Déclaration d’une quarantaine d’universitaires haïtiens à l’étranger
Document soumis à AlterPresse le 20 novembre 2022
NON À L’OCCUPATION, VIVE UNE HAÏTI LIBRE ET SOUVERAINE, VIVE UNE TRANSITION DE RUPTURE À L’ORDRE NÉOLIBÉRAL DESTRUCTEUR
Nous, universitaires haitien.e.s à l’extérieur du pays, sommes bouleversé.e.s et indigné.e.s à cause de la situation fracassante de notre pays actuellement. Cette situation n’est que le fruit des mauvaises pratiques politiques dominantes dans le pays depuis plus d’une dizaine d’années. Il faut souligner que cette situation catastrophique était prévisible depuis l’intervention de l’OEA et de Core-Group pour imposer leur gouvernement à la tête du pays en 2011. Sans oublier le rôle que jouait la MINUSTAH pour entraîner le pays dans ce gouffre. Massacres, kidnapping, dilapidation de fonds Publiques, répression et violation systématique des droits humains et banalisation de la vie, en voilà les résultats de la décennie du régime PHTK dans la gouvernance du pays. Ce qui explique que, depuis 2011 jusqu’à aujourd’hui plus de 10 milliards de dollars de fonds publics sont dilapidés (CIRH, Petrocaribe, et autres), plus d’une vingtaine de massacres et d’une centaine de femmes et de filles sont victimes de viols entre 2018 et 2022 dans les quartiers populaires, plus d’une centaine d’assassinats issus de divers secteurs restés impunis... Tous ces actes sont l’expression de stratégie politique gouvernementale visant le démantèlement des luttes populaires revendiquant une transformation sociale radicale, pendant que le pays subisse la domination du Core-Group qui est toujours solidaire du régime PHTK. Soulignons que le Core-Group est une menace pour la démocratie en Haïti où certaines ambassades s’érigent, à la place du peuple souverain, en seule acteur de légitimité qui octroient et prennent le pouvoir. L’expression populaire "chavire chodyè" traduit clairement la volonté du peuple haïtien de faire une rupture drastique avec ces pratiques politiques hégémoniques dans le pays depuis un certain temps.
La présence de la MINUSTAH, de la MINUJUSTH et du BINUH qui avaient pour mission de détruire les gangs armés, stabiliser le pays et renforcer les institutions, n’ont fait qu’aggraver la situation du pays, les institutions sont démantelées par le régime PHTK et le pays est gangstérisé. D’ailleurs, la représentante de la BINUH en Haïti, Helen Lalime a déclaré qu’avec la fédération des gangs armés (G-9 en famille et alliés : PHTK-CORE GROUP ET ALLIÉS) le taux du kidnapping a baissé dans le pays. Après l’assassinat de Jovenel Moïse, le Core-Group a imposé Ariel Henri comme Premier ministre, les pratiques politiques demeurent inchangées sinon le renforcement de ces mêmes pratiques politiques par certains anciens opposants. Au lieu de donner une nouvelle orientation au pays, la situation du pays s’aggrave.
En moins d’une année, le gouvernement illégitime a augmenté le prix du carburant à deux reprises. La dernière décision sous la dictée de FMI fut la pire, car c’est une augmentation de plus de 100% dans un contexte socioéconomique où le peuple haïtien ne sait à quel saint se vouer à cause des prix faramineux des prix des produits de première nécessité. Cette décision antipopulaire a bloqué systématiquement le fonctionnement du pays : les écoles, les hôpitaux, les universités et autres institutions sont fermés, les gangs gagnent du terrain, le peuple s’est enfoncé dans la précarité et la misère atroce. Ce gouvernement illégitime et illégal dont la population exige la démission a fait preuve de son incapacité à diriger en demandant aux nouveaux « colons blancs » d’envoyer une force militaire multinationale au pays pour renforcer la domination impérialiste coloniale imposée au pays depuis 1915, protéger son pouvoir et les intérêts des oligarques. Il s’agit d’une trahison contre la constitution haïtienne, contre le peuple haïtien ainsi que son histoire. Jusque-là toute occupation militaire qu’a connue le pays n’a fait que le déstabiliser, en augmentant la misère, en perpétrant des massacres contre les classes populaires. Il est donc inconcevable et inacceptable que les instigateurs et producteurs de la situation macabre du pays s’arrogent le droit de prétendre avoir la solution, toute solution issue de leur part ne sera que cosmétique et désastreuse pour le peuple souverain.
Enfin, nous les signataires de cette note, nous demeurons solidaires avec le peuple haïtien dans ses revendications exigeant une transition de rupture. Nous condamnons toute idée de renforcement de la domination du pays par des forces militaires multinationales. Nous croyons que la solution de la crise haïtienne se trouve entre les mains des acteurs-trices politiques et ceux de la société civile haïtienne. Nous encourageons les acteurs-trices politiques et la société civile du pays à se mettre à la hauteur pour trouver une solution à la crise et trouver un consensus pouvant permettre le fonctionnement et le renforcement des institutions aptes à répondre aux défis et aux revendications du contexte. En ce sens, nous sommes solidaires à toute initiative haïtienne libre et autonome pour établir une transition de rupture pour créer les conditions nécessaires afin que le peuple haïtien puisse vivre dans la paix et la dignité.
Vive l’autodétermination du peuple Haïtien !
20 novembre 2022
Signataires :
Walner Osna Université d’Ottawa/ Sociologie
Jean Bernard Jean Jean Louis UFC-Géographie
Fritz-son Lalane Université d’Ottawa/ Sociologie
Fritznel Honneur Universidade Federal da Integração/Antropologia
Magalie Civil Université d’Ottawa/ Sociologie
Pierre Ronsard Brunache Université Paris Sorbonne/ Clinique et Psychopathologie
Dana Richemé Université Paris Cité/ Sociologie
Guerchang Bastia Université Paris 8/ Urbanisme et Aménagement
Johny Gene Merilus Université Lumière,Lyon II/ Sociologie
John R. Gougueder Jean Universidade Federal da Bahia/ Servicio social
Wilsot Louis Université Paris Cité/Sociologie
Milcar Jeff Dorce Université de Bordeaux/ Droit International Public
Jeanne Elsa Chery Université Paris 8/ Etudes sur le Genre
Feguenson Hermogene Escuela Internationale de Cine y TV de Cuba
Mackenson Beauvais Universidade Federal da Bahia/ História
John Yvelet Charelus Université Québec à Montréal(UQAM)/ Sociologie
Luder Providence Universidad Bolivariana de Venezuela/ Economía Política
Riguender Util Université d’Ottawa/Sociologie
Mackenson Jean Université d’Ottawa/Géographie Anthropocène
Harry Moïse Ecole Pratique des Hautes Études/ Sociologie
Job Paul Universidade Federal da Bahia/Relações Internacionais
Jean Nephetaly Michel Université d’Ottawa/ Sociologie
Mayens Mesidor Université Paris 8/Géographie
Bergomy Hercules Université Sorbonne Paris Nord/Géographie
Wislene Dumesle Université d’Ottawa/Sociologie
Jean-Carlot Milien Université Paris 8/Géographie
Jean James J.J Rolph Université de Guyane/Interculturalité
Moïse Eugène Université Lyon 2/Sociologie
Dieulin Ostavien Ecole d’Urbanisme de Paris/ Urbanisme
Robert Barbier Université de Lille/Histoire du droit et des institutions
Brunel Derilus John Jay College of Criminal JusticeNew York/Sociology
Handy Leroy Université d’Ottawa/Travail Social
Dieubert Charlestin Université d’Ottawa/Sociologie
Baudelaire Julien Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales/ Sociologie
Melissa. C Raymond Université d’Ottawa/Sociologie
Wisner Baguidy Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales/ Anthropologie
Evenold Sénat Université d’Ottawa/ Sociologie
Wilkenson Jules Université d’Ottawa/Sociologie
Nickson Pierre-Louis Universidad Nacional de Entre Rios/Agronomia
Taniola Jean Felix Universidad Nacional de la Plata/ Medecine
Djeansy Djarny E. Toussaint Universidade Federal de São Paulo/Engenheiro Químico
Dieumann Nicolas Université d’Ottawa/Sociologie
Michel-Ange Pierre Université d’Ottawa/Travail social