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Plusieurs organisations de la société civile appellent à une réponse internationale urgente à la crise en Haïti

« Cette réponse doit être multiforme et ayant pour but de chercher explicitement à éviter les préjudices, causés par les interventions internationales abusives réalisées par le passé »

P-au-P, 14 juin 2023 [AlterPresse] --- Une dizaine d’organisations de défense des droits humains et de la société civile [1] demandent aux acteurs régionaux et internationaux de se mobiliser, dans le but d’apporter une réponse urgente, fondée sur les droits de la personne humaine, à la crise en Haïti, dans une note transmise à l’agence en ligne AlterPresse.

« Cette réponse doit être multiforme et ayant pour but de chercher explicitement à éviter les préjudices, causés par les interventions internationales abusives réalisées par le passé », soulignent-elles.

Ces organisations demandent aux acteurs régionaux et internationaux de cesser de soutenir l’ensemble de celles et de ceux, qui ont créé les crises, auxquelles Haïti est confrontée, y compris celles et ceux qui sont actuellement au pouvoir de facto.

Le premier ministre de facto, Ariel Henry, et plusieurs autres protagonistes haïtiens ont participé, du dimanche 11 au mardi 13 juin 2023, à la Jamaïque, à un sommet inter-haïtien autour de la crise multidimensionnelle en Haïti, sous les auspices de la Communauté des Caraïbes (Caricom).

Des parties se seraient mises d’accord sur le rétablissement d’un pouvoir exécutif bicéphale, dont un collège présidentiel et un premier ministre à la tête d’un gouvernement d’unité nationale, selon une déclaration élaborée, le mercredi 13 juin 2023, mais non signée, jusqu’à très tard dans la soirée, à la fin des pourparlers inter-haïtiens de 3 jours en Jamaïque, apprend AlterPresse de source proche des discussions.

L’équipe gouvernementale aurait à rétablir la confiance et créer un climat de sécurité, propice à la reprise des activités socio-économiques et à l’organisation d’élections, selon ce document, qui prévoit aussi la mise en place d’un comité de suivi, intégrant, entre autres, des membres de la Communauté des Caraïbes (Caricom).

Le sommet inter-haïtien en Jamaïque constitue un échec, estime, dans un tweet, le porte-parole de l’une des branches du Secteur démocratique et populaire (Sdp), Me. Michel André, allié du pouvoir de facto en place, dirigé par Ariel Henry.

« L’intransigeance de certains compatriotes de l’opposition et leur volonté de s’accaparer de tous les pouvoirs pendant cette période intérimaire ont fait échouer le sommet de Kingston, Jamaïque », déclare-t-il.

« L’esprit d’ouverture et de compromis, qui animait le premier ministre de facto Ariel Henry et les signataires de l’accord du 21 décembre 2022, n’étaient pas de l’autre côté », ajoute la branche du Sdp, signataire de l’accord du 21 décembre 2022.

Tout en renouvelant sa détermination de continuer le dialogue inter-haïtien, cette branche du Sdp demande au Haut conseil de transition (Hct) d’inviter les parties pour la poursuite du dialogue, en vue de créer les conditions pour l’organisation des élections, dans un climat sécuritaire et d’apaisement socio-politique, dans l’esprit du consensus du 21 décembre 2022 pour des élections inclusives et transparentes.

Appuyer la mise en place d’un gouvernement de transition légitime, le rétablissement de la sécurité, soutenir la justice et la reddition de comptes, arrêter le flux d’armes et appuyer le processus de réparation mené par les Haïtiens et Haïtiennes, sont parmi les propositions formulées dans le cadre de cette réponse internationale, prônée par la dizaine d’organisations de défense des droits humains et de la société civile.

« Toute nouvelle approche devrait respecter la souveraineté haïtienne et contribuer, de manière significative, à l’autonomisation du peuple haïtien dans sa quête d’une véritable gouvernance démocratique, d’investissement dans la sécurité publique et la résilience des communautés, la restauration de l’État de droit et de la sécurité, la fin de l’impunité pour les violations graves et garantir l’accès aux produits de première nécessité à tous ceux et à toutes celles qui en ont besoin ».

Ces organisations de droits humains et de la société civile invitent à « faciliter la mise en place d’un gouvernement de transition, dirigé par des technocrates, qui s’engageraient à ne pas participer aux futures élections et qui travailleraient à créer un environnement, permettant l’organisation d’élections libres, équitables et crédibles dans un calendrier clairement défini ».

Les principales taches de ce gouvernement de transition devraient, d’abord, consister à instaurer une sécurité minimale, le respect des droits humains fondamentaux et de l’État de droit, ainsi que l’accès aux produits de première nécessité à toutes les Haïtiennes et à tous les Haïtiens.

Au niveau sécuritaire, il faut fournir une assistance technique adéquate en matière de sécurité à la Police nationale d’Haïti (Pnh) pour rétablir la sécurité de base dans la capitale, Port-au-Prince, et dans la zone métropolitaine, ainsi que partout sur le territoire national.

« La forme de ce soutien peut couvrir des domaines, tels que la formation, l’équipement, la logistique, le renseignement, l’orientation tactique et le commandement, comme cela sera déterminé par le gouvernement de transition, qui sera établi , insistent ces organisations de droits humains et de la société civile.

Elles encouragent les actrices et acteurs régionaux et internationaux à « mettre en place et soutenir un mécanisme indépendant et crédible de contrôle, au sein de la police nationale haïtienne, sous l’autorité des dirigeants de transition, dans le but d’identifier, d’écarter et de déférer aux autorités judiciaires les officiers-ères de police, impliqués dans des actes de violence, la corruption à grande échelle ou qui soutiennent des groupes criminels violents ».

Il convient aussi de « contribuer à la mise en place de programmes spécialisés pour soutenir la réconciliation communautaire, le désarmement et la réintégration des personnes associées à des groupes criminels violents, tout en ayant une attention particulière axée sur le support à fournir aux mineurs et jeunes adultes associés à ces groupes, tout en tenant compte de leurs traumatismes ».

Apporter une assistance technique au système judiciaire, pour renforcer les capacités de gestion des dossiers et de conduite d’enquêtes pénales, notamment la poursuite des personnes impliquées dans des activités de grande criminalité, telles que les homicides, les enlèvements suivis de séquestration contre rançons avec promesse de libération, les violences sexuelles et tout autre acte de violence, la corruption et l’aide à des groupes criminels.

Un appel est aussi lancé en faveur d’une assistance technique spécifique à la lutte contre la corruption, en vue de la réalisation de procès exemplaires contre les auteurs-es et co-auteurs-es des crimes financiers. [emb rc apr 14/06/2023 13:30]


[1Les organisations de défense des droits humains et de la société civile, signataires de la note conjointe, sont le Bureau des avocats internationaux (Bai), la Commission épiscopale nationale (catholique romaine) Justice et paix (Ce-Jilap), le regroupement Ensemble contre la corruption (Ecc), la Plateforme des organisations haïtiennes des droits humains (Pohdh), le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), Institute for justice and democracy in Haiti (Ijdh), Kay Fanm, Nègès Mawon, Nou P ap Dòmi.