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Haïti-RD : Beaucoup plus de vigilance sur les conditions déplorables de rapatriements des migrant-e-s haïtiens, exige le Garr

26,369 cas de rapatriements en septembre 2023, malgré la fermeture unilatérale des points frontaliers par la République Dominicaine, a dénombré la plateforme Garr

P-au-P., 12 oct. 2023 [AlterPresse] --- Le Groupe d’appui aux rapatriés et réfugiés (Garr) appelle les instances concernées à faire montre de beaucoup plus de vigilance sur les conditions déplorables, dans lesquelles les migrantes et migrants haïtiens sont rapatriés en République Dominicaine, dans un rapport publié pour le mois de septembre 2023 et transmis à l’agence en ligne AlterPresse.

Les mouvements de déportations se sont intensifiés à la frontière haïtiano-dominicaine, signale le Garr, rapportant combien plusieurs personnes rapatriées ont témoigné avoir été victimes de vols, de toutes sortes de privations lors de leur détention.

Une ressortissante haïtienne, Stephy Graph Cadichon, qui s’apprêtait à se rendre au Nicaragua, a été violée, le vendredi 22 septembre 2023, par un agent de l’immigration, en présence de son fils de 4 ans, dans l’enceinte de l’aéroport international Las Americas, à Santo Domingo.

Des agents de l’immigration auraient vainement essayé de lui soutirer 17,000 pesos (Ndlr : US $ 1.00 = + 140.00 gourdes ; 1 euro = 143.00 gourdes ; 1 dollar canadien = 100.00 gourdes ; 1 peso doinicain = 2.50 gourdes aujourd’hui)

« Les agents migratoires réalisent des descentes à des heures tardives, pillant des maisons et enlevant les residentes et résidents haïtiens qui y vivent ; femmes enceintes, personnes âgées et enfants n’en sont pas épargnés », lit-on dans le rapport de la plateforme Garr.

Même les migrant.e.s haïtien.ne.s en situation régulière sont déportés par les autorités dominicaines, en violation de leurs droits.

Le mardi 12 septembre 2023, un groupe d’experts de l’Organisation des Nations unies (Onu) a tiré la sonnette d’alarme sur les mauvais traitements infligés aux migrant.es haitien.ne.s en République Dominicaine.

Ils ont vivement dénoncé les persécutions et les abus exercés à l’endroit de ces migrantes et migrants, notamment contre les personnes âgées, les femmes enceintes et les mineurs.

26,369 cas de rapatriements de migrantes et migrants haïtiens, en septembre 2023

Le Groupe d’appui aux rapatriés et réfugiés a enregistré, pour le mois de septembre 2023, plus de 26,369 cas de rapatriements de migrantes et migrants haïtiens, aux différents points officiels et non officiels au niveau de la frontière haitiano-dominicaine, malgré la fermeture unilatérale, par la République Dominicaine, des points frontaliers depuis le vendredi 15 septembre 2023..

34,081 cas de retours spontanés ont été également dénombrés.

Le Garr a recensé 6,378 ressortissantes et ressortissants haïtiens refoulés, en Haïti, pendant le mois de septembre 2023.

Discours hostiles et représailles persistantes contre les migrantes et migrants haïtiens

La plateforme Garr dénonce une multiplication des « discours enflammés et hostiles » face à l’immigration haïtienne en République Dominicaine, dans le contexte actuel, provoquant ainsi une vague de persécutions et de maltraitances envers les migrantes et migrants haïtiens.

Depuis la fermeture totale de la frontière, par les autorités dominicaines, en réaction à la construction, par les Haïtiens, d’un canal à Ouanaminthe (Nord-Est), visant à capter l’eau de la rivière Massacre pour irriguer les plantations des communautés haïtiennes, plus de 60 mille migrantes et migrants haïtiens sont retournés dans leur pays pour échapper aux représailles des Dominicains, selon les chiffres avancés par le Corps spécialisé de sécurité frontalière terrestre (Cesfront).

La poursuite de la construction de ce canal a engendré la fermeture, depuis le vendredi 15 septembre 2023, de la frontière du côté dominicain, la suspension de livraison des visas dominicains aux Haïtien.ne.s, entres autres mesures prises par les autorités dominicaines.

Comme annoncé, la République Dominicaine a décidé de rouvrir partiellement, le mercredi 11 octobre 2023, ses frontières avec Haïti, à des fins commerciales, alors que, du côté haïtien, la frontière demeure encore fermée.

Dans un communiqué publié le 9 octobre 2023, le gouvernement de facto de la république d’Haïti a réclamé un partage équitable des ressources hydriques binationales, en vue d’un dénouement convenable de la crise liée à la construction d’un canal à Ouanaminthe (Nord-Est) sur la rivière Massacre.

Ce dénouement devrait permettre la normalisation des relations entre les deux pays et de revenir à la circulation des personnes et des biens des deux côtés de l’Ile, comme c’était le cas avant la fermeture unilatérale le 15 septembre 2023, par les autorités dominicaines, de toute la frontière (terrestre, maritime et aérienne) avec Haïti, considère le gouvernement de facto en Haïti.

Les Haïtiennes et Haïtiens ont le droit inaliénable d’utiliser de façon équitable les ressources hydriques binationales, réaffirme le gouvernement de facto, tout en indiquant continuer à prendre des dispositions appropriées dans l’intérêt des Haïtiennes et des Haïtiens.

La crise, liée à la construction d’un canal à Ouanaminthe, constitue un bon momentum pour rebattre toutes les cartes avec la République Dominicaine, comme sur les ressources partagées en eau et le commerce à sen unique, qui ne profite qu’à la République Dominicaine, estime le président de la Chambre de commerce, d’industrie et des professions du Nord-Est d’Haïti (Cci/Nord-Est), Albert Pierre-Paul Joseph, dans une interview accordée à la plateforme AlterPresse/AlterRadio.

La Cci/Nord-Est recommande d’entamer de sérieuses discussions avec la République Dominicaine sur les ressources partagées en eau, tout en appelant à un rééquilibrage du commerce avec l’État dominicain voisin.

Des mesures de protection exigées

Le groupe demande à l’État haïtien d’assumer ses responsabilités, en exigeant aux autorités de la République Dominicaine de revenir sur leur position concernant la construction du canal et d’assurer la sécurité des ressortissant.e.s haïtien.ne.s de l’autre côté de la frontière.

Elle déplore le fait qu’aucune mesure concrète n’a été prise, jusqu’à présent.

La plateforme Garr appelle les différentes structures de la société civile à se mobiliser massivement pour exercer une pression sur les gouvernements des deux côtés de la frontière. [emb rc apr 12/10/2023 12:15]