Par Emmanuel Marino Bruno
P-au-P, 07 févr. 2023 [AlterPresse] --- Le projet démocratique, porté par la Constitution du 29 mars 1987, après la chute, le vendredi 7 février 1986, de la dictature des Duvalier (François Duvalier 22 septembre 1957 - 21 avril 1971, Jean-Claude Duvalier 22 avril 1971 - 7 février 1986), aurait été nettement galvaudé par les dirigeants qui se sont succédé au pouvoir, au cours des trois dernières décennies, relèvent huit partis politiques, appuyant la déclaration du 30 janvier 2023, dans une note conjointe transmise à l’agence en ligne AlterPresse.
Ces partis politiques sont Pitit Desalin, Union nationale pour l’intégrité et la réconciliation (Unir), Kontrapèpla, l’Organisation du peuple en lutte (Opl), le Mouvement patriotique populaire dessalinien (Mopod), la Ligue alternative pour le progrès et l’émancipation haïtienne (Lapeh), le Grand rassemblement pour l’évolution d’Haïti (Greh ), le Parti haïtien tèt kale (Phtk).
Ils signalent le faible score d’Haïti par rapport à des indicateurs objectifs, comme le renouvellement périodique du personnel politique, le pluralisme politique, un gouvernement fonctionnel.
La participation des citoyennes et citoyens correspond aux performances d’un État failli, éligible pour le « Global facility act [1] », critiquent-ils.
Haïti est classée dans la catégorie de régime autoritaire, au regard des standards internationaux associés à la démocratie représentative, poursuivent-ils.
Du 7 février 1986 à date (7 février 2023), rien n’a été fait pour mettre en œuvre les espoirs d’un lendemain meilleur, fondé sur la justice pour toutes et tous, le respect des droits fondamentaux, la garantie des libertés démocratiques et le fonctionnement d’institutions prévues dans la Constitution du 29 mars 1987.
Pendant plus de trois décennies, les pratiques duvaliéristes (corruption, impunité, assassinats, violations systématiques des droits humains, affaiblissement des institutions, centralisation administrative à Port-au-Prince, monopoles et oligopoles, refus de l’alternance politique, etc.) ont persisté, voire se sont renforcées, avec les forces conservatrices et réactionnaires, autoritaires et arbitraires, associées à la communauté internationale, sous d’autres formes plus subtiles...
Le 7 février 1987, il n’y eut aucune célébration de la chute de la dictature des Duvalier, un an plus tôt, avec un mouvement de répression orchestrée par le Conseil national de gouvernement (Cng), mis en place par la communauté internationale le 7 février 1986.
Le dimanche 7 février 1988, à la suite d’élections controversées du dimanche 17 janvier 1988, contrôlées par le Cng, après le massacre sanglant d’électrices et d’électeurs le dimanche 29 novembre 1987, prit le pouvoir Leslie François Manigat, au sein duquel pouvoir exerça son épouse Mirlande Hyppolite Manigat comme sénatrice (du 7 février au 20 juin 1988), jusqu’au renversement, de Leslie Manigat, dans la nuit du dimanche 19 au lundi 20 juin 1988, par un coup d’État organisé par le même Henri Namphy, qui dirigea le Conseil national de gouvernement.
« Un pouvoir politique du 17 janvier 1988, instauré sur le sang de la population », insiste la malice populaire.
Les politiciennes et politiciens se croient investis d’un pouvoir de décider unilatéralement de l’avenir de la nation, en complicité avec la communauté internationale, qui s’oppose à l’autodétermination de la population en voulant imposer des diktats politiques et économiques, témoignent beaucoup de celles et ceux qui ont vécu la chute de la dictature des Duvalier, le 7 février 1986.
Comme l’ancien président de facto Jovenel Moïse, un autre régime de facto, instauré le 20 juillet 2021, à la suite d’un tweet de la communauté internationale, prétend vouloir, sans titre ni qualité, sans mandat ni mission, changer la Constitution du 29 mars 1987, avec le support de la communauté internationale et de politiciennes et politiciens nationaux.
Aujourd’hui, en février 2023, les partis politiques, signataires de la déclaration conjointe du 30 janvier 2023, soulignent la nécessité de créer les conditions sécuritaires, propices à la tenue d’élections inclusives, crédibles et transparentes.
Parmi ces 8 partis politiques, il convient de signaler le Parti haïtien tèt kale (Phtk), qui a contribué, pendant plus de 10 ans, à banaliser toutes les grandes dates historiques importantes en Haïti, à l’instar du vendredi 7 février 1986 et du mardi 12 janvier 2010, quand un tremblement de terre majeur fit plusieurs milliers de morts et blesses, ainsi que d’immenses dégâts matériels en Haïti.
Les scrutins, visant à renouveler le personnel politique, tardent à être réalisés depuis l’année 2021.
A l’origine de ce blocage, les mésententes entre le gouvernement de facto et les secteurs de l’opposition ainsi que l’aggravation du climat de terreur, entretenue, en toute impunité, par les gangs armés en Haïti.
Après avoir unilatéralement décidé de rendre publics leurs noms dans le journal officiel de la république « Le Moniteur », à travers un arrêté daté du 17 janvier 2023, le premier ministre de facto, Ariel Henry, a procédé, ce lundi 6 février 2023, à l’installation, à Port-au-Prince, des trois membres d’un Haut conseil de transition (Hct), dont l’une des missions serait de contribuer à l’organisation d’élections dans le pays.
Il s’agit de Mirlande Hyppolite Manigat (secteur politique), Laurent Saint Cyr (secteur privé) et Calixte Fleuridor (président de la Fédération protestante d’Haïti / Fph, société civile).
Les huit partis politiques déclarent s’engager « à rencontrer d’autres acteurs du secteur politique et des groupes organisés de la société civile, interpellés eux aussi par la situation actuelle et engagés dans une démarche salutaire de restauration et de consolidation des pouvoirs de l’État, par la négociation et le compromis ».
Ils renouvellent leur engagement à privilégier les intérêts supérieurs du pays par rapport aux intérêts et ambitions personnels ou particuliers, liés à la conquête et à l’exercice immédiats du pouvoir.
Le lundi 30 janvier 2023, ce groupe de huit partis politiques a affirmé projeter, en concertation avec des forces vives du pays, de prendre toutes les dispositions urgentes, en vue de parvenir à une solution consensuelle et durable, capable de redresser la situation actuelle en Haïti, dans une déclaration, signée par le coordonnateur général du parti politique Organisation du peuple en lutte (Opl), Edgard Leblanc Fils, au nom de ces 8 partis politiques.
Les dispositions annoncées devraient aider à rétablir la paix et la sécurité pour la reprise des activités en Haïti, selon la déclaration du 30 janvier 2023. [emb rc apr 07/02/2023 13:50]
[1] une loi américaine, qui fait de la prévention des conflits et de la promotion de la stabilité dans les pays, sujets à la violence ou aux conflits généralisés, une priorité de la politique étrangère américaine.