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Haïti : Plaidoyer pour un budget national intégré

P-au-P, 02 août 05 [AlterPresse] --- L’Initiative de la Société Civile (ISC) a organisé ce 2 août une rencontre avec les partis politiques, au cours de laquelle elle a appelé les autorités gouvernementales à élaborer un « budget national intégré » qui répond aux aspirations de la population.

Le Directeur exécutif de l’ISC, Rosny Desroches, qui dit n’être pas satisfait de l’exécution du « budget de fonctionnement » pour l’exercice 2004-2005, souhaite que les grandes lignes de la politique budgétaire soient exprimées dans le budget pour le prochain exercice considéré comme un budget-programme où chaque ministère fixe ses objectifs.

« Nous étions un peu déçus de ce que le budget 2004-2005 était un budget de fonctionnement. Ce n’était pas un budget où l’on retrouvait les divers investissements. Nous exigeons que le budget 2005-2006 soit véritablement un budget intégré. Nous espérons trouver beaucoup de satisfactions lors de la présentation du budget à la fin du mois de septembre », a-t-il indiqué.

Selon Desroches, le prochain budget aura 19 milliards de gourdes au chapitre du fonctionnement et 12 milliards de gourdes destinées aux investissement et programmes. Les grandes lignes de la politique budgétaire représentent des priorités intéressantes, telles la sécurité, les infrastructures, l’éducation de base, l’accès aux soins de santé, l’accès à l’eau potable, la production agricole et l’éducation de base, a-t-il poursuivi.

Le professeur Rosny Desroches croit qu’il revient à chaque citoyen de veiller à la gestion des fonds publics, à la bonne utilisation de sa taxe. « Nous sommes comme des actionnaires dans une grande entreprise qui s’appelle Haïti (...) Nous de la société civile et nous autres en tant que citoyens, nous voulons désormais suivre ce qui se passe avec l’argent des contribuables et ce qui est réalisé, a-t-il préconisé.

Le responsable de l’Initiative de la Société Civile s’est par ailleurs offusqué de l’utilisation des enfants par les gangs armés qui sèment la terreur dans le pays depuis le 30 septembre 2004.

« Des enfants qui méritent d’être scolarisés, sont dépositaires d’armes à feu de tout calibre. Si tous ces enfants avaient l’opportunité d’aller à l’école, aujourd’hui ils ne représenteraient pas un fouet pour la société haïtienne. L’éducation des enfants jusqu’à l’âge de douze ans devrait être la priorité de tous les gouvernements », a-t-il estimé arguant que cela contribuerait à une réduction de la violence, de la délinquance juvénile et du chômage.

L’éducatrice Nirva Jean Jacques a dit, quant à elle, constater que dans le budget annuel 2004-2005, seulement 3.037.746.000 de gourdes ont été alloués à l’éducation. Avec cette somme, les autorités ne peuvent arriver pas à « scolariser les 400.000 enfants haïtiens » qui ont soif du pain de l’instruction mais qui sont « laissés pour compte, condamnés à devenir les exclus du système ».

Selon Jean Jacques, le taux net de scolarisation des enfants de 6 à 11 ans en Haïti est estimé à 67%. L’éducatrice a demandé aux autorités compétentes de faire de l’éducation une de leurs plus grandes priorités en augmentant le taux de scolarisation d’au moins 20%.

S’appuyant sur des données chiffrées, l’Initiative de la Société Civile estime que l’un des grands problèmes dont souffre le pays, « c’est le manque flagrant de service à la population. Selon l’ISC, 50% de la population n’a pas accès à l’eau potable, 65% des enfants souffrent d’anémie, 35% des enfants d’âge scolaire ne sont pas scolarisés ».

Dans les sections communales, la situation est très grave. On retrouve un pourcentage très faible d’agents de la fonction publique. L’Initiative de la Société Civile dit souhaiter que le budget 2005-2006 ne soit pas une tabulation de chiffres mais qu’il y aura un « Exposé des Motifs » substantiel et éclairant.

L’homme d’affaires, Maurice Lafortune a, pour sa part, plaidé en faveur de l’harmonisation et de la réactualisation des lois de finances haïtiennes. L’ancien président de la Chambre de Commerce et d’Industrie d’Haïti (CCIH) a demandé au Ministre de l’Economie et des Finances d’« harmoniser les lois et les règlements » en vigueur. « Il faut l’avouer, nos lois sont très anciennes, elles ne sont pas adaptées. J’ai insisté beaucoup au Ministre de l’Economie et des Finances afin qu’on puisse arriver à cette actualisation », a-t-il précisé.

Lafortune a par ailleurs mis l’accent sur le fonctionnement de l’Office National d’Assurance Vieillesse (ONA) qui, selon lui, devrait être géré par trois secteurs à savoir l’Etat, les employeurs et les ouvriers.

« L’ONA n’appartient, non pas à l’Etat, mais aux travailleurs et aux employeurs. Nous avons demandé au Ministre de l’Economie et des Finances que l’ONA soit dirigé, non pas par l’Etat, mais par trois entités dont le Ministère des Affaires Sociales, les employeurs et aussi les employés. Avec cette instance tripartite, on va avoir de meilleurs résultats. Chacun va défendre ses intérêts », a-t-il soutenu.

L’initiative de la Société Civile est une des entités à la base de la fondation du Groupe des 184, qui a endossé d’importantes responsabilités dans les évènements politiques du début de l’année 2004, ayant conduit à la chute du régime lavalas de l’ancien président Jean Bertrand Aristide. [do apr 03/08/05 00:15]