Nou p ap dòmi dénonce une mainmise complète de la communauté internationale, particulièrement des États-Unis d’Amérique
Par Marie Farah Fortuné
P-au-P., 27 déc. 2023 [AlterPresse] --- Les négociations en cours entre les protagonistes politiques, en vue d’une issue à la crise en Haïti, constituent « un marché de dupes », considère l’historien et éditeur au Canada, du Centre international de documentation et d’information haïtienne, caribéenne et afro-canadienne (Cidihca), Frantz Voltaire, lors d’une intervention à l’émission TiChèzBa, diffusée sur la station privée AlterRadio 106.1 f.m., suivie par l’agence en ligne AlterPresse.
Frantz Voltaire invite le mouvement Montana et les autres secteurs du pays à commencer par définir quel type de société, de politique et de développement ils veulent face à la crise la plus grave, à laquelle est confronté le pays depuis l’occupation américaine.
Au cours de l’année 2023, l’instabilité politique est plus que renforcée, « avec une instance politique qui ne gère rien et un gouvernement qui ne dirige rien », critique Frantz Voltaire, signalant une situation accélérée de crise.
Dans une récente note, les émissaires de la Communauté des Caraïbes (Caricom) expriment leur volonté « de retourner en Haïti, une fois que les parties prenantes auront réalisé des progrès significatifs dans leurs discussions informelles et auront clairement indiqué leur volonté d’entrer dans la dernière phase des négociations », à la suite de leur quatrième visite dans le pays, du mercredi 6 au jeudi 14 décembre 2023, pour discuter de leur projet-cadre de transition devant faciliter une issue à la crise.
Le projet de cadre de transition, proposé au cours du mois de novembre 2023 par la Caricom, suggère de mettre en place une structure gouvernementale de transition, pour mettre fin à l’impasse politique prolongée en Haïti.
La durée de la transition ne devrait pas dépasser 18 mois après la conclusion de l’accord.
Ce dispositif de gouvernance de transition devrait permettre, selon le Groupe des personnalités éminentes (Gpe) de la Communauté des Caraïbes (Caricom), de « faire face à la crise sécuritaire, d’ouvrir la voie à la sortie de l’impasse politique et de poursuivre un retour durable à la légitimité, la démocratie et la normalité, grâce à des élections libres, équitables et inclusives ».
Nou p ap dòmi dénonce une mainmise complète de la communauté internationale, particulièrement des États-Unis d’Amérique
Intervenant également à TiChèzBa, Vélina Charlier, membre du collectif citoyen Nou p ap dòmi dénote, pour sa part, un manque de confiance de la population dans les dirigeants politiques, qui s’est manifesté depuis sous l’administration de Jovenel Moïse jusqu’à aujourd’hui.
Elle dénonce une mainmise complète de la communauté internationale, particulièrement des États-Unis d’Amérique, avec un support inconditionnel au pouvoir en place.
Cette situation bloque l’avancement du processus de dialogue politique, analyse Vélina Charlier.
Elle relève une absence de confiance dans la classe politique très décriée et dans l’État, un élément qui serait à la base de l’échec de toutes tentatives pour parvenir à un accord.
« Pour qu’il y ait dialogue et accord entre les actrices et acteurs haïtiens, il faut qu’il y ait confiance. Or, aujourd’hui, la confiance de la population et de toutes celles et de tous ceux essayant d’apporter un changement est cassée ».
Mettre l’action publique en mouvement contre les personnes sanctionnées
Nou p ap dòmi exhorte à mettre l’action publique en mouvement contre les personnes sanctionnées par les États-Unis, le Canada et le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (Onu), entre autres, pour des activités criminelles, comme le blanchiment d’argent et la corruption.
De telles sanctions sont bonnes pour les pays qui les ont prises. Par conséquent, il faut mener des enquêtes en Haïti, et mettre l’action publique en mouvement, ajoute Nou p ap dòmi.
Au niveau des élites économiques et politiques, il faut sanctionner les donneurs d’ordre qui profitent de la situation mafieuse installée en Haïti, exige Nou p ap dòmi, soulignant combien sera inefficace et sans effet l’outil des sanctions s’il ne s’attaque pas à celles et ceux qui sont en cause.
« Ces sanctions semblent indiquer que les choses avancent. Mais, au fond, il n’y a ni volonté, ni intérêt majeur pour essayer de résoudre le problème », de l’avis de Frantz Voltaire du Cidihca.
De plus, les sanctions ne sont pas accompagnées de mesures qui expliquent la nature des opérations effectuées par les personnes sanctionnées, regrette-t-il.
En outre, souligne-t-il, le trafic d’armes et de munitions se poursuit principalement à travers Miami et la République dominicaine, alimentant de manière continue les gangs qui sèment la terreur. Alors que, selon lui, les États-Unis auraient les moyens de stopper le flux d’armes et de munitions vers Haïti.
Dans un communiqué en date du lundi 11 décembre 2023, le Département d’État étasunien annonce des sanctions contre l’ancien premier ministre (11 novembre 2009 – 18 octobre 2011) et ex-ministre de la planification et de la coopération externe (9 juin 2006 – 19 octobre 2011), Jean-Max Bellerive, ainsi que les anciens sénateurs Nènel Cassy et Hervé Fourcand, pour leur participation à des activités de corruption, qui ont porté atteinte à l’intégrité du gouvernement en Haïti.
Dans le cadre de ces sanctions, il a également désigné des membres de la famille immédiate de Jean-Max Bellerive, dont sa conjointe Myriam Estevez Bellerive et ses filles adultes, Diana Jennifer Bellerive et Jessica Bellerive.
Les sanctions visent également les membres de la famille immédiate de Nènel Cassy, dont son épouse Katherine Cassy Chéry et un enfant mineur.
Dans un précédent communiqué, l’Office de contrôle des avoirs étrangers (Ofac) du Département du trésor américain a annoncé avoir sanctionné les chefs de gangs Johnson André alias Izo 5 segonn du gang de Village de Dieu, Renel Destina alias Ti Lapli du gang Gran Ravin, Vitel’homme Innocent du gang Kraze Baryè et Wilson Joseph alias Lanmò san jou du gang 400 Mawozo pour graves violations de droits humains.
Ces quatre chefs de gangs sont accusés d’assassinats, enlèvements contre rançons, vols, viols, pillages et incendies de résidences, entre autres. [mff emb rc apr 27/12/2023 12:40]