P-au-P, 28 juil. 05 [AlterPresse] --- L’organisation internationale Oxfam GB fait part de nombreuses failles relevées dans le Cadre de Coopération Intérimaire (CCI) élaboré par le gouvernement intérimaire d’Haïti en partenariat avec les bailleurs de fonds internationaux lors de la Conférence de Washington en juillet 2004.
Un des aspects abordés par la Oxfam GB, concerne le clivage entre les secteurs sociaux et le gouvernement, alors qu’« on affirme que la réconciliation nationale ainsi que le développement local, la décentralisation et une éventuelle diminution de la pauvreté dépendent d’une large inclusion de tous les secteurs de la société dans un processus de création de consensus autour d’agendas sociaux, économiques et politiques ».
Dans ce document transmis à AlterPresse, la Oxfam estime que l’importance de la participation de la société civile est devenue un cliché dans le discours sur le développement et le CCI ne fait pas exception à la règle. Le processus est censé être « caractérisé par sa nature inclusive et participative ».
Pour cette organisation internationale présente en Haïti depuis 30 ans, le gouvernement haïtien et la société civile haïtienne ne partagent pas une histoire ou une culture de dialogue, mais plutôt d’opposition. Les bailleurs ne sont généralement pas habitués à traiter avec la société civile. De plus, la société civile n’est pas une entité homogène et, en Haïti, elle est généralement déchirée par de profonds clivages économiques, politiques et même culturels. Cette fragmentation et cette polarisation soulèvent des problèmes de représentation et compliquent le contact avec la société civile.
Les personnes engagées dans l’élaboration de ce plan concocté par la communauté internationale pour soutenir le gouvernement de transition sont en majeure partie des étrangers, relève la Oxfam GB. L’organisme dénonce le fait qu’ « il n’existe aucun document du CCI [rédigé] en créole, qui est la langue parlée par la majorité des Haïtiens et les ‘communications’ sont largement considérées comme des exercices de relations publiques ».
Des « organisations, y compris un certain nombre de partenaires d’Oxfam GB , proposent que des efforts soient faits pour combattre le CCI, qu’elles considèrent dans le meilleur des cas cynique et au pire, un complot pour détruire les vestiges de la production nationale d’Haïti », indiquent la Oxfam GB.
Fort de ce constat, au début de l’année 2005, l’organisme avait décidé de « lancer un processus de recherche et de suivi plus concerté en vue de fournir des informations à ses partenaires pour un dialogue continu » sur le Cadre de Coopération Intérimaire. De ce dialogue découle tout un ensemble de recommandations dont une évaluation participative de mi-semestre du CCI, l’élaboration de rapports d’avancement simples, réguliers qui abordent les problèmes qualitatifs et quantitatifs, la création des moyens viables pour fournir des informations en temps réel.
La Oxfam GB recommande aux acteurs impliqués dans le CCI de traduire en créole le document en tenant compte des concepts et de la langue pour les rendre réellement accessibles et de développer une stratégie devant intégrer activement la société civile au niveau des Tables Sectorielles.
Conçu comme un cadre stratégique établi par le gouvernement haïtien et sur lequel tous les acteurs devraient s’aligner, le CCI « a été élaboré en un temps record avec des imperfections prévisibles », souligne la Oxfam GB.
Les besoins globaux de financement pour la mise en œuvre du Cadre de Coopération Intérimaire sur la période juillet 2004-septembre 2006 sont estimés à environ 1,37 milliards de dollars américains. Au niveau du gouvernement haïtien, les ressources internes disponibles du budget national pour les activités du CCI se chiffre à environ 127 millions de dollars américains.
Selon la Oxfam GB, l’euphorie initiale a rapidement fait place au défi de passer d’un cadre et des promesses à une conception et à une mise en oeuvre concrète des projets.
La mise en circulation de la réflexion de la Oxfam GB coïncide avec le bilan dressé par les autorités haïtiennes et les membres du Comité de Coordination et de Suivi du CCI (COCCI), une année après l’élaboration dudit document. [do gp apr 28/07/05 16 : 30]