P-au-P., 31 juil. 2023 [AlterPresse] --- Les réactions divergent au niveau de la classe politique haïtienne, après l’annonce du gouvernement kenyan, qui se dit prêt à prendre la tête d’une force internationale dans le pays, dès que le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (Onu) aura donné son aval, selon les informations rassemblées par l’agence en ligne AlterPresse.
Joint au téléphone par AlterPresse, le parti politique Organisation du peuple en lutte (Opl) déclare à nouveau s’opposer au déploiement éventuel d’une force militaire ou d’une police internationale en Haïti, après l’intérêt manifesté par le Kenya à diriger une telle force.
Le porte-parole du parti, Danio Syriac, affirme rester attaché à l’idée que le pays dispose d’assez de ressources pour faire face à la criminalité.
« C’est la volonté politique qui manque », dit-il.
Les autorités au pouvoir ne font pas preuve de volonté pour résoudre la crise sécuritaire dans le pays, fustige l’Opl.
Il semble qu’il y ait un complot entre le gouvernement de facto et la communauté internationale pour créer les conditions favorisant le déploiement d’une force internationale dans le pays, analyse Syriac.
Aucune police ni armée étrangère ne résout jamais un problème de sécurité interne dans un pays étranger. Cette force serait une imposition, quel que soit le pays qui serait disposé à prendre la tête d’une mission onusienne, considère l’Opl.
« Ce sont les réserves nationales, qui ont toujours résolu leurs problèmes et non l’Organisation des Nations unies ».
« Il n’y a pas que la Police nationale d’Haïti qui a besoin d’aide. Il y a aussi le gouvernement haïtien, soutenu par le Conseil de sécurité. Il faut nous envoyer un cabinet ministériel venant de l’Ouganda, par exemple », déclare, de manière ironique et satirique, le sociologue James Beltis de l’accord de Montana, dans un message publié sur Twitter, pour prendre le contrepied de la proposition du ministre des affaires étrangères du Kenya.
« Tout est lié. Chers patriotes haïtiens, l’heure est grave. Attachons nos ceintures et soyons très veyatif. Les corrupteurs et vendeurs de Patrie se frottent déjà les mains. Surveillons à la loupe le texte que Guterres et le Conseil de sécurité de l’Onu vont nous imposer ! », a mis en garde l‘ancien sénateur Steven Irvenson Benoit, ancien premier ministre élu de l’accord de Montana, sur son compte Twitter, le samedi 29 juillet 2023.
« Le Kenya, qui s’est dit prêt à diriger une force internationale en Haïti, est en proie à sa propre crise socio-politique interne », souligne, de son côté, l‘ancien premier ministre de facto (14 avril - 20 juillet 2021) et ancien titulaire des affaires étrangères (5 mars 2020 - 24 novembre 2021), Claude Joseph, qui met en doute l’annonce du gouvernement kenyan.
« Depuis des mois, des manifestations meurtrières secouent régulièrement le pays. Les manifestations antigouvernementales protestant contre la cherté de la vie sont violemment réprimées par une police sous coupe réglée, suscitant ainsi de vives critiques de plusieurs organisations de défense des droits humains et de la conférence épiscopale du Kenya », expose Claude Joseph, dans un message publié sur Twitter.
Une police qui n’est pas professionnelle dans son pays, peut-elle l’être ailleurs ?, s’interroge-t-il.
L’une des branches du Secteur dit démocratique et populaire (Sdp), dirigée par l’avocat Michel André, proche du gouvernement de facto d’Ariel Henry, déclare « accueillir favorablement l’annonce de la volonté du Kenya de prendre le leadership de la force multinationale et d’envoyer 1,000 policiers en Haïti ».
Cette branche du Sdp invite les autres pays membres des Nations unies à emboîter le pas, pour aider Haïti à traverser cette étape difficile, a tweeté Michel André, aux yeux de qui « sans cette force internationale, la révision constitutionnelle et l’organisation des élections (deux projets du gouvernement de facto) seront totalement hypothéquées ».
Cette branche du Sdp appelle la population à faire bloc derrière l’initiative du gouvernement de facto de solliciter cette force internationale d’appui à la Pnh, balance Michel André.
Jean Victor Généus, titulaire de facto du Ministère des affaires étrangères et des cultes (Maec), déclare avoir reçu avec beaucoup d’intérêt les déclarations du gouvernement du Kenya, qui se dit prêt à diriger une force internationale en Haïti, dès que le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (Onu) aura donné son aval.
Une proposition, visant la mobilisation de cette force internationale, devrait être soumise d’ici le lundi 14 août 2023, après une concertation avec le gouvernement de facto, le Bureau intégré des Nations unies en Haïti (Binuh) et le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (Onu), le Portugais Antonio Guterres, faisait savoir Ariel Henry, dans une déclaration de presse, mercredi soir 19 juillet 2023, de retour en Haïti après sa participation au sommet de l‘Union européenne (Ue) avec les pays d’Amérique latine et des Caraïbes, les lundi 17 et mardi 18 juillet 2023, à Bruxelles (Belgique).
Cependant, par la résolution 2692 (2023), adoptée à l’unanimité (le 14 juillet 2023), « le Conseil de sécurité prie le Secrétaire général de lui soumettre un rapport écrit, en consultation avec Haïti, dans les trente jours (d’ici le 14 août 2023), décrivant toute la gamme des possibilités d’appui que pourrait fournir l’Onu pour améliorer l’état de la sécurité, notamment mais non exclusivement l’appui à la lutte contre le commerce et le détournement illicites d’armes et de matériel connexe ; la formation supplémentaire de la Police nationale d’Haïti (Pnh) ; l’appui à une force multinationale non onusienne ; ou la possibilité d’une opération de maintien de la paix, dans le cadre d’un règlement politique en Haïti ».
Le 17 octobre 2022, à New York, la Chine et la Russie ont exprimé des réserves quant à la perspective de déploiement d’une force internationale armée en Haïti, en réponse à la demande du gouvernement de facto en Haïti, lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’Onu. [ppsf emb rc apr 31/07/2023 14:00]