P-au-P, 27 juin 2023 [AlterPresse] --- Le Bureau des avocats internationaux qualifie de manœuvres dilatoires la décision de l’ex-directeur général du Ministère de l’intérieur et des collectivités territoriales (Mict), Fednel Monchéry, de refuser d’accepter comme juge d’instruction, Jean Wilner Morin, dans le cadre du dossier relatif au massacre de La Saline, perpétré le 13 novembre 2018, dans une interview accordée à la plateforme AlterPresse/AlterRadio.
L’ex-directeur général du Mict, Fednel Monchéry est inculpé dans ce dossier, instruit, depuis le 8 février 2023, par le juge Jean Wilner Morin.
« Un accusé peut récuser un juge seulement au commencement du dossier. Pour récuser un juge chargé d’instruire un dossier, l’accusé doit produire sa demande dès le commencement, c’est-à-dire dès la désignation du juge par le doyen », explique le responsable du Bureau des avocats internationaux (Bai), Me Mario Joseph, à AlterPresse/AlterRadio.
« Si le magistrat commence déjà à produire des actes d’instruction, comme c’est le cas du juge Jean Wilner Morin dans le dossier du massacre de La Saline, l’accusé ne peut pas lui demander de se déporter. Et même s’il le fait, le magistrat peut décider, à sa discrétion, de se déporter ou de poursuivre son instruction ».
Récuser quel que soit le juge désigné par le doyen serait un plan concocté par toutes les personnes accusées dans le massacre de La Saline, afin de faire passer du temps, justement pour étouffer le dossier et empêcher la tenue « d’un procès équitable et juste », met en garde Me. Mario Joseph, qui fait partie des avocats des victimes de La Saline en novembre 2018.
« En tant qu’avocat des victimes, j’appelle la Cour de cassation à décider sans délai sur la demande de récusation, produite par Fednel Monchery, pour éviter tout soupçon dans le dossier ».
En août 2019, Fednel Monchéry avait déjà récusé l’ancien juge instructeur Chavannes Étienne, actuel doyen du Tribunal de première instance (Tpi) de Port-au-Prince.
Entre temps, le juge d’instruction Jean Wilner Morin a transmis à la Direction centrale de la police judiciaire (Dcpj) un mandat d’amener contre l’ex-directeur général du Ministère de l’intérieur et des collectivités territoriales (Mict), Fednel Monchéry, inculpé dans le dossier du massacre de La Saline, perpétré le 13 novembre 2018.
Ce mandat d’amener a été émis contre Fednel Monchéry, qui a « récusé » l’invitation du juge d’instruction, Jean Wilner Morin, le vendredi 23 juin 2023, dans une correspondance envoyée au cabinet dudit juge.
Monchéry avance comme justification une éventuelle affinité qui existerait, selon lui, entre le Réseau national défense des droits humains (Rnddh) et le juge d’instruction, Jean Wilner Morin.
Pointé également du doigt dans le massacre de La Saline en novembre 2018, l’ancien maire de Port-au-Prince, Joseph Pierre Richard Duplan, délégué départemental de l’Ouest d’alors, avait aussi demandé un report de son audition, fixée le 3 juillet 2023 par le juge Jean Wilner Morin, évoquant être en voyage à l’étranger pour des soins médicaux.
Cette audition était initialement prévue pour le lundi 26 juin 2023.
Au moins 71 personnes ont été assassinées et des centaines de maisons détruites, dans le massacre du 13 novembre 2018 à La Saline, selon un rapport du Réseau national de défense des droits humains (Rnddh).
Le Rnddh avait relaté des témoignages, accusant Fednel Monchéry, le délégué départemental de l’Ouest d’alors, Joseph Pierre Richard Duplan, un ex-policier national Jimmy Cherizier alias Barbecue, d’avoir pris part à une réunion de planification, le 6 novembre 2018, à Delmas 6, une semaine avant le massacre.
Les massacres ont été perpétrés à La Saline, durant des périodes marquées par deux des plus grandes manifestations antigouvernementales de l’année 2018, soit les mercredi 17 octobre 2018 et dimanche 18 novembre 2018, contre la dilapidation des fonds PetroCaribe, avait rappelé le journal américain Miami Herald.
« Durant la période allant du 13 au 17 novembre 2018, à la Saline, des hommes, des femmes et même des enfants, âgés de seulement 4 ans, ont été abattus, leurs corps étant ensuite dévorés par des chiens et des cochons. Des femmes ont été violées et brûlées, de même qu’un officier de police, Juwon Durosier », selon une enquête policière de la Dcpj.
Plus de 70 personnes, dont des autorités étatiques et deux anciens policiers nationaux, devraient être arrêtées pour « actes répréhensibles », liés à la tuerie, perpétrée le 13 novembre 2018, au quartier La Saline, avait recommandé l’enquête interne de la Dcpj. [ppsf emb rc apr 27/06/2023 15:45]