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24 janvier, journée internationale de l’éducation

Crise : Plusieurs syndicats enseignants dressent un sombre tableau du système éducatif en Haïti

P-au-P, 25 janv. 2023 [AlterPresse] --- Il y a une absence d’accompagnement de l’État en faveur du système éducatif en Haïti, piégé par la crise multidimensionnelle, en particulier la montée vertigineuse de la criminalité, déplorent plusieurs syndicats enseignants, joints par l’agence en ligne AlterPresse à l’occasion de la journée internationale de l’éducation, le mardi 24 janvier 2023.

« Investir dans l’humain, faire de l’Éducation une priorité » était le thème retenu pour la journée internationale de l’éducation 2023.

« Notre système éducatif avait déjà ses problèmes, liés notamment à la formation des professeurs, leurs maigres salaires. À cela, s’ajoutent des paramètres extérieurs, qui impactent négativement l’éducation. Celle-ci fonctionne désormais à plusieurs vitesses, en raison de la crise de carburant, de l’insécurité et de la faim », décrit Jean Belens Verdieu, secrétaire général adjoint de l’Association nationale des normalien(ne)s indépendant (e)s d’Haïti (Annih).

Tout en évoquant le déplacement brusque et forcé des écoles et l’impact psychologique de la crise sur les enfants, l’Annih réclame une éducation libératrice et émancipatrice pour tous les enfants du pays.

L’absence de dispositions institutionnelles a contraint le Ministère de l’éducation nationale et de la formation professionnelle (Menfp) à reporter au lundi 3 octobre 2022, la réouverture des classes, initialement prévue pour le lundi 5 septembre 2022.

Cependant, le contexte de grave crise sociale et économique, marquée par un climat de terreur entretenue, en toute impunité, par les gangs armés, sur le territoire national, et la persistance de la rareté des produits pétroliers, entre autres, ont retardé davantage la réouverture globale des classes jusqu’en décembre 2022.

C’est pratiquement dans l’anxiété, la peur au ventre, que les classes ont commencé à fonctionner, sur le territoire national, depuis décembre 2022.

Les parents et professeurs ne cachent pas leurs inquiétudes...

Un nouveau calendrier scolaire remanié, publié le 16 décembre 2022 par le Menfp, a prévu 142 jours de classe pour la période allant de janvier au 4 août 2023.

Le professeur Verdieu appelle l’État à rétablir son autorité, en vue de favoriser la distribution du carburant, et de stopper la criminalité, afin de permettre le bon fonctionnement des écoles.

Pour sa part, l’Union des normaliens et normaliennes, éducateurs, éducatrices d’Haïti (Unnoeh) qualifie de lamentable la situation de l’éducation en Haïti.

L’Unnoeh continue de plaider pour une éducation de qualité et équilibrée.

« Plusieurs milliers d’enfants n’ont pas accès à l’éducation, à cause du phénomène des gangs armés. Il n’y a aucune action de la part des autorités, pour remédier à cette situation et permettre aux enfants de jouir de leur droit à l’éducation, selon la Constitution et les accords internationaux auxquels nous sommes les signataires », relève Izrael Adeka, responsable de communication à l’Unnoeh, qui mentionne aussi les déplacements des professeurs qui sont limités par la criminalité.

Dans le contexte actuel, parler de manière sérieuse de cette commémoration conduit inévitablement à une « réflexion sur la définition de nouvelles perspectives de luttes contre la marchandisation de l’éducation, le manque de considération sociale des enseignants-es résultant de la mauvaise condition enseignante, contre la gangstérisation du pays, l’insécurité planifiée, le kidnapping autorisé, la corruption généralisée et contre le pouvoir corrompu et criminel du Parti haïtien tèt kale (Phtk), qui a considérablement diminué la part du budget national consacrée à l’éducation (de 17% , elle est passée à 11.2%) », écrit l’Union nationale des normaliens/nes d’Haïti (Unnoh), dans une note.

A l’occasion de la journée internationale de l’éducation, le premier ministre de facto, Dr. Ariel Henry, dans une vidéo préenregistrée, a mis l’accent sur « l’importance d’une éducation de qualité pour tous, dans la stabilité et le renforcement des institutions républicaines dans notre pays ».

« L’État, qui a pour rôle de forger une société bâtie avec des hommes et des femmes, capables d’assurer un lendemain meilleur, doit, à cette fin, continuer sans relâche à assumer ses responsabilités », a-t-il avancé.

Or, depuis l’auto-installation du gouvernement de facto d’Ariel Henry, le 21 juillet 2021, à la suite d’un tweet de la communauté internationale, aucune lueur de « stabilité et de renforcement des institutions républicaines en Haïti » n’est constatée.

Au contraire, on assiste à un délitement de plus en plus prononcé et accéléré des institutions nationales, qui n’offrent aucun service public véritable, à commencer par la sécurité des vies et des biens, la libre circulation des personnes et des marchandises, etc.

Le titulaire de facto du Ministère de l’éducation nationale et de la formation professionnelle (Menfp), Nesmy Manigat, a axé ses propos sur « le contexte difficile, dans lequel évoluent de nombreuses institutions scolaires, notamment dans des quartiers difficiles dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince ».

Nesmy Manigat a déclaré saluer les efforts des responsables et personnels éducatifs de ces établissements scolaires, qui prennent des risques au quotidien, dans des zones où règne la violence, afin de répondre aux besoins éducatifs des enfants. [wm emb rc apr 25/01/2023 16:20]