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Haïti-Violences : Le Cardh déplore une dégradation continuelle des conditions de vie des personnes déplacées à Port-au-Prince

P-au-P., 26 sept. 2023 [AlterPresse] --- Le Centre d’analyse et de recherche en droits humains (Cardh) tire la sonnette d’alarme sur la dégradation des conditions de vie des personnes déplacées internes, environ un mois après l’exacerbation de la violence des gangs armés contre la population de Carrefour Feuilles (banlieue sud-est de la capitale, Port-au-Prince) et d’autres quartiers dans la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince, dans un rapport dont a pris connaissance l’agence en ligne AlterPresse.

Appelant à une prise en charge, dans la dignité humaine, des personnes déplacées, le Cardh signale une réduction systématique des interventions des actrices et acteurs humanitaires.

Il fait état de 35 mille personnes déplacées internes dans les 45 sites répertoriés, dont 38 à Port-au-Prince.

« Des maladies se propagent dans les sites : diarrhée, grippe, grattelle, fièvre, choléra... Les malades de la tuberculose, chassés du Centre Sanatorium (Ndlr : depuis fin août 2023 à Carrefour Feuilles) sont aussi dans des sites. Ils n’ont pas accès aux soins réguliers, ni ne bénéficient non plus d’une prise en charge spéciale. Des blessés par balles, des gens ayant des problèmes psychologiques… n’ont pas non plus, accès aux soins de santé », expose le Cardh.

Il mentionne le cas de nourrices (certaines accouchées par césarienne) et de femmes enceintes sur le point d’accoucher, qui ont besoin de soins spéciaux et urgents, dans plus de 50% des sites visités.

« Les sites comptent énormément de nourrissons et d’enfants en bas âge, qui dorment parfois sous la pluie, compliquant leur situation (maladie et autres complications) ».

Le Cardh relève des problèmes liés aux conditions de logement des personnes déplacées internes, dans des sites incapables de parer aux pluies qui tombent constamment, et à l’éclairage sur les cours et dans les tentes.

Cette situation « favorise certaines pratiques inadmissibles dont le viol, les violences sexuelles, la prostitution ».

« Dans certains sites, des femmes et des mineures font l’objet de violences sexuelles. Il y a eu au moins un cas de viol identifié sur mineure. Des femmes se prostituent aussi dans ces espaces ».

Tout en félicitant les responsables communautaires, les bénévoles de la protection civile et les organisations investies dans l’humanitaire, pour leurs efforts, quoique insuffisants, de relogement des personnes déplacées internes, au moment du déclenchement des violences, et leur appui, le Cardh appelle à une remobilisation autour de la situation des personnes déplacées internes, à une nouvelle évaluation des besoins (par secteur) et à un plan de relèvement durable, qui leur permettra de regagner leurs maisons (si possible) ou de les relocaliser dans la dignité.

Ce plan de relèvement durable devrait aussi permettre aux personnes déplacées d’avoir une activité économique et prendre en compte la situation des catégories les plus fragiles (nourrissons et enfants en âges de scolarisation, femmes enceintes et celles avec des complications après accouchement, vieillards, personnes avec handicaps…).

En dehors des opérations de la police à Carrefour Feuilles, qui ont conduit à un calme apparent dans certains quartiers, l’institution policière devrait y avoir une présence constante et aider les personnes déplacées, qui le souhaitent, à retourner chez elles, préconise le Cardh.

Plusieurs victimes de massacres à Carrefour Feuilles (d’août à septembre 2023), Cité Soleil (du 7 au 17 juillet 2022) et à la Plaine du Cul-de-Sac (du 24 avril au 6 mai 2022) ont porté plainte contre l’État en Haïti, a indiqué le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), dans un document en date du mardi 19 septembre 2023.

Le Rnddh dit avoir dénombré, du « 4 août au 12 septembre 2023 seulement, 104 personnes victimes d’assassinats et de disparitions forcées à Carrefour Feuilles, deux cas de viols collectifs perpétrés sur une mère et sa fille, 14 personnes blessées par balles et 35 maisons qui ont été systématiquement pillées avant d’être incendiées, détruites ou squattées ». [emb rc apr 26/09/2023 13:30]