P-au-P, 09 déc. 2022 [AlterPresse] --- Des secteurs expriment des réserves et d’autres se réjouissent suite à l’appel du secteur privé des affaires, lancé en faveur d’une « alliance pour le changement », au lendemain des premières sanctions internationales frappant des hommes d’affaires, selon des déclarations dont a pris connaissance l’agence en ligne AlterPresse.
En réaction à la note du secteur privé des affaires, la Société de Rhum Barbancourt S.A (Srb) dit apprécier l’effort de solidarité et la recherche d’une solution pérenne à la grave crise haïtienne, dans une note.
La signature de la note par la présidente de la Chambre de commerce et d’industrie haïtiano-canadienne (Ccihc) sans consultation préalable des membres du Conseil d’administration tranche avec l’engagement en faveur de la démocratie et du pluralisme prôné par les signataires, regrette-t-elle.
La Srb déplore le fait que cette note a été, à aucun moment, soumise à l’appréciation des membres du Conseil d’administration.
Ces derniers "n’ont pas mandaté, à notre connaissance, la présidente à engager publiquement notre association, fait-elle savoir.
« La Srb ne peut accepter que les entrepreneurs qui, envers et contre tous, s’efforcent de respecter leurs obligations citoyennes envers l’Etat et la communauté soient mis au rang de certains hommes d’affaires délinquants », lit-on dans la note de la Société de Rhum Barbancourt S.A.
A travers une note de presse publiée le jeudi 8 décembre 2022, des organes institutionnels principaux du secteur privé, supportée par plusieurs entreprises et entrepreneurs ont lancé « un appel urgent aux acteurs du pays pour qu’ils résolvent leurs différends sans délai ».
Ils les appellent à signer un accord politique établissant un gouvernement d’unité nationale qui s’efforce d’inclure le plus grand nombre possible d’acteurs avec une feuille de route claire menant à la tenue d’élections honnêtes, transparentes et équitables dans un délai raisonnable.
Ces élections pour renouveler le personnel politique tardent à avoir lieu depuis l’année 2021.
De plus, le climat de terreur généralisée, entretenue, en toute impunité, sur le territoire national, par plusieurs gangs armés ne s’y prête pas alors que le premier ministre de facto, Ariel Henry a promis, en vain, d’organiser les élections au cours de l’année 2022, qui prend fin.
L’assassinat, le mercredi 7 juillet 2021, du président de facto Jovenel Moise a exacerbé davantage la crise politique et économique dans le pays.
Après la visite, fin octobre 2022, d’une délégation du gouvernement du Canada, une nouvelle mission diplomatique canadienne est en Haïti, du mercredi 7 au vendredi 9 décembre 2022, pour compléter les rencontres et les discussions virtuelles qui se déroulent en parallèle, autour de la crise politique.
« La mission, dirigée par Bob Rae, ambassadeur du Canada auprès des Nations unies, visera à favoriser une plus grande unité entre les principaux intervenants, en faveur d’une voie et d’un processus politiques pour des élections démocratiques », a indiqué le Ministère canadien des affaires étrangères, dans une note.
« Nous nous félicitons de l’appel généralisé du secteur privé haïtien en faveur d’un véritable changement dans les pratiques commerciales - promotion de la transparence, concurrence constructive et respect des normes éthiques et juridiques. Nous surveillerons de près le respect de ces mesures dans la pratique », a tweeté le secrétaire d’État adjoint américain pour les affaires de l’hémisphère occidental, Brian A. Nichols.
Les États-Unis ont également adopté des sanctions contre plusieurs personnalités politiques et ont souhaité que le Canada assume un leadership sur le dossier haïtien.
Lors d’une interview, accordée à AlterRadio/AlterPresse, Patrick Joseph, un des porte-parole du Conseil national de transition (Cnt), issu de l’accord de Montana pour une transition de rupture, dit « espérer que ce ne sont pas les pressions étrangères qui ont poussé le secteur privé à prendre pareille position ».
« Une telle démarche du secteur privé est importante par rapport au chaos économique, politique et autres qui sévit en Haïti. C’est une note tardive et surprenante qui a, toutefois, son mérite ».
Cette position du secteur privé n’est pas nouvelle, elle a déjà été proposée par des secteurs conséquents face à la situation désastreuse à laquelle est confrontée le pays, rappelle-t-il.
Mais Patrick Joseph en a profité également pour s’en prendre au secteur privé des affaires qui a pris en otage l’économie du pays, pendant des dizaines d’années.
« Un petit groupe d’hommes d’affaires s’est accaparé de presque toutes les richesses du pays, constituant une bourgeoisie rentière qui investit dans l’importation des produits de première nécessité et non dans la production ».
Le porte-parole du Cnt a aussi dénoncé le manque de scrupules de membres du secteur privé des affaires qui seraient, selon lui, impliqué dans la corruption totale ainsi que l’exploitation à outrance.
De plus, ce secteur ne respecte pas les normes en matière de protection des droits des ouvrières et ouvriers et celles relatives au droit de douane, ajoute-t-il. [emb gp apr 09/12/2022 13:50]
Photo : Des représentants du secteur privé prennent part à une rencontre avec Ariel Henry en décembre 2021 - Officiel