Par le Regroupement des Haïtiens de Montréal contre l’occupation d’Haïti (Rehmonco)
Soumis à AlterPresse le 29 août 2022
Le Rehmonco, une fois de plus, dénonce et condamne fermement la sanglante répression de la Police nationale d’Haïti (Pnh) contre les manifestants et les manifestantes dans différentes villes du pays, notamment à Port-au-Prince, le lundi 22 août 2022, à l’occasion de l’anniversaire du soulèvement général des esclaves de Saint-Domingue en 1791. Au lieu d’assurer la sécurité des manifestants et des manifestantes, les agents de la Pnh ont ouvert le feu à bout portant sur la foule, faisant au moins trois morts et plusieurs blessés.
Soulignons que cette répression barbare de la police survient après une succession de massacres dans les quartiers populaires de l’aire métropolitaine de Port-au-Prince et une avalanche d’actes d’enlèvements contre rançons, depuis plusieurs années.
Ces massacres sont au nombre de 16, dont le dernier en date a fait plus de 300 morts à Cité Soleil et autant de blessés, sans compter la kyrielle d’enfants orphelins livrés à eux et elles-mêmes [1] .
Des actes de viol collectif y ont été commis contre plusieurs dizaines de femmes, dont des mineures [2] . En outre, plusieurs milliers de personnes ont fui leurs maisons, pour échapper à la monstruosité des gangs.
Selon plusieurs rapports d’organismes de droits humains, dont le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), ces massacres sont réalisés avec la complicité et l’appui logistique de l’État haïtien [3].
Dans le cas de Cité Soleil, les équipements du Centre national des équipements (Cne) et certaines unités de la police nationale ont été utilisés pour détruire les maisons des habitants [4]. .
Il faut également souligner que ces massacres sont l’œuvre des gangs lourdement armés, dont plusieurs sont dirigés par des (anciens) policiers. La fédération des gangs (G9 et familles et alliés) est dirigée par l’ancien policier Jimmy Chérizier, connu sous le nom de « Barbecue ». Elle a été créée sous l’égide du gouvernement de Jovenel Moise en 2020 [5] . C’est l’un des plus puissants regroupements de gangs dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince. Il y a également l’ancien policier Alex Amstrong Durmorné, qui dirige un gang dans la localité de Bristou, dans la périphérie de Pétionville [6] .
Ce sont des exemples, parmi d’autres, illustrant le fait que plusieurs policiers se sont transformés en gangs ou se sont mis à leur service.
Par ailleurs, en dehors d’actions faibles, sporadiques et sans suite, afin de montrer qu’ils font quelque chose, l’État haïtien, en général, et la Police nationale d’Haïti, en particulier, ne font montre d’aucune volonté, ni de détermination à combattre les gangs armés. Ils mettent de l’avant souvent le prétexte de sous-équipements, alors que certains matériels de l’institution policière se trouvent souvent entre les mains des gangs.
Parallèlement à cette terreur, minutieusement instaurée dans le pays, un ensemble de pratiques d’extorsion économique se développent contre les classes opprimées et les masses populaires.
La plus visible est la stratégie du gouvernement et de la classe dominante de créer périodiquement des raretés, pour faciliter l’augmentation des prix des produits de grande consommation. C’est le cas de la rareté de l’essence, que l’on observe régulièrement dans le pays, alors qu’il n’y a pas de rupture de stock dans les grands centres de stockage. Cette rareté, habillement programmée par les autorités de l’État, qui devraient, en principe, assurer le respect de la loi, contraint la population à payer plus du double, parfois le triple du prix officiel dans des circuits illégaux. L’essence étant un produit transversal, sa rareté aggrave l’inflation générale, qui se trouvait déjà à un niveau inacceptable.
C’est dans ce contexte d’extorsion économique à grande échelle et de terreur des gangs que la Police nationale d’Haïti s’en prend brutalement à la population. Elle tire sur les gens à bout portant, utilise des gaz lacrymogènes, des coups de matraques, pour écraser les manifestantes et les manifestants. Elle fait montre d’une grande efficacité à empêcher les classes opprimées à exprimer leur ras-le-bol face à l’insécurité, l’inflation et la misère. Ce qui montre clairement que, lorsqu’il s’agit d’exercer la répression contre le peuple, la police n’est pas dépourvue d’équipements !
Le Rehmonco salue la mémoire des milliers de victimes de la répression policière et des gangs criminels. Il en profite également pour encourager les classes opprimées à poursuivre la mobilisation contre la terreur et l’extorsion économique, minutieusement planifiée par le régime du Parti haïtien tèt kale (Phtk) et la classe dominante. Cette répression politique et économique constitue, en fait, une nouvelle occasion d’affaires pour la bourgeoisie haïtienne, largement soutenue par l’impérialisme. C’est la lutte de classes, qui se poursuit.
Aujourd’hui, il est évident que toutes les tentatives de réformer l’État haïtien, depuis la chute de la dictature, ont échoué. Les classes opprimées doivent s’organiser de façon autonome et engager la lutte pour la construction d’un État national au service du peuple.
Pour authentification,
Renel Exentus,
Frank W. Joseph
Montréal, le 29 août 2022
Contact : rehmoncohaiti1915@gmail.com
[1] Il est difficile de déterminer le dernier en date vraiment dans la mesure où les massacres et carnages se produisent presqu’au quotidien. Voir le lien suivant concernant un autre carnage à Croix-des-Bouquets : https://lenouvelliste.com/article/237696/nouveau-carnage-a-croix-des-bouquets
[2] Pour de plus amples détails, voir le lien suivant : https://www.alterpresse.org/spip.php?article28537
[3] Voir les rapports sur le massacre dans les liens suivants : https://web.rnddh.org/wp-content/uploads/2022/07/2-CP-Cite-Soleil-FR-13Juil2022.pdf;https://metropole.ht/300-morts-et-400-blesses-a-cite-soleil-selon-le-rnddh/
[4] Voir les liens suivants : https://www.alterpresse.org/spip.php?article28537,https://www.alterpresse.org/spip.php?article28436
[5] Voir le lien suivant : https://www.gazettehaiti.com/index.php/node/1949
[6] Voir également les liens suivants : https://haiti24.net/le-chef-de-gang-alex-amstrong-dumorne-recherche-par-la-pnh/;https://fr-ca.facebook.com/pnh.ht