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Éducation : Une timide rentrée des classes sur fond de crise multidimensionnelle en Haïti

P-au-P., 12 sept. 2023 [AlterPresse] --- La rentrée scolaire, officiellement prévue le lundi 11 septembre 2023, s’est effectuée timidement sur le territoire national, dans un contexte de crise multidimensionnelle où la criminalité, la vie chère et la mauvaise gouvernance règne en Haïti, observent des syndicats enseignants et économistes, dans des interviews accordées à l’agence en ligne AlterPresse.

« La rentrée scolaire est-elle effective sur tout le territoire national ? N’est-il pas un bluff gouvernemental, qui avait annoncé la réouverture des classes le 11 septembre 2023 ? Le régime du Parti haïtien tèt kale (Phtk) n’est-il pas une barrière pour le rendez-vous scolaire des parents, élèves et professeurs, après plus de deux mois de vacances » ?, s’interroge le coordonnateur de l’Union nationale des normaliennes et normaliens d’Haïti (Unnoh), le professeur Josué Mérilien, dans des considérations sur la plateforme AlterPresse/AlterRadio.

Le gouvernement de facto au pouvoir a mis en place un climat de violences, avec la complicité des gangs armée, pour boycotter l’éducation dans le pays, accuse l’Unnoh.

Ce climat de terreur décapitalise totalement les parents qui, du coup, n’ont plus les moyens pour assurer l’éducation de leurs enfants, déplore le professeur Josué Mérilien.

Bon nombre de bâtiments logeant des écoles ont été transformés en abris provisoires à Port-au-Prince, après que plusieurs familles ont été chassées de leurs domiciles par des gangs armés, rappelle l’Unnoh.

Le droit à l’éducation va continuer à être violé dans le pays, regrette la coordonnatrice de la Confédération nationale des éducateurs et éducatrices d’Haïti (Cneh), Magalie Georges, interrogée par AlterPresse/AlterRadio.

La situation a commencé à s’aggraver depuis l’année 2018, perturbant la rentrée des classes, chaque année, souligne la syndicaliste.

« Ce n’est pas un problème nouveau. Il est temps que l’État adopte des dispositions pour garantir le droit à la vie et à l’éducation. Les citoyennes et citoyens n’ont pas à demander l’ajournement de la rentrée des classes. Les citoyennes et les citoyens doivent exiger à l’État de créer les conditions propices pouvant permettre à toutes les actrices et tous les acteurs de l’éducation de vaquer librement et en toute quiétude à leurs activités quotidiennes ».

La rentrée scolaire 2023-2024, une catastrophe économique aux yeux de l’économiste Enomy Germain

« Les conditions de vie des familles haïtiennes, notamment celles des familles déplacées, sont très précaires. La criminalité rend la vie de plus en plus difficile dans le pays. Tous les aspects de la vie sociale sont grandement affectés. Ce qui est aussi le cas pour la rentrée des classes. Il n’y a pas de doutes que les familles haïtiennes sont confrontées à de graves difficultés pour scolariser leurs enfants », analyse sur AlterPresse/AlterRadio l ’économiste Enomy Germain.

Le premier ministre de facto Ariel Henry a donné, sur fond de tensions et de contestations, le coup d’envoi de la rentrée des classes pour l’année académique 2023-2024, en inaugurant 2 écoles nationales dans la localité de Lifran, située à Ravine à Charles, deuxième section communale de Marfranc, dans le département de la Grande Anse (une partie du Sud-Ouest d’Haïti).

Ariel Henry qualifie de « jour spécial » la rentrée des classes, pour montrer l’importance de l’école un peu partout dans le pays et l’importance de l’éducation, « une des priorités » du gouvernement de facto.

A cause de la situation dans certaines zones du pays, plusieurs filles et fils du pays ne peuvent pas encore prendre le chemin de l’école, reconnait Ariel Henry, dont son gouvernement de facto, déclare-t-il, s’engage à faciliter la scolarité de tous les enfants.

Quoique saluant l’engagement des parents et des directrices et directeurs pour préparer cette rentrée scolaire, malgré le contexte difficile, Ariel Henry n’a rien dit sur les dispositions institutionnelles mises en place pour favoriser la rentrée des classes, perturbées par la terreur, en toute impunité, des gangs armés qui continuent de pousser plusieurs milliers de familles à abandonner leurs domiciles...

« Le gouvernement n’oublie pas les parents, les directeurs et directrices d’écoles, les professeurs et élèves, en difficultés pour ce premier jour de classe à cause des actes de violences des bandits, notamment dans les quartiers de la capitale et dans le département de l’Artibonite ».

Cependant, la délégation d’Ariel Henry a été très mal accueillie, avec beaucoup d’hostilité, par des citoyennes et citoyens, qui, en plus de barricades de pneus usagés enflammés, ont lancé des jets de pierres, notamment dans le quartier de Nan Site dans la ville de Jérémie, où il devait présider une cérémonie de lancement de l’année scolaire 2023-2024.

Le cortège gouvernemental a été accueilli par des jets de pierres et de bouteilles, en signe de protestation à Ariel Henry, selon les témoignages recueillis par AlterPresse/AlterRadio.

Déjà, dans la nuit du dimanche 10 au lundi 11 septembre 2023, des barricades de pneus usagés enflammés ont été érigées dans plusieurs quartiers de la ville de Jérémie, ville économiquement la plus importante dans le département de la Grande Anse. [ppsf emb rc apr 12/09/2023 15:00]