P-au-P., 17 oct. 2022 [AlterPresse] --- La « solution haïtienne ne suffit plus » pour faire face à la crise qui secoue Haïti, a fait valoir la représentante spéciale du secrétaire général des Nations-unies, l’Américaine Helen Meagher La Lime, cheffe du Bureau intégré de l’Onu en Haïti (Binuh), lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (Onu), le lundi 17 octobre 2022, à New York, selon les informations rassemblées par l’agence en ligne AlterPresse.
Au cours de cette réunion, suivie par AlterPresse, La Lime a dressé un tableau catastrophique de la situation dans le pays, notamment du point de vue sécuritaire et sanitaire, et a appelé le Conseil de sécurité de l’Onu à traiter en « toute urgence » la requête du gouvernement haïtien en faveur d’une intervention étrangère armée.
Pour elle, il faut une action décisive contre la violence et la corruption, afin de pouvoir adresser les problèmes humanitaires, aggravés par la résurgence, début octobre 2022, de l’épidémie de choléra ayant déjà fait au moins 25 morts, parmi des dizaines de cas confirmés, tandis que des centaines de cas suspects sont répertoriés.
Entre-temps, s’alarme la cheffe du Binuh, les gangs armés continuent de bloquer le terminal de Varreux , dans la commune de Cité Soleil (au nord de Port-au-Prince), où est stockée la majeure partie du carburant en Haïti.
En outre, la pénurie d’essence affecte maintenant la mobilité de la police, pendant que la violence tourmente terriblement le pays.
Près d’un millier d’enlèvements ont été signalés depuis le début de l’année 2022, et l’insécurité est telle qu’elle empêche des millions d’enfants de se rendre à l’école, rapporte Helen La Lime.
« Des quartiers entiers sont isolés, des familles sont victimes d’extorsions ou brûlées vives dans l’incendie de leurs maisons », précise-t-elle.
Elle souligne combien la violence armée entrave la réponse humanitaire au choléra et à l’insécurité alimentaire, qui menace 4,7 millions de personnes.
Défis majeurs
Intervenant à la réunion du Conseil de sécurité de l’Onu, le titulaire de facto du Ministère des affaires étrangères, Jean Victor Généus, a fait écho au rapport de La Lime, relevant cette fois-ci (contrairement à ses déclarations du lundi 26 septembre 2022), combien Haïti est confrontée à des défis sécuritaires, politiques, économiques et sociaux majeurs.
« La crise humanitaire et la résurgence du choléra aggravent encore la situation ».
Généus a, lui aussi, appelé « la communauté internationale, y compris les membres du Conseil de sécurité de l’Onu, à examiner d’urgence la demande du gouvernement, afin de nous aider à faire face à la crise ».
Le chef de la diplomatie haïtienne a fait savoir que des élections générales seraient organisées à travers le pays, dès que les conditions sécuritaires le permettraient.
Propositions américano-mexicaines
La requête haïtienne bénéficie du plein appui des États-Unis d’Amérique et du Mexique.
L’ambassadrice des États-Unis à l’Onu, Linda Thomas-Greenfield, a déclaré, devant le Conseil de sécurité de l’Onu, que son pays et le Mexique présenteraient deux projets de résolution au Conseil, l’un imposant des sanctions financières aux acteurs criminels et l’autre autorisant une mission internationale d’assistance à la sécurité non onusienne.
Cette résolution, a-t-elle dit, « proposera une mission limitée, soigneusement délimitée, non onusienne, dirigée par un pays partenaire ayant l’expérience nécessaire pour qu’un tel effort soit efficace ».
Elle a ajouté que les États-Unis « examineront les moyens les plus efficaces pour la soutenir et la financer directement ».
Le Mexique a souligner la nécessité d’une réponse « efficace » à la crise actuelle, en évitant de « reproduire les erreurs du passé ».
Le Mexique a, en même temps, fait part de sa disposition à aider au renforcement des Forces armées d’Haïti, reconstituées durant la présidence de Jovenel Moïse, assassiné en juillet 2021.
Échec des pourparlers politique et démarches de reprise du dialogue
Une solution politique, dans la crise haïtienne, reste hors d’atteinte, tant qu’une action décisive n’est pas entreprise par le Conseil de sécurité de l’Onu pour lutter contre l’insécurité et la corruption en Haïti, déclare la représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies.
Elle a reconnu l’échec d’une initiative de pourparlers, engagés depuis août 2022 entre les représentants de la société civile et les différents blocs politiques.
Cependant, a-t-elle dit, les bons offices des Nations unies restent plus nécessaires que jamais.
Elle a annoncé qu’une nouvelle initiative de dialogue est en train d’être mise en place par la société civile.
Alors que se tenait la réunion du Conseil de sécurité de l’Onu, plusieurs milliers de manifestantes et manifestants, dont des militants politiques, ont défilé dans les rues de la capitale, Port-au-Prince, et dans les villes en province, ce lundi 17 octobre 2022, pour demander le départ du premier ministre de facto, Ariel Henry.
Ces manifestations anti-gouvernementales ont été organisées à l’occasion du 216e anniversaire (17 octobre 1806 - 17 octobre 2022) de l’assassinat de l’empereur Jean Jacques Dessalines, père fondateur de la nation haïtienne. [apr 17/10/2022 23:00]