèzBa, diffusée sur la station AlterRadio 106.1 F.m. et suivie par AlterPresse.
Pour lui, les luttes démocratiques (combats revendicatifs, pétitions, manifestations, participation électorale) ont été tout doucement mises en retrait, depuis 2018, à cause de la « criminalisation des espaces de combats politiques ».
Il en veut pour preuve les divers massacres qui ont été perpétrés depuis lors à travers le pays, notamment à Port-au-Prince, dont la tuerie à La Saline en novembre 2018, et ses environs.
Cette « neutralisation » permet à des forces politiques, qui n’ont pas de vision à long terme, d’avoir la voix au chapitre dans le paysage politique, regrette le professeur Aurélien.
Il prône une forme de « libération des luttes démocratiques », passant nécessairement par la « neutralisation des gangs armés » qui sèment le deuil sur le territoire d’Haïti. Ce qui, selon le chercheur, devrait être un objectif immédiat de toute résolution de la crise multidimensionnelle qui secoue le pays.
Kepler Arélien dénonce le laxisme du pouvoir de facto face aux manœuvres des gangs armees, tout en déplorant une neutralisation des luttes démocratiques.
Désespoir
« Le peuple se trouve dans une situation d’asphyxie, qui crée chez lui un grand désespoir. Cette situation le pousse à tout explorer , » explique le sociologue Aurélien, en ce qui concerne le support de citoyennes et de citoyens au mouvement de l’ancien officier de police Guy Philippe, malgré qu’il ait purgé une peine de six ans de prison aux États-Unis d’Amérique pour blanchiment d’argent lié au trafic illicite de drogue, après son arrestation à Pétionville, le jeudi 5 janvier 2017.
Ayant été déporté vers Haïti le 30 novembre 2023, avec plus d’une douzaine d’autres personnes, Guy Phillippe a appelé à la révolution lors d’une tournée à Ouanaminthe, dans le département du Nord-Est, le mardi 2 janvier 2024.
Ces dernières semaines, des agents de la Bsap ont ouvertement affiché leur support à l’ancien officier de police Guy Philippe.
« La population a emboîté le pas à ce mouvement, parce que son désespoir est tellement fort que la question de l’emprisonnement de l’ancien rebelle ne s’est pas posée comme une priorité », analyse le sociologue Kepler Aurélien.
Le plus important pour quelques-unes et quelques-uns, c’est de chercher comment sortir de la situation chaotique dans laquelle se trouve le pays, considère-t-il.
Toutefois, à côté de cela, il y a des mobilisations qui ressemblent à des démonstrations de force, qui ne sont pas nécessairement une forme d’adhésion au mouvement de Guy Philippe. Car, il y a celles et ceux qui cherchent à se divertir aussi », nuance le sociologue Kepler Aurélien. [mff emb rc apr 23/01/2024 10:00]