P-au-P., 19 sept. 2023 [AlterPresse] --- L’expert des Nations unies des droits humains en Haïti, l’Américain William O’Neill, appelle les gouvernements dominicain et haïtien « à partager toutes les informations pertinentes sur la nappe phréatique, les études hydrologiques, les impacts environnementaux et autres informations décrites dans la déclaration commune de mai 2021, afin de parvenir à une fin pacifique et rapide » à la crise de la rivière Massacre, dans une note dont a pris connaissance l’agence en ligne AlterPresse.
O’Neill exhorte également le gouvernement de facto en Haïti à exercer son autorité sur toutes les activités liées au projet de canal sur la rivière Massacre (Dajabon), afin de garantir que les protocoles appropriés en matière d’ingénierie, de santé, de sécurité et environnementaux soient respectés.
Il encourage les autorités des deux pays à accepter un arbitrage international pour résoudre leurs différends, si aucun accord ne peut être conclu.
William O’Neill demande aux gouvernements haïtien et dominicain de revenir à la table des négociations et de suivre le processus décrit dans la déclaration commune du 27 mai 2021, pour parvenir à une résolution pacifique de ce différend.
Une délégation haïtienne a été contrainte de mettre fin aux négociations bilatérales en cours à Santo Domingo, suite à la mise à exécution des menaces du président dominicain, Luis Abinader, de fermer, à partir du vendredi 15 septembre 2023, les frontières terrestre, aérienne et maritime avec la république d’Haïti.
Dans la soirée du dimanche 18 septembre 2023, Luis Abinader a déclaré maintenir la décision de fermer totalement la frontière avec Haïti, dans une adresse à la nation dominicaine.
Cette décision de fermer de toute la frontière haïtienne-dominicaine (terrestre, maritime et aérienne), pour protester contre la poursuite des travaux de construction à Ouanaminthe (Nord-Est d’Haïti) d’un canal sur la rivière Massacre, est entrée en vigueur depuis le vendredi 15 septembre 2023, dès 6:00 am (10:00 gmt).
Les mesures prises par le gouvernement dominicain, comme la suspension des visas pour les citoyennes et citoyens haïtiens, resteront en vigueur jusqu’à « l’arrêt définitif de la construction du canal sur la rivière Massacre du côté haïtien », a soutenu Abinader.
L’élan de solidarité, du côté haïtien, pour la construction d’un canal sur la rivière Massacre, se renforce, au jour le jour, en dépit de la décision unilatérale prise par le président dominicain Luis Abinader de fermer toute la frontière haïtienne-dominicaine.
William O’Neill se dit « extrêmement alarmé par la décision du gouvernement de la République Dominicaine de fermer sa frontière terrestre, maritime et aérienne avec Haïti ».
Il demande au gouvernement dominicain de reconsidérer sa décision, qui aura de graves conséquences sur les populations des deux côtés de la frontière.
William O’Neill préoccupé par les graves conséquences de la fermeture de la frontière haitiano-dominicaine
« De nombreuses entreprises en République Dominicaine dépendent du commerce transfrontalier avec Haïti pour leur subsistance. Des milliers d’emplois sont menacés et les entreprises de la République Dominicaine, qui dépendent fortement de la main-d’œuvre journalière haïtienne, seront confrontées aux répercussions économiques immédiates de la fermeture ».
Il anticipe, du côté haïtien, un impact encore plus désastreux, soulignant qu’en raison de l’insécurité et de la violence des gangs en Haïti, de nombreux produits essentiels, comme la nourriture, le matériel médical et les médicaments, sont importés de la République Dominicaine.
Les directeurs de cliniques médicales en Haïti craignent de ne plus être en mesure de soigner leurs patientes et patients, si l’accès à la République Dominicaine leur était coupé, rapporte-t-il, signalant combien « des vies sont en jeu ».
« Haïti reçoit au moins 25 % de ses ressources alimentaires de la République Dominicaine. De nombreuses écoles de la zone frontalière achètent la nourriture qu’elles utilisent pour offrir le déjeuner à leurs élèves à la frontière. L’accès à l’eau sera également encore plus entravé ».
William O’Neill invite la République Dominicaine « à autoriser l’acheminement de toutes les formes d’aide humanitaire et de biens essentiels à Haïti, afin d’éviter d’aggraver davantage une crise déjà grave, qui met particulièrement en danger les plus vulnérables, notamment les enfants et les personnes âgées ».
Tout en affirmant reconnaitre combien la complexité de la situation en Haïti a un impact important dans la région et a suscité des inquiétudes au sein de la société dominicaine, l’expert des Nations unies des droits humains en Haïti appelle à des mesures fondées sur les droits humains et les principes humanitaires ainsi qu’une réponse solidaire, à la lumière de la situation humanitaire dans le pays, « pour répondre avec succès à ces préoccupations ». [emb rc apr 19/09/2023 11:30]