P-au-P., 06 mai 2023 [AlterPresse] --- Les activités des bandes armées, qui terrorisent la population, se sont intensifiées, ces dernières semaines, à l’est de la capitale, Port-au-Prince, et se déroulent désormais aux portes mêmes de l’Académie nationale de police, à Pernier/Frères (localités de Pétionville, périphérie est), rapportent des riveraines et riverains.
Ces derniers, qui se sont confiés à AlterPresse, déplorent l’absence continue de la police dans ces zones complètement abandonnées, selon eux, aux bandits.
L’Académie de police serait ceinturée de bases de gangs, dont des membres lourdement armés circulent librement dans diverses rues et ne cessent point de rançonner la population, qui ne sait à quels saints se vouer, selon différents témoignages parvenus à AlterPresse.
Pernier, Chateaublond, comme Torcelle, depuis de nombreux mois, passent progressivement sous la coupe totale des bandits, qui s’y déploient, désormais, à visage découvert et à tout moment, sans qu’aucune présence policière soit observée, selon des rapports concordants.
Le sous-commissariat de police de Pernier a été détruit, le samedi 28 janvier 2023, par des bandits armés.
Depuis peu, ceux-ci ont investi des zones, qui restaient encore en dehors de leur fief, dénonçait, la semaine dernière, un artisan, faisant part de son sentiment de révolte.
Il affirmait que les malfrats ont même installé, non loin de l’Académie nationale de police, des points de rançonnement de tous usagers de la voie publique, clamant qu’ils sont « plus forts que les policiers ».
« Cela se passe à la barbe de la police, à deux minutes de l’Académie nationale de police, et aux alentours » de cette place forte de la police, insistait-t-il.
« Foulay… » : La réalité tranche avec les communications de la police
Cette réalité tranche avec les communications de la police sur des « opérations » conduites, entre autres, à Pernier, pour démanteler les gangs.
Ce ne serait que du « foulay » (de la propagande), opinent certains utilisateurs.trices des réseaux sociaux.
Sur ces réseaux, on peut aussi lire des posts, exprimant la déception de personnes ayant, sous des menaces, fui leurs domiciles à Pernier.
« Il y a des jours, où j’ai juste envie de revenir (à Pernier) », écrit une femme, se demandant si elle a d’autre alternative que de laisser le pays.
Ses écrits sont illustrés par des photos de végétation, d’arbres fruitiers et autres qu’elle a fait pousser dans sa « cour ».
Il y a environ 6 mois, dans l’après-midi du vendredi 25 novembre 2022, le directeur de l’Académie nationale de police, le commissaire divisionnaire Harington Rigaud, a été assassiné sur la route de Frères, à quelques mètres du centre de formation.
Le Syndicat national des policiers haïtiens (Synapoha) avait alors dénoncé la passivité de l’État central et du haut état major de la Police nationale d’Haïti (Pnh), qui n’ont élaboré « aucun dispositif de sécurité pour avoir le contrôle de la zone, où siègent l’Académie nationale de police, l’École nationale de police (Enp) et l’École de la magistrature ».
« Un espace qui devrait (pourtant) être sécurisé en permanence », souligne le Synapoha.
La terreur avance
En plus de Pernier, les gangs poursuivent leur inexorable avancée dans des zones, comme Fort-Jacques, Diègue, Méyotte, Morette, Corlette, Frères et Tabarre, à l’est/nord-est de la capitale, rapportent des riverains.
Suivant les derniers détails obtenus, des malfrats se sont installés dans diverses résidences abandonnées à Morette. Jour et nuit, le mobilier de ces maisons est embarqué, au vu et au su de tous et toutes, dans des camions, pour être emporté ailleurs.
La circulation et la plupart des activités commerciales demeurent paralysées et l’accès aux produits de première nécessité se fait de plus en plus difficile dans ces quartiers littéralement assiégés.
La terreur est toujours présente également à Marlique, Cargo, Tunnel, Thomassin, Laboule, dans la commune de Pétionville ; Bérette, Calebasse, Fort-Jacques, Fermathe, dans la commune de Kenscoff (périphérie est) et Torcelle, dans la commune de Tabarre.
Il en est de même à Marché Salomon, Cité Soleil, Bel Air, Caradeux, Solino, Delmas, dans la zone métropolitaine ; Source Matelas, dans la commune de Cabaret (au nord de Port-au-Prince), Onaville, dans la commune de la Croix-des-Bouquets (périphérie nord-est), ainsi que les communes de Liancourt, Verrettes, de Petite Rivière de l’Artibonite et Montrouis (Artibonite/Nord).
Mobilisation anti-gang ?
Depuis la nuit du 23 au 24 avril 2023, suite à la tentative des gangs de prendre le contrôle de plusieurs quartiers de la capitale, dont Debussy, Turgeau, Pacot et Canapé Vert, une grande colère a éclaté, conduisant à une importante mobilisation anti-gang dans certains quartiers de Port-au-Prince et dans des villes de province.
Exaspérés, des riverains de Canapé Vert ont lynché puis brûlé, dans la matinée du 24 avril 2023, les corps de plus d’une dizaine d’individus armés, arrêtés par la police. Plusieurs autres bandits, dont le nombre n’est pas précisé, ont été tués à Débussy et dans d’autres quartiers.
Des riverains de Pernier et de toutes ces zones, ne cessent point de lancer des appels à la police, pour les aider à faire face à la violence des gangs et à mettre en déroute les bandits. [apr 06/05/2023 15:00]