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Crise : Le problème d’Haïti, plus politique que sécuritaire, dixit le professeur d’université Roromme Chantal

P-au-P., 20 nov. 2023 [AlterPresse] --- « Le problème d’Haïti est tout, sauf sécuritaire. C’est un problème (éminemment) politique ».

Ainsi, s’exprime le professeur de sciences politiques à l’école des hautes études publiques de l’Université de Moncton au Canada, Roromme Chantal, sur la crise en Haïti, dans une interview accordée à la plateforme AlterPresse/AlterRadio, le samedi 18 novembre 2023.

« Les vrais cerveaux de l’insécurité, du banditisme, de la corruption sont les élites du pays, qui sont de connivence avec la communauté internationale. Si nous voulons commencer par résoudre le problème du pays, il faut s’attaquer à la tête, au cerveau du problème », déclare-t-il.

Il cite, en exemples, les sanctions de la communauté internationale contre les politiciens dans le pays, en l’occurrence deux anciens présidents, Joseph Michel Martelly (14 mai 2011 - 7 février 2016), Jocelerme Privert (14 février 2016 - 7 février 2017), deux anciens premiers ministres Jean Henry Céant (17 septembre 2018 - 18 mars 2019), Laurent Salvador Lamothe (16 mai 2012 - 14 décembre 2014), plusieurs ministres et deux anciens présidents de l’assemblée nationale, Youri Latortue et Joseph Lambert, sanctionnés pour leur implication présumée dans des actes criminels, les trafics de drogue (pour certains), le banditisme et la corruption à grande échelle.

Pour l’universitaire, les chefs de gangs Vitelhomme Innocent, Jimmy Chérisier alias Barbecue et autres ne sont pas le problème principal.

Dans une annonce, le Département d’État américain a doublé une récompense, allant jusqu’à 2 millions de dollars (Ndlr : US $ 1.00 = 140.00 gourdes ; 1 euro = 145.00 gourdes ; 1 dollar canadien = 98.00 gourdes ; 1 peso dominicain = 2.40 gourdes aujourd’hui) pour toute information conduisant à l’arrestation et/ou à la condamnation du ressortissant haïtien Vitelhomme Innocent, qui a conspiré en vue de participer ou tenté de participer à la criminalité transnationale organisée.

Le Bureau fédéral d’investigation (Fbi) a informé avoir ajouté le nom du chef de gang Vitelhomme Innocent à la liste des dix fugitifs les plus recherchés par le Fbi.

« La solution ne viendra pas d’une force multinationale, d’une force dirigée par le Kenya qui a ses propres problèmes », estime, par ailleurs, Roromme Chantal.

Le parlement kenyan a approuvé, le jeudi 16 novembre 2023, le déploiement de 1,000 policiers kenyans en Haïti pour une mission de maintien de la paix, la Mission multinationale d’appui à la sécurité (Mmas) en Haïti, a indiqué le média kenyan « The Standard », dans un article.

Mais, le jeudi même jour, après le vote au parlement kenyan, la Cour suprême du Kenya a annoncé fixer au vendredi 26 janvier 2024 sa décision d’accepter ou de rejeter le déploiement de policiers kenyans dans le cadre de la Mmas en Haïti, a rapporté le média « The Star Kenya ».

Dans un premier temps, ce déploiement de la Mmas avait été validé, le lundi 2 octobre 2023, par une résolution du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (Onu), suite à une demande, le 7 octobre 2022, du gouvernement de facto d’Ariel Henry.

Pour résoudre la crise, Haïti a besoin, comme l’a suggéré le défunt sénateur Turneb Delpé (24 novembre 1951 - 27 mai 2017), d’un dialogue national au cours duquel tous les secteurs de la vie nationale décideront de l’avenir d’Haïti, recommande Roromme Chantal.

Le professeur d’université dit plaider pour un pacte de gouvernance, à travers une conférence nationale.

Des personnes,, connues de la société pour leur militantisme devraient former un comité de sages qui veillerait à mettre à l’écart les violateurs de ce pacte, souhaite-t-il.

« Il faut mettre des jalons, des modalités de vivre ensemble, lorsqu’on créera ces conditions. Alors là, on pourra réaliser des élections ».

Les démarches menant à cette alternative devraient être conduites par les Haïtiennes et Haïtiens. Car, souligne Roromme Chantal, la communauté internationale ne désire pas vraiment le changement en Haïti.

Toutefois, il dit espérer que la communauté internationale supportera la transition avec toutes celles et tous ceux, qui veulent vraiment un changement réel, et qui n’ont rien à voir avec les détournements de biens publics et les actes d’assassinats dans le pays.

Différentes organisations politiques et de la société civile continuent de plaider pour la mise en place d’un nouveau gouvernement de transition, sans la présence du premier ministre de facto Ariel Henry, alors que d’autres s’y opposent.

Jusqu’à présent, aucune entente n’a été trouvée à l’issue des négociations politiques entre les protagonistes haïtiens sous les auspices du Groupe des éminentes personnalités (Gep) de la Communauté des Caraïbes (Caricom), a fait savoir le parti politique Grand rassemblement pour l’évolution d’Haïti (Greh), dans une interview à la plateforme AlterPresse/AlterRadio.

Le Gep de la Caricom a séjourné de nouveau en Haïti, du mercredi 8 au mardi 14 novembre 2023, en vue d’un consensus politique qui permettrait de trouver une issue à la crise en Haïti. [mff emb rc apr 20/11/2023 12:25]

Photo : capture d’écran