P-au-P, 31 juil. 2023 [AlterPresse] --- Le titulaire de facto du Ministère des affaires étrangères et des cultes (Maec), Jean Victor Généus, declare avoir reçu avec beaucoup d’intérêt les déclarations du gouvernement du Kenya, qui se dit prêt à diriger une force internationale en Haïti, dès que le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (Onu) aura donné son aval, dans un communiqué dont a pris connaissance l’agence en ligne AlterPresse.
« A la demande du groupe de nations des Amis d’Haïti, le Kenya a accepté d’envisager positivement de diriger une force multinationale en Haïti », selon le Ministère kenyan des affaires étrangères, cité par l‘agence de presse Reuters le samedi 29 juillet 2023.
Le Ministère kenyan des affaires étrangères confirme « la volonté de ce pays frère d’apporter un appui effectif aux forces de l’ordre haïtiennes, dans leur combat pour le rétablissement d’un environnement sécuritaire dans le pays », affirme Jean Victor Généus.
« Haïti apprécie à sa juste valeur cette manifestation de la solidarité africaine. Et c’est avec plaisir qu’elle accueillera, dans les prochaines semaines, la mission d’évaluation que le Kénya se propose d’envoyer », dit Généus.
Applaudissements et rejet exprimés
En Haïti, comme en République Dominicaine, les réactions se multiplient après la décision du gouvernement Kenyan de prendre la tête d’une force internationale en Haïti et d’envoyer 1,000 policiers en Haïti.
« Le 21 septembre 2021, devant l’Assemblée générale des Nations unies, j’ai appelé la communauté internationale à contribuer à la résolution de l’insécurité en Haïti. Notre persévérance porte ses fruits : le Kenya dirigera, avec le soutien des États-Unis, une force multinationale pour Haïti ! Nous continuerons à plaider en faveur d’un soutien accru », se félicite le président dominicain, Luis Abinader, le samedi 29 juillet 2023.
« Tout est lié. Chers patriotes haïtiens, l’heure est grave. Attachons nos ceintures et soyons très veyatif. Les corrupteurs et vendeurs de Patrie se frottent déjà les mains. Surveillons à la loupe le texte que Guterres et le conseil de sécurité de l’Onu vont nous imposer !, a mis en garde l‘ancien sénateur Steven Irvenson Benoit, ancien premier ministre élu de l’accord de Montana, sur son compte Twitter, le samedi 29 juillet 2023.
« Le Kenya, qui s’est dit prêt à diriger une force internationale en Haïti, est en proie à sa propre crise socio-politique interne », souligne, de son côté, l‘ancien premier ministre de facto (14 avril - 20 juillet 2021) et titulaire des affaires étrangères (5 mars 2020 - 24 novembre 2021), Claude Joseph, qui met en doute l’annonce du gouvernement kenyan.
« Depuis des mois, des manifestations meurtrières secouent régulièrement le pays. Les manifestations antigouvernementales protestant contre la cherté de la vie sont violemment réprimées par une police sous coupe réglée, suscitant ainsi de vives critiques de plusieurs organisations de défense des droits humains et de la conférence épiscopale du Kenya », expose Claude Joseph, dans un message publié sur Twitter.
Une police qui n’est pas professionnelle dans son pays, peut-elle l’être ailleurs ?, s’interroge-t-il.
Les États-Unis d’Amérique optimistes, l’Onu se mobilise
Le 29 juillet 2023, relevant combien des progrès auraient été enregistrés sur la question, le secrétaire d’état américain Antony Blinken s’est dit confiant quant au déploiement d’une force de paix en Haïti.
« Nous sommes concentrés sur la mise en place de ce qui est nécessaire pour cette force et le pays qui sera à sa tête », a déclaré le chef de la diplomatie américaine dans des propos rapportés par l’Agence France presse (Afp).
Une proposition, visant la mobilisation de cette force internationale, devrait être soumise d’ici le lundi 14 août 2023, après une concertation avec le gouvernement de facto, le Bureau intégré des Nations unies en Haïti (Binuh) et le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (Onu), le Portugais Antonio Guterres, faisait savoir Ariel Henry, dans une déclaration de presse, mercredi soir 19 juillet 2023, de retour en Haïti après sa participation au sommet de l‘Union européenne (Ue) avec les pays d’Amérique latine et des Caraïbes, les lundi 17 et mardi 18 juillet 2023, à Bruxelles (Belgique).
Cependant, par la résolution 2692 (2023), adoptée à l’unanimité (le 14 juillet 2023), « le Conseil de sécurité prie le Secrétaire général de lui soumettre un rapport écrit, en consultation avec Haïti, dans les trente jours (d’ici le 14 août 2023), décrivant toute la gamme des possibilités d’appui que pourrait fournir l’Onu pour améliorer l’état de la sécurité, notamment mais non exclusivement l’appui à la lutte contre le commerce et le détournement illicites d’armes et de matériel connexe ; la formation supplémentaire de la Police nationale d’Haïti (Pnh) ; l’appui à une force multinationale non onusienne ; ou la possibilité d’une opération de maintien de la paix, dans le cadre d’un règlement politique en Haïti »..
Tout en condamnant avec la plus grande fermeté l’intensification de la violence, des activités criminelles et des violations des droits humains en Haïti, le Conseil de sécurité de l’Onu a décidé, le vendredi 14 juillet 2023, de proroger jusqu’au 15 juillet 2024 le mandat du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (Binuh).
70 civils et agents en détachement intègrent le Binuh sous la direction d’un chef de la police civile des Nations unies.
Lors d’une visite, le samedi 1er juillet 2023, dans la capitale haïtienne Port-au-Prince, António Guterres a profité pour réclamer le déploiement immédiat d’une force de sécurité internationale robuste, appelée à assister la Police nationale d’Haïti (Pnh) dans sa lutte contre les gangs.
Le secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres, a écrit pour la première fois au Conseil de sécurité, le 8 octobre 2022, afin de solliciter le déploiement rapide d’une force armée d’action rapide, en réponse à un appel à l’aide, le 7 octobre 2022, du premier ministre de facto en Haïti, Ariel Henry, qui a mis en garde contre « le risque d’une crise humanitaire majeure ».
Guterres, qui était en visite en Haïti, le 1er juillet 2023, a appelé la communauté internationale à être prête à donner suivi à la décision du Conseil de sécurité de l’Onu, consistant à autoriser le déploiement immédiat d’une force de sécurité internationale robuste, qui viendrait assister la Police nationale d’Haïti dans la lutte contre les gangs armés.
« Ce n’est pas le moment d’oublier Haïti ou d’affaiblir notre solidarité envers son peuple », avait-il déclaré.
Une résolution du Conseil des ministres de facto, prise le jeudi 6 octobre 2022, autorise Ariel Henry à « solliciter et obtenir des partenaires internationaux d’Haïti un support effectif pour le déploiement immédiat d’une force spécialisée armée, en quantité suffisante pour stopper, sur toute l’étendue du territoire, la crise humanitaire ».
Cette demande d’intervention militaire étrangère en Haïti, formulée par le gouvernement de facto à l’endroit de la communauté internationale, constitue un acte criminel et une trahison, ont qualifié plusieurs organisations nationales.
Réserves de la Chine et la Russie
Le 17 octobre 2022, à New York, la Chine et la Russie ont exprimé des réserves quant à la perspective de déploiement d’une force internationale armée en Haïti, en réponse à la demande du gouvernement de facto en Haïti, lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’Onu.
Les représentants des deux pays ont, durant cette réunion, suivie par AlterPresse, pris note de la requête du gouvernement de facto en Haïti, mais aussi des positions exprimées par d’autres secteurs politiques et de la société, en général, contre une éventuelle intervention étrangère.
La Chine a fait part de ses préoccupations, quant au contexte dans lequel se déploierait cette force internationale, et a appelé à la « prudence », alors que des manifestations anti-gouvernementales se poursuivaient sans relâche en Haïti.
Même inquiétude exprimée par la Russie, dont le représentant, Dmitry Polyanskiy, a demandé de « peser toutes les conséquences » du déploiement éventuel d’une force internationale en Haïti.
La Russie a également critiqué des « interférences dans le processus politique haïtien » de la part d’« acteurs régionaux connus, qui considèrent le continent américain comme leur arrière-cour ». [ppsf emb rc apr 31/07/2023 09:30]
Photo : Compte Twitter Jean Victor Généus