P-au-P., 15 sept. 2023 [AlterPresse] --- L’économiste et politologue Joseph Harold Pierre encourage la République Dominicaine et Haïti à trouver une solution diplomatique au conflit qui les oppose, en ce qui concerne la construction, à Ouanaminthe (Nord-Est d’Haïti), d’un canal sur la rivière Massacre, dans un entretien accordé à la plateforme AlterPresse/AlterRadio.
Deux peuples vivant sur la même île devraient chercher à résoudre, de façon diplomatique, un conflit qui les oppose, insiste Joseph Harold Pierre, soulignant combien les mesures envisagées par les autorités dominicaines devraient s’inscrire dans le cadre de la convivialité binationale.
De telles dispositions s’avèrent « trop drastiques », regrette-t-il, tout en avertissant les autorités dominicaines d’une éventuelle baisse de leurs profits au cas où elles décideraient de suspendre réellement la délivrance de visas aux Haïtiennes et Haïtiens.
« Pratiquement, le refus de visas dominicains aux Haïtiennes et Haïtiens est de zéro %, tandis que celui relatif aux visas chiliens est de 30%. De plus, lorsqu’un visa dominicain se vend formellement entre 80.00 et 100.00 dollars américains (Ndlr : US $ 1.00 = + 140.00 gourdes ; 1 euro = 145.00 gourdes ; 1 dollar canadien = 101.00 gourdes ; 1 peso dominicain = 2.60 gourdes aujourd’hui), il est obtenu jusqu’à 400 dollars américains en Haïti », fait-il remarquer.
La fermeture des frontières terrestre, maritime et aérienne ne se maintiendra pas pour longtemps, estime l’économiste et politologue.
« C’est une mesure électoraliste du gouvernement dominicain, dont l’objectif est de gagner les prochaines élections (en 2024) »
Par ailleurs, Joseph Harold Pierre anticipe, dans ce contexte de tensions entre les deux pays, une augmentation massive des rapatriements des ressortissantes et ressortissants haïtiens sans papiers ainsi que des violations des droits des Haïtiennes et Haïtiens, qui pourraient connaitre des moments difficiles.
Suite à la réunion extraordinaire, le lundi 11 septembre 2023, le Conseil national de sécurité, dirigé par le président dominicain Luis Abinader, a annoncé une série de mesures contre Haiti, à cause de la reprise du côté d’Haïti de la construction d’un canal sur la rivière Massacre à la frontière avec Dajabón.
En plus de suspendre définitivement l’entrée de toutes les personnes impliquées dans le conflit lié au dossier de la rivière Massacre, le gouvernement dominicain a décidé de surseoir à la délivrance de visas aux Haïtiennes et Haïtiens jusqu’à nouvel ordre.
Il avait aussi demandé une réunion bilatérale de la table hydrologique binationale pour convenir d’une solution définitive.
Alors que les discussions entre les deux pays pour trouver une issue au conflit étaient en cours, les autorités dominicaines ont annoncé, le jeudi 14 septembre 2023, la fermeture de toute la frontière haïtienne-dominicaine (terrestre, maritime et aérienne), à compter du vendredi 15 septembre 2023, dès 6:00 am (10:00 gmt).
Dans un communiqué officiel, transmis à AlterPresse en milieu de soirée du 14 septembre 2023, le gouvernement de la République d’Haïti déclare prendre acte de la décision de la République Dominicaine de fermer ses frontières avec la République d’Haïti à partir du vendredi 15 septembre 2023.
« La République d’Haïti peut souverainement décider de l’exploitation de ses ressources naturelles. Elle a, comme la République Dominicaine, avec laquelle elle partage la rivière Massacre, l’entier droit d’y faire des prises, conformément à l’accord de 1929 », selon le communiqué.
Le gouvernement de facto en Haïtien indique qu’il prendra toutes les dispositions que de droit pour protéger les intérêts du peuple haïtien, tout en privilégiant toujours le dialogue. [je emb rc apr 15/09/2023 10:30]