P-au-P, 20 mars 2023 [AlterPresse] --- Depuis le lundi 27 février 2023, un nombre indéterminé de personnes, qui résidaient au centre-ville de la capitale, Port-au-Prince, se sont vues contraintes d’abandonner rapidement leurs demeures, confient plusieurs victimes à la plateforme AlterPresse/AlterRadio.
Des hordes de gens, munis de manch long (armes de gros calibre), ont commencé à s’affronter, pour la conquête de territoire.
Face au mépris des dirigeants de facto, qui ne font aucun cas de leurs déboires, les habitantes et habitants ont dû donner priorité à leur instinct de survie.
Elles et ils ont couru à toute vitesse, pour aller tenter de se réfugier ailleurs, dans des endroits plus sûrs et moins exposés aux assauts de ces bandes criminelles, qui tuent, incendient, pillent, extorquent, volent, violent… en toute impunité.
Mais, mal a pris à beaucoup de ces personnes.
Les hordes criminelles ont emporté le corps de mon petit fils…
Lucia Antoine, une dame âgée, qui résidait au Bel Air depuis plusieurs années, a fui vers le quartier de Fort National. Dans sa fuite, elle a perdu 2 enfants : une fille décédée à l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (plus connu sous le nom d’ « hôpital général », pendant qu’elle tentait de laisser la zone de conflit armé, et un fils, atteint par une balle perdue alors qu’il faisait le commerce de détail au Champ de Mars (principale place publique dans la capitale, Port-au-Prince).
Lucia Antoine n’était pas malheureusement au bout de ses peines.
« Les hordes criminelles ont emporté le corps de mon petit fils, qui baignait dans son sang. », m’ont raconté des témoins.
« Et elles ont brûlé ma maison, là où je vivais, au Bel Air »…
« J’aimerais bien regagner ma ville natale, pour retrouver ma famille et d’autres proches, dans le Nord du pays. Mais, le nord de la capitale est inaccessible, il est sous le contrôle des bandits armés », désespère Lucia Antoine.
« Mon père n’a pas survécu à ces événements sanglants »
Par contre, ce résident de Saint-Michel (toujours au centre-ville de Port-au-Prince), qui veut garder l’anonymat, a pu s’abriter, au début des affrontements armés. Quelques-uns des assaillants lui ont intimé l’ordre de partir, avant qu’ils mettent le feu à sa maison.
« Mon père n’a pas survécu à ces événements sanglants, perpétrés par les gangs armés. Depuis lors, je végète dans les rues de Port-au-Prince, sans aucun abri ni nourriture ».
« Le plus dur, ne pas pouvoir donner à manger à mes enfants… »
Un autre habitant de Saint-Michel, qui veut également garder l’anonymat, déclare éprouver beaucoup d’amertume, en se rendant compte de la gravité de la situation, dans laquelle il s’est retrouvé.
« Comment pouvais-je imaginer que je pourrais, un jour, quitter précipitamment là où j’habitais, pour aller errer dans les rues, sans aucune destination, les bras ballants, sans rien » ?
« Cette situation me dérange tellement ! Je suis embarrassé et j’ai très mal. J’ai des enfants. Le plus dur dans cette expérience malheureuse, c’est lorsque je me lève le matin et je ne vois pas, et je ne sais pas quoi donner à manger à mes enfants et à ma femme, qui sont sous ma responsabilité ».
Ces témoignages sont les uns aussi poignants que les autres.
Ils ont été recueillis, le lundi 20 mars 2023, par AlterPresse/AlterRadio, au bureau du Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), auquel ont recours, depuis fin février 2023, la plupart des victimes, qui y ont exposé leur calvaire après ces nouvelles attaques et ces nouveaux actes de terreur, dans la capitale, Port-au-Prince, livrée aux gangs armés.
Au moins 70 personnes ont été tuées dans les affrontements armés, qui ont lieu, depuis le lundi 27 février 2023, au Bel Air, a dénombré le Rnddh.
Toutes et tous ne veulent qu’une seule action concrète : qu’il soit mis fin à cette réalité de terreur, entretenue en toute impunité par les gangs armés, pour que toutes ces familles aux abois puissent retourner vivre en paix dans leurs demeures, qui devraient être reconstruites dans le meilleur délai. [je emb rc apr 20/03/2023 21:00]
Photo : capture d’écran