P-au-P., 22 mai 2023 [AlterPresse] --- Pendant les deux dernières années (2022-2023), diverses communes et localités du pays ont déjà atteint une situation d’urgence (phase 4) ou catastrophique (phase 5), relève le coordonnateur national de la Coordination nationale de la sécurité alimentaire (Cnsa), Amel Cazeau, dans une intervention à l’émission PouDemenKaBèl, diffusée sur AlterRadio.
Il s’agit des zones côtières de la Grande Anse (une partie du Sud-Ouest d’Haïti) et du Sud, du bas Nord-Ouest, une partie du haut Nord-Ouest, une partie des départements des Nippes (autre partie du Sud-Ouest), du Sud et Sud-Est, des communes de Belle Anse, Ganthier et Fonds Verrettes.
Cette situation serait due à des difficultés de transport des provisions alimentaires dans ces zones, à cause de la rareté de carburant dont les prix sont en hausse.
Toutes les localités lointaines font face à ce genre de problème, rapporte le coordonnateur national de la Cnsa.
Port-au-Prince et sa périphérie, fortement touchées
Ces derniers temps, différentes communes dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, notamment une partie de la commune de Port-au-Prince, la commune de Cité soleil (périphérie nord) et une partie de la commune de la Croix-des-Bouquets (périphérie nord-est) sont dans la phase d’urgence, enregistre la Cnsa.
La commune de Cité Soleil tend à passer à la phase 5 du niveau d’insécurité alimentaire, la phase la plus élevée (situation de catastrophe), précise-t-elle.
« Les habitantes et habitants dans ces zones sont aux abois. Ils connaissent des moments difficiles, en raison de la violence des gangs armés. Malheureusement, les structures, qui devraient les prendre en charge, ne le font pas », regrette Amel Cazeau.
4 millions 900 mille Haïtiennes et Haïtiens en situation d’insécurité alimentaire nécessitent urgemment une assistance humanitaire pour la période de mars à juin 2023, avait alerté, en mars 2023, la Cnsa, dans un document publié sur son site.
La communauté internationale alarmée après avoir applaudi le retrait de toutes subventions du carburant, qui aggrave l’insécurité alimentaire
En présence de plusieurs ministres de son gouvernement de facto, le premier ministre de facto, Ariel Henry, a procédé, le jeudi 13 avril 2023, au lancement du Programme multi-sectoriel d’apaisement social et réinsertion des populations vulnérables.
Le coût de ce programme, financé en majeure partie par le Fonds Monétaire International (Fmi), à travers le Food Shock Window, est évalué à 21 milliards 600 millions de gourdes (Ndlr : US $ 1.00 = + 150.00 gourdes ; 1 euro = 155.00 gourdes aujourd’hui ; 1 dollar canadien = 106.00 gourdes ; 1 peso dominicain = 2.70 gourdes aujourd’hui).
La communauté internationale a contribué à hauteur de 15 milliards 600 millions de gourdes, et le gouvernement de facto en Haïti en a ajouté six (6) milliards de gourdes.
« Cette décision a été prise en raison de la situation délétère de certaines familles en Haïti. Le programme sera mis en œuvre pendant 6 mois », avait précisé Ariel Henry.
Cette situation d’insécurité alimentaire aiguë se produit moins d’un an après l’augmentation, en septembre 2022, des prix du carburant, passant officiellement de 250.00 à 570.00 gourdes (128%) pour un gallon de gazoline, de 353.00 à 670.00 gourdes (89.81%) pour un gallon de diesel et de 352.00 à 685.00 gourdes (94.60%) pour un gallon de kérosène ou gaz blanc, le plus utilisé par les ménages en Haïti.
En effet, le secrétaire général de l’organisation des Nations unies (Onu), le Portugais Antonio Guterres, avait exprimé son appui à la décision du gouvernement de facto de ne plus subventionner le carburant, en augmentant les prix du gallon à la pompe.
« Je crois qu’on devrait subventionner les familles et pas les carburants. Ce n’est pas exactement la même chose, parce que cela permet aux familles d’obtenir les ressources dont elles ont besoin et cela ne se traduit pas dans un bénéfice pour les combustibles fossiles », avait déclaré le diplomate, informant combien plusieurs réunions du Conseil de sécurité de l’Onu ont eu lieu sur la situation en Haïti.
Cette décision avait suscité la colère de la population, qui avait protesté dans les différentes villes du pays pour forcer le gouvernement de facto à faire retrait de la mesure.
Ces mouvements de protestations ont provoqué la paralysie des activités commerciales et économiques dans différentes villes.
Crise humanitaire et sécuritaire
Quelques mois plus tard, l’Organisation des Nations unies (Onu) et des Organisations non gouvernementales (Ong) internationales ont tiré la sonnette d’alarme, par rapport à la détérioration quotidienne de la situation humanitaire en Haïti, dans une note transmise à AlterPresse.
Cette dégradation humanitaire est due à une spirale de violence et aux urgences, liées à la protection, aux droits humains à l’insécurité alimentaire, ainsi qu’à une épidémie de choléra, ont averti, le samedi 18 mars 2023, six représentants des agences d’aide de l’Onu et des Ong internationales, à l’issue d’une mission de deux jours, les mercredi 15 et jeudi 16 mars 2023, en Haïti.
En 2023, plus de 115,600 enfants en Haïti, soit une augmentation de 30% par rapport à l’année 2022, pourraient souffrir de malnutrition aiguë sévère (Mas), également connue sous le nom d’émaciation sévère, à cause de la violence des gangs armés dans le pays, a prévenu, le 11 mai 2023, la branche en Haïti du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef).
« À l’heure actuelle, un enfant sur cinq souffre d’une forme de malnutrition dans plusieurs communes de la zone métropolitaine de la capitale haïtienne, Port-au-Prince, en proie à la violence, à une aggravation de l’insécurité alimentaire et à une flambée épidémique de choléra depuis plus de deux ans ».
734 personnes ont été assassinées, soit une moyenne de 122 personnes par massacre, dans six parmi neuf massacres, perpétrés, d’avril 2022 à avril 2023, dans les départements de l’Artibonite et de l’Ouest, où se trouve la zone métropolitaine de Port-au-Prince, a dénombré le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), dans un rapport en date du mardi 9 mai 2023.
105 femmes ont été victimes de viols collectifs, pour la plupart, soit une moyenne de 17 femmes et filles victimes de viols par massacre, signale le rapport du Rnddh.
Plus de 600 personnes ont été tuées pour le seul mois d’avril 2023, dans la nouvelle vague de violence extrême, qui a frappé plusieurs quartiers, dans la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince, a indiqué, le mardi 9 mai 2023, le Haut-commissariat aux droits humains (Hcdh) de l’Organisation des Nations unies (Onu), citant les chiffres du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (Binuh), dans une note.
Cette augmentation fait suite aux assassinats d’au moins 846 personnes, de janvier à mars 2023, a souligné le Hcdh. [je emb rc apr 22/05/2023 15:45]
Montage photos : Cnsa