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Criminalité : Le Rnddh dénonce la complicité de l’État dans le carnage, du 24 avril au 6 mai 2022, à La Plaine du Cul-de-sac

Au mois 191 personnes assassinées par des gangs armés en 13 jours / Au mois 158 enfants devenus orphelins

Par le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), 27 juin 2022

Transmis à AlterPresse le 27 juin 2022

Ce document a été réalisé dans le cadre du projet « Accès à la justice et lutte contre l’impunité en Haïti »,mis en œuvre par Avocats sans frontières Canada (Asfc) et ses partenaires. Le contenu de ce document relève de la seule responsabilité du Rnddh et ne reflète pas nécessairement les points de vue d’Asfc.

Carnage à la Plaine du Cul-de-Sac : Les survivants-tes exigent un accompagnement de l’État

Résumé

1. Du 24 avril au 6 mai 2022, le gang armé des 400 Mawozo a attaqué la base des Chen Mechan dans son fief, à la Croix-des-Missions. Au cours d’affrontements violents, qui s’en sont suivis, 191 personnes ont été assassinées soit 107 hommes, 76 femmes, 6 filles et 2 garçons. Au moins 18 femmes ont été violées. 17 d’entre elles ont été exécutées par la suite. 81 maisons et 57 véhicules au moins ont été incendiés. De nombreuses personnes ont été blessées par balles ou à l’arme blanche et 158 enfants sont devenus orphelins.

2. Parmi les personnes tuées, 48 ont été présentées au Rnddh comme étant des membres ou des proches de l’un des gangs armés qui s’affrontaient.

3. Outre ces pertes humaines et matérielles, enregistrées au cours de ce carnage, des parents ont assisté à l’exécution de leurs progénitures, d’autres ont été assassinés en présence de leurs enfants, dont la plupart sont en bas âge. De nombreuses personnes ont été obligées d’abandonner leurs proches et, au moins un conjoint a assisté aux viols répétés de sa compagne.

4. En date du 10 mai 2022, le Rnddh avait publié un rapport préliminaire, qui n’avait retracé que les faits et campé le profil des protagonistes. Aujourd’hui, par cette nouvelle publication, le Rnddh tient à relater les témoignages des victimes survivantes, dans le but de faire la lumière sur la fureur, avec laquelle les bandits armés se sont attaqués à la population et les actions entreprises par les autorités policières et judiciaires.

5. Sur ce point justement, les autorités policières ont affirmé avoir mené plusieurs opérations dans la zone et procédé à l’arrestation de quelques individus, impliqués dans ce carnage. Pour leur part, 2 mois après, les autorités judiciaires ne peuvent toujours pas fournir d’informations précises sur les actions entreprises par elles, en vue de mettre l’action publique en mouvement à l’encontre des bandits armés impliqués dans ce carnage, dont des chefs de gangs armés très connus.

6. Aujourd’hui, la situation reste et demeure tendue à la Plaine du Cul-de-Sac : les personnes déplacées, qui s’étaient réfugiées sur la place publique de Clercine, sont pressurées par les autorités locales pour laisser la place. Elles ne savent où aller, ayant, pour la plupart, perdu tout ce qu’elles possédaient. La base des Chen Mechan continue d’exécuter des jeunes, sous prétexte qu’ils servent d’antenne au gang armé des 400 Mawozo.

7. Sur la base des résultats de son enquête, le Rnddh recommande aux autorités concernées de :

• Fournir un accompagnement financier, médical et psychologique aux survivants-tes du Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac ;

• Porter la Dcpj à enquêter sur les actes attentatoires aux vies et aux biens, perpétrés à la Plaine du Cul-de-Sac, du 24 avril au 6 mai 2022, en vue de transmettre aux autorités judiciaires un rapport circonstancié, pour la mise en mouvement de l’action publique à l’encontre de tous ceux qui y sont impliqués ;

• Porter la Dcpj à enquêter sur les relations de proximité existantes entre certains journalistes, des personnalités publiques et des bandits armés ;

• Porter l’IgPnh à enquêter sur l’implication de matériels et équipements policiers - notamment de l’Udmo - dans la perpétration du Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac ;

• Mettre fin aux distributions des armes et munitions aux bandits armés ;

• Remettre en place les brigades anti-contrebande, en vue de freiner l’entrée, sur le territoire national, des armes et munitions illégales.

I. INTRODUCTION

1. Du 24 avril au 6 mai 2022, une violente guerre – qu’il convient désormais de nommer le Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac – a éclaté entre le gang des 400 Mawozo et la base des Chen Mechan.

2. Dans un rapport préliminaire, rendu public, en date du 10 mai 2022, par le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), le déroulement de l’attaque a été reconstitué et un bilan partiel des victimes a été présenté. Le Rnddh a, cependant, continué avec ses investigations, en accordant une attention particulière aux circonstances, dans lesquelles les violations massives aux droits humains, enregistrées, ont été perpétrées par les bandits armés.

3. Aujourd’hui, le Rnddh se propose de partager avec l’opinion publique les informations additionnelles recueillies dans le cadre de son enquête.

II. METHODOLOGIE

4. Pour réaliser ce travail, le Rnddh s’est entretenu avec les responsables :

• Des commissariats de la Croix-des-Bouquets et de Tabarre :

• Du Parquet près le Tribunal de première instance de la Croix-des-Bouquets ;

• Des Tribunaux de paix de la Croix-des-Missions et de la Croix-des-Bouquets ;

• De l’Inspection générale de la Police nationale d’Haïti (Pnh) ;

• De la Direction départementale de l’Ouest ;

• De la Direction centrale de la police administrative (Dpac) ;

• De la Direction centrale de la police judiciaire (Dcpj).

5. De plus, le Rnddh a recueilli les témoignages de deux-cent-huit (208) victimes
survivantes du Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac, lors d’entretiens effectués durant la période allant du 26 avril au 7 juin 2022.

III. RAPPEL DES EVENEMENTS ENREGISTRES

6. Les 22 et 23 avril 2022, la tension était palpable dans plusieurs zones de La Plaine du Cul-de-Sac. Cette tension était engendrée, d’une part, par l’exécution d’un agent de la police en date du 22 avril 2022, à Shada, par des bandits de la base des Chen Mechan. D’autre part, elle était alimentée, au lendemain de cet assassinat, par des tirs nourris d’armes automatiques entendus dans la zone.

7. Cependant, les attaques armées ont réellement commencé le 24 avril 2022, peu avant 5 heures du matin. Ce jour-là, des bandits armés, membres du gang des 400 Mawozo et portant des T-Shirts avec l’inscription de leur gang armé, montés à bord de motocyclettes, d’autobus et de camionnettes, se sont déployés simultanément dans plusieurs zones de la Plaine du Cul-de-Sac, notamment à Michaud, Butte Boyer, Rue Mapou prolongée et à Marécage. Ils ont alors commencé
à attaquer la population civile. Ils se sont introduits dans des maisons, ont tué les personnes rencontrées sur place et ont mis feu dans les zones prises pour cibles.

8. Au cours de la deuxième partie de la journée du 24 avril 2022, des membres du G-9 An Fanmi e Alye, montés à bord de plusieurs véhicules, dont un (1) blindé de la Pnh affecté au service de l’Unité départementale pour le maintien de l’ordre (Udmo), ont prêté main forte à la base des Chen Mechan.

9. A partir du moment, où les bandits armés du G-9 An Fanmi e Alye sont arrivés, les bandits de la base des Chen Mechan ont aussi commencé à s’attaquer à la population. Alors, des membres de la communauté ont été traqués chez eux. Certains bandits armés disposaient même de listes de personnes à éliminer. Si ceux des 400 Mawozo recherchaient les personnes, qui peuvent fournir un support financier et économique à la base des Chen Mechan, les bandits des Chen
Mechan
recherchaient, pour leur part, des personnes qui, dans la communauté, se sont toujours insurgées contre leurs agissements.

10. Les corps des personnes assassinées ont été jetés dans des puits d’eau et dans des latrines. Des cadavres ont été hachés en menus morceaux. D’autres ont été carbonisés. Quelques-uns ont aussi été jetés dans la Rivière Grise.

IV. BILAN DETAILLE DES EVENEMENTS ENREGISTRES

Les pertes humaines et matérielles sont incommensurables.

11. Le présent bilan révise à la hausse les données, qui avaient été recueillies par le Rnddh et présentées dans le rapport préliminaire. Il fournit aussi les détails relatifs aux circonstances, dans lesquelles ces personnes ont été victimes.

12. Au moins cent-quatre-vingt-onze (191) personnes ont été assassinées, lors des attaques armées perpétrées par le gang des 400 Mawozo, dans le fief des Chen Mechan. Les victimes se répartissent comme suit :

Cent-sept (107) hommes, soixante-seize (76) femmes, six (6) filles et deux (2) garçons.

Vingt-neuf (29) parmi les victimes étaient âgées de soixante (60) ans et plus, parmi elles dix-neuf (19) femmes et dix (10) hommes.

Trente-huit (38) victimes au moins, soit quatorze (14) de sexe féminin et vingt-quatre (24) de sexe masculin, ont péri dans le feu mis à leur maison, par les bandits armés.

13. Suite à ce carnage, cent-cinquante-huit (158) enfants au moins sont devenus orphelins de père, de mère ou de leurs deux (2) parents.

14. De plus, parmi les victimes recensées, au moins quarante-huit (48) ont été présentées au Rnddh comme étant membres des gangs armés, qui s’affrontaient.

A. Personnes assassinées présentées comme faisant partie de la population civile

15. Le Rnddh a pu recueillir les récits pour cent-quatre-vingt-six (186), parmi les cent-quatre-vingt-onze (191) personnes assassinées :

16. Le 24 avril 2022, Mislène NOISETTE, née le 16 juillet 1969 et mère de deux (2) filles, se trouvait chez elle à la Croix-des-Missions, lorsque la zone a été prise d’assaut par des bandits armés. Elle n’a pas voulu laisser sa maison avec les autres membres de sa famille. Elle a été assassinée ;

17. Le 24 avril 2022, Fritzmond NOISETTE, âgé de quarante-neuf (49) ans, père de trois (3) enfants, se trouvait chez lui au # 12, Ti Ginen, Croix-des-Missions, lorsqu’il a été carbonisé. Il était malade et ne pouvait se déplacer seul. Sa fille, qui se trouvait aussi dans la maison, a eu le temps de prendre la fuite. Les bandits armés ont mis feu à la maison, alors que Fritzmond NOISETTE était à l’intérieur ;

18. Le 24 avril 2022, Arioly FRANCIQUE, âgé de quarante-cinq (45) ans, a été tué par balles, dans sa maison à Butte Boyer, en présence de ses trois (3) enfants, âgés respectivement de onze (11) ans, sept (7) ans et de trois (3) ans. Ayant été informée de cet assassinat, une des sœurs de la victime a pu récupérer les enfants, mais a dû abandonner le cadavre dans la maison ;

19. Le 24 avril 2022, Ernst SANON, âgée de soixante-dix (70) ans, a été décapité puis calciné, en présence de sa conjointe, à l’intérieur même de leur maison située à Butte Boyer. Par la suite, les bandits ont catégoriquement refusé de remettre le cadavre aux proches de la victime. Ils l’ont calciné ;

20. Le 24 avril 2022, Jean Wilbert JEAN-LOUIS alias Titi, né le 25 septembre 1974 dans la localité de Cochon Gras dans le département du Sud-Est, âgé de quarante-huit (48) ans et père d’un (1) garçon, a été assassiné, puis calciné à la Croix-des-Missions, zone Anba Mapou ;

21. Le 24 avril 2022, vers 12 heures, Marthe CLERISIER a succombé à une crise cardiaque, à cause des détonations des armes à feu ;

22. Le 24 avril 2022, Tanya EMMANUEL, âgée de trente-quatre (34) ans et mère de deux enfants, a été tuée chez elle, non loin de carrefour Shada ;

23. Le 24 avril 2022, Christiane NOATERE, âgée de soixante-huit (68) ans et mère de six (6) enfants, se trouvait chez elle à Anba Mapou, à la Croix-des-Missions, lorsqu’elle a été tuée ;

24. Les 23 et 24 avril 2022, Roseline BERNARD, fille de Christiane NOATERE enceinte de six (6) mois, a perdu son conjoint, son fils de treize (13) ans ainsi que sa mère. En effet, son conjoint Wilfrid LECILIEN, né le 19 juin 1979, père de deux (2) enfants, a été tué par balles, alors qu’il entrait chez lui à la Croix-des-Missions. Son fils Juvens Lécilien, né le 10 mars 2009, a été tué à Carrefour Shada et sa mère Christiane NOATERE, née le 9 janvier 1954, a été tuée chez elle ;

25. Le 24 avril 2022, Julenerson PIERRE-LOUIS, âgé de trente-sept (37) ans, et père d’un (1) enfant de huit (8) ans, a été brûlé vif à l’intérieur de sa maison, à Butte Boyer ;

26. Le 24 avril 2022, Loubens ALEXIS était chez lui, à Butte Boyer, lorsque les attaques ont commencé. En tentant de fuir la zone, il a été surpris par des bandits, qui l’ont tué, avant de mettre feu à ses restes ;

27. Le 24 avril 2022, Mercilia ADELSON, âgé de quatre-vingt-trois (83) ans, se trouvait chez elle, à la Croix-des-Missions, zone Anba Mapou, # 3, lorsque l’attaque a été enregistrée. Très âgée et ne jouissant plus de toutes ses facultés physiques et cognitives, elle n’a pu s’enfuir. Elle a été brûlée à l’intérieur de la maison ;

28. Le 24 avril 2022, Odette GUERRIER, âgée de soixante-quinze (75) ans, était chez elle, à la Croix-des-Missions, non loin du Tribunal de paix, accompagnée de sa fille Cherlie LAMANDIEU et de ses deux (2) petites filles, lorsque les attaques ont commencé. Dans un premier temps, elles se sont abritées, mais, alors que les tirs s’intensifiaient, elles ont décidé de prendre la fuite, comme de nombreux riverains. Cherlie LAMANDIEU est sortie de chez elle avec ses deux (2) filles. Sa mère Odette GUERRIER, très malade et ne pouvant se déplacer seule, a été secourue par un voisin. Cependant, ce dernier a dû l’abandonner en cours de route ; Son cadavre n’a jamais été retrouvé ;

29. Le 24 avril 2022, Willy BIEN AIMÉ, âgé de quarante-sept (47) ans, sa conjointe Dieulina FANFAN, âgée de trente-six (36) ans et sa fille Belinda BIEN AIMÉ, âgée de dix (10) ans, ont tous été tués à Anba Mapou, dans la Croix-des-Missions ;

30. Le 24 avril 2022, Lina JEAN, âgée de cinquante-trois (53) ans et mère de deux (2) enfants, a été tuée à Butte Boyer ;

31. Le 24 avril 2022, Occelin JOSEPH, âgé de trente-neuf (39) ans, père de deux (2) enfants, se trouvait chez lui, au moment de l’attaque. Ne pouvant échapper à la fureur des gangs, à cause d’un handicap par suite d’un accident de motocyclette, il est resté coincé dans sa maison, qui a été incendiée. Son cadavre n’a jamais été retrouvé. Les enfants sont avec leur mère ;

32. Le 24 avril 2022, Cia GABRIEL, âgée de cinquante (50) ans et sa petite fille Ciara ALEXIS, âgée de neuf (9) ans, ont été brûlées vives chez elles à Butte Boyer. Au moment de l’attaque, croyant bien faire, elles se sont barricadées chez elles. Les bandits armés ont alors mis feu à la maison. Cia GABRIEL était mère de deux (2) enfants ;

33. Lors de l’attaque du 24 avril 2022, Steeven et Simon, deux (2) frères âgés respectivement de vingt-trois (23) et vingt (20) ans, originaires d’Anse-à-Foleur, installés dans la capitale pour poursuivre leurs études supérieures, se trouvaient chez eux. Ils ont été tués, hachés puis carbonisés à l’intérieur de la maison, qui a été incendiée. Leur cousin, qui se trouvait chez eux, a eu le temps de s’enfuir. Les bandits ont tiré dans sa direction, mais il n’a pas été atteint. Steeven et Simon habitaient au # 56, impasse François, Butte Boyer ;

34. Le 24 avril 2022, Pierre-Marie SILOME, âgé de cinquante (50) ans, a été blessé par balle à Butte Boyer. Il est décédé le 4 mai 2022 chez des proches à Cité Militaire, des suites de ses blessures. Il était père de deux (2) enfants, dont l’un réside en République Dominicaine ;

35. Le 24 avril 2022, dans la matinée, Ghislaine PIERRE, âgée de quarante-deux (42) ans, a été tuée chez elle à la Croix-des-Missions. Selon les témoignages de sa nièce, Ghislaine PIERRE n’a pas eu le temps de prendre la fuite, lorsque les bandits ont pris d’assaut sa zone de résidence. Son corps n’a pas été retrouvé par sa famille ;

36. Le 24 avril 2022, Jacqueline MARTIN, âgée de soixante-deux (62) ans, a été capturée à Butte Boyer par des bandits, qui l’ont tuée, avant de mettre feu à son cadavre ;

37. Le 24 avril 2022, Kenneth DESROSIERS, âgée de cinquante-cinq (55) ans, mère d’Emmanuel DESROSIERS, âgé de vingt-cinq (25) ans et de Roosevelt DESROSIERS, âgé de vingt-et-un (21) ans, ont tous trois (3) été assassinés. La maison, où habitait cette famille, a été complètement incendiée par les bandits ;

38. Le 24 avril 2022, Germaine SOUFFRANT, née en mars 1954 et mère de trois (3) filles, a été brûlée vive à l’intérieur de sa maison à Butte Boyer. Selon le frère de la victime, elle dormait encore, lorsque les bandits ont mis feu à sa maison ;

39. Le 24 avril 2022, Estimène JEAN, très âgée et mère de six (6) enfants, a été carbonisée dans sa maison ;

40. Paulius JEAN, âgé de vingt-cinq (25) ans, vivait à Lakou 7 Kout Kouto. Sa famille n’a aucune nouvelle de lui, depuis le 24 avril 2022 ;

41. Depuis le 24 avril 2022, Chouma SANON, âgée de trente-cinq (35) ans et Garry SANON, âgé de vingt-cinq (25) ans, sont tous deux (2) portés disparus. Ils vivaient à Shada, avec leur sœur, qui depuis les événements, tente vainement d’entrer en contact avec eux ;

42. Depuis le 24 avril 2022, Pierre Maxo BELDOR, âgé de cinquante-six (56) ans et Davidson BELDOR, né le 30 septembre 1992, sont portés disparus ;

43. Dans la nuit du 23 au 24 avril 2022, Mélody PIERRE a été assassiné à la Croix-des-Missions par des bandits armés, alors qu’il se trouvait chez lui ;

44. Le 24 avril 2022, Herla HENRY, âgée de cinquante-sept (57) ans et mère de deux (2) enfants, a été assassinée. Elle vivait au # 108, Croix-des-Missions, à proximité du Tribunal. Ayant eu une crise de tension, elle était paraplégique et n’a pas pu s’enfuir ; Sa maison a été pillée et elle a été emmenée par les bandits armés. Depuis, la famille n’a aucune information d’elle ;

45. Le 24 avril 2022, Salnave JOSEPH, âgé de soixante-dix (70) ans, a été tué chez lui à Butte Boyer, selon une de ses nièces, qui vivait avec lui depuis plus de dix (10) ans. Leur maison a été complètement incendiée ;

46. Le 24 avril 2022, Elisna DERISTIL, âgée de cinquante-six (56) ans et sa fille Elsie LOUIS, âgée de seize (16) ans, ont été tuées à la Croix-des-Missions, zone Wout Tè. Les victimes vivaient avec une autre des filles de la dame Elisna DERISTIL. Elles essayaient de se sauver, lors de l’attaque, mais n’ont pas réussi ;

47. Le 24 avril 2022 vers 6 heures du matin, Dieuvela JEAN LOUIS, âgée de seize (16) ans, élève de 9e Année fondamentale, était sortie vider les poubelles. A son retour, elle est tombée sur des bandits, qui envahissaient la zone. Elle a été giflée, puis emmenée de force au bord de la Rivière Grise. Elle a été décapitée et son corps carbonisé ; Jacqueson JEAN LOUIS, âgé de trente-huit (38) ans, père de Dieuvela JEAN LOUIS, a lui aussi été tué par balles le même jour. Son corps a été carbonisé à côté de celui de sa fille ;

48. Le 24 avril 2022, Xavier ORÉLUS, âgé de quarante (40) ans et père de trois (3) enfants, a été tué à Butte Boyer ;

49. Le 24 avril 2022, à la Croix-des-Missions, Jean Renel JEAN CHARLES, âgé de vingt-cinq (25) ans, élève de Philo au Lycée François Guy Malary de la Croix-des-Missions, a été assassiné ;

50. Le 24 avril 2022, à Wout Tè # 28, Croix-des-Missions, Therilia Pierre LOUIMA, âgée de soixante-douze (72) ans et mère de six (6) enfants, était chez elle, lorsqu’elle a été assassinée par des bandits armés ;

51. Le 24 avril 2022, Célimène PIERRE, âgée de cinquante-quatre (54) ans et mère de trois (3) enfants, a été brûlée vive à l’intérieur de sa maison à la Croix-des-Missions. Malade, elle n’a pas réussi à s’enfuir et les bandits ont tout simplement mis feu à sa maison ; Felix MONIMA, âgé de vingt-cinq (25) ans, élève de philo, fils de Célimène PIERRE, a aussi été brûlé à l’intérieur de la maison ;

52. Le 24 avril 2022, Junior MICHEL, né le 7 février 1986 et père d’un (1) enfant, a essayé de s’enfuir de sa maison à la Croix-des-Missions. Il a été tué par les bandits armés ;

53. Le 24 avril 2022, Jean THEODAS, âgé de quarante-cinq (45) ans et père de deux (2) enfants, était chez lui à la Croix-des-Missions, lorsque des bandits armés ont envahi la zone. En tentant de prendre la fuite, il a été abattu. Il était accompagné de son fils Jean Nelson THEODAS, âgé de dix-sept (17) ans. Le corps sans vie et ensanglanté de Jean Nelson THEODAS a été retrouvé à Bon Repos, le 26 avril 2022 ;

54. Le 24 avril 2022, Hérold JEAN, âgé de vingt-huit (28) ans et Ricardo GILLES, âgé de dix-neuf (19) ans, ont été brûlés vifs à l’intérieur même de leur maison à Wout Tè, dans la Croix-des-Missions. Leur cousin, qui vivait avec eux, a eu la vie sauve, l’un des bandits ayant demandé aux autres de ne pas le tuer, parce qu’il vit avec une déficience motrice ;

55. Le 24 avril 2022, Chricilien GILOT, âgé de soixante-seize (76) ans et père de sept (7) enfants, vivait avec sa fille à la Croix-des-Missions, zone Anba Mapou # 3. Hypertendu, il a eu deux (2) crises, qui l’ont laissé paraplégique. Il se trouvait chez lui, lorsque des bandits armés ont envahi la zone. Ne pouvant pas bouger, il a demandé à sa fille de se sauver et de le laisser. Il a été brûlé avec sa maison ;

56. Dans la nuit du 24 au 25 avril 2022, Maxo PIERRE se trouvait chez une amie à Wout Tè, quand les tirs ont commencé. Selon cette dernière, Maxo PIERRE a pris sa moto pour rentrer chez lui à Ti Ginen. Cependant, il n’est jamais arrivé à destination et, toutes les tentatives pour le retrouver au téléphone sont restées vaines. Maxo PIERRE était âgé de trente-deux (32) ans ;

57. Le 25 avril 2022, Judith PIERRE, âgée de vingt-huit (28) ans, se trouvait chez elle, à Butte Boyer, lorsque la zone a été prise d’assaut. Elle a été tuée puis calcinée ;

58. Le 25 avril 2022, Robenson JOSEPH, âgé de quarante-deux (42) ans et père de deux (2) enfants, se trouvait à l’intérieur de sa maison, lorsqu’il a été tué, puis calciné ;

59. Dans la matinée du 25 avril 2022, Elysée MONDESIR, né le 16 décembre 1974, père de deux (2) enfants, prenait la fuite, lorsqu’il a été capturé, puis assassiné par des bandits armés portant le T-shirt des 400 Mawozo. Ses enfants ont eu la vie sauve, parce qu’ils s’étaient enfuis dans une direction opposée. Feu a été mis au cadavre d’Elysée MONDESIR ;

60. Le 25 avril 2022, Justin PIERRE, âgé de soixante-neuf (69) ans, a été tué à Carrefour Shada ;

61. Le 25 avril 2022, Jonas PETIT-FRERE se trouvait chez lui dans la localité de Ti Ginen, à Shada, lorsqu’il a été assassiné ;

62. Le 25 avril 2022, Fabiola PHILISTIN, âgée de vingt-cinq (25) ans, a été tuée chez elle à Shada ;

63. Le 25 avril 2022, Beslet FRITZ, né le 23 mars 1996, a été tué à Shada, zone Koridò Djo ;

64. Le 25 avril 2022, Osner JOSEPH, père de cinq (5) enfants, dont deux (2) filles, et Simon ainsi connu, lui-même père de quatre (4) enfants, ont été tués, alors qu’ils tentaient de s’échapper avec des membres de leur famille respective. Selon sa conjointe, Osner JOSEPH a reçu une balle à la tête ;

65. Le 25 avril 2022, Morphée SAINT LOUIS, âgé de cinquante-cinq (55) ans et père de deux (2) enfants, a été tué chez lui. Selon sa fille, il ne voulait pas quitter la maison, qui a été totalement incendiée par les bandits ;

66. Le 25 avril 2022, vers 8 heures du matin, Guy BLANC, âgé de soixante-treize (73) ans, a été tué, puis carbonisé à l’intérieur de sa maison, située à Mapou. Il était père de six (6) enfants ;

67. Le 25 avril 2022, Ericka Samantha JEUDI, âgée de vingt-deux (22) ans, a été tuée chez elle à Butte Boyer ;

68. Le 25 avril 2022, Unel ANDRE, né le 23 avril 1979 et père de trois (3) filles, a été tué à Lakou 7 kout kouto, dans la Croix-des-Missions. Au moment des faits, Unel ANDRE était en compagnie d’un ami, qui, lui aussi, a été tué, puis calciné ;

69. Le 25 avril 2022, à Butte Boyer, Jean LOUIS, âgé de quarante-sept (47) ans, père de cinq (5) enfants, dont trois (3) filles, a été décapité. Ses restes ont été calcinés. Sa sœur, qui habitait aussi la zone, l’avait conseillé de quitter les lieux, au début des attaques. Elle a eu, pour sa part, le temps de s’enfuir avec ses trois (3) enfants, dont un bébé de six (6) mois. N’ayant pas voulu partir, Jean LOUIS a été capturé, décapité à l’aide d’une machette avant d’être carbonisé ;

70. Le 25 avril 2022, Guerson PIERRE, âgé de cinquante (50) ans, a été décapité à l’aide d’une machette. Feu a aussi été mis à ses restes, non loin de sa maison à Butte Boyer. Il était voisin de Jean LOUIS ;

71. Le 25 avril 2022, Gertride ARISTILE, née le 20 janvier 1979 et mère de deux (2) enfants, a été assassinée chez elle à Shada, à la Croix-des-Missions. Ce jour-là, craignant pour sa vie et pour celle de sa fille, elle est sortie de la maison et tentait de s’enfuir, lorsqu’elle a été interceptée par des bandits armés, qui l’ont tuée, avant de mettre feu à son cadavre ;

72. Le 25 avril 2022, Clautilde NEREUS a été tuée. Âgée de quatre-vingts (80) ans et mère de quatre (4) enfants, elle habitait au # 19, Wout Tè, Croix-des-Missions, avec l’un de ses fils. Dans un premier temps, elle avait refusé de quitter sa maison. Cependant, elle a dû changer d’avis en raison de la virulence de l’attaque. En tentant de s’enfuir, elle a reçu une balle au sternum et est morte sur le coup, selon ce qui a été rapporté à ses proches. Par la suite, son cadavre a été jeté dans une des fosses communes creusées par les bandits ;

73. Le 25 avril 2022, Préscile BELLEVUE a été assassinée par balles. Âgée de quatre-vingts (80) ans et mère de trois (3) enfants, elle vivait avec sa nièce à la Croix-des-Missions. Celle-ci ne se trouvait pas chez elle au moment de l’attaque. Ainsi, Préscile BELLEVUE, qui rencontrait des difficultés à marcher toute seule, n’a pu prendre la fuite ;

74. Le 25 avril 2022 à Wout Tè, Madeleine BEMUS, âgée de cinquante-cinq (55) ans, a été carbonisée dans la maison de son fils ;

75. Mariette LAGUERRE vivait à Shada, près de la pompe à essence National. Le 25 avril 2022, des bandits de 400 Mawozo ont pénétré dans sa maison et lui ont tiré une balle à la tête. Elle est morte à soixante (60) ans, laissant derrière elle cinq (5) enfants. Son corps a été mis en terre le 26 avril 2022 à Marin ;

76. Le 25 avril 2022, Leconte VOLTAIRE, né le 15 juin 1990, a été tué. Il vivait à l’impasse La Foi, Butte Boyer. Après s’être caché à l’intérieur de sa maison, durant toute la journée du 24 avril 2022, le lendemain, il tentait de quitter la zone avec sa famille, lorsqu’il a été assassiné ;

77. Le 25 avril 2022, Jean Roudy JEAN, né le 15 juin 1992, mécanicien et père de deux (2) fillettes, a été assassiné. Il travaillait au garage dominicain, situé à Wout Tè. Le jour de son assassinat, il s’était rendu au garage. Sa conjointe n’ayant pas eu de ses nouvelles, tout au long de la journée, est allée le chercher. Arrivée sur les lieux, elle a constaté le cadavre de Jean Roudy JEAN, ensanglanté, devant l’une des voitures qu’il réparait. Les bandits, qui s’y trouvaient encore, lui ont intimé l’ordre de quitter les lieux. Feu a été mis au garage ;

78. Le 25 avril 2022, Julienne JOANIS, son conjoint et leur fils de quatre (4) ans se trouvaient chez eux, à Butte Boyer, lorsque, soudainement, vers 8 heures du matin, une attaque armée a été enregistrée. Le conjoint de Julienne JOANIS a eu le temps de prendre la fuite avec leur fils. Elle a, pour sa part, été tuée et son corps a été calciné ;

79. Le 25 avril 2022, Jordany NORANDIN, âgé de trente-deux (32) ans, a été tué dans sa maison localisée à Wout Tè, à la Croix-des-Missions. Les bandits armés ont incendié la maison de la victime, alors qu’elle se trouvait encore à l’intérieur ;

80. Le 25 avril 2022, Hermane NEVIL, âgé de trente-quatre (34) ans et père d’un enfant de quatre (4) ans, a été assassiné à la Croix-des-Missions ;

81. Le 25 avril 2022, Anose EXAVIER, âgée de quarante-et-un (41) ans, se trouvait chez elle, lorsqu’elle a été froidement abattue. Sa fille, âgée de dix-huit (18) ans, a eu le temps de s’enfuir en courant ;

82. Le 25 avril 2022, Romandove PIERRE, âgé de vingt-deux (22) ans, a été tué à Koridò Djo, d’après ce qu’a déclaré sa cousine, qui habitait avec lui. La victime a été capturée par des bandits armés, qui l’ont froidement abattue. Sa cousine ainsi que le fils de cette dernière, âgé de cinq (5) ans, ont, pour leur part, été épargnés ;

83. Rolson PHILISTIN, âgé de vingt-sept (27) ans, a été assassiné à Shada, non loin de la pompe à essence. La victime n’était pas résidente de la zone, selon des témoins rencontrés ;

84. Le 26 avril 2022, les conjoints Célanie MARTIAL et Adrien VERNE, tous deux (2) âgés de soixante-douze (72) ans, ont été tués, puis carbonisés. Ils se trouvaient chez eux, lorsqu’ils ont été assassinés. Avancés en âge, ils n’ont pas eu le temps de prendre la fuite ;

85. Le 26 avril 2022, Evelt PIERRE et sa sœur Marie PIERRE ont été tués. Selon les déclarations de la conjointe d’Evelt PIERRE, les victimes ont été enterrées dans une des fosses communes creusées par les bandits ;

86. Depuis le 26 avril 2022, aucun membre de la famille de Christinl JEAN n’a de ses nouvelles. Au moment de l’attaque, Christinl JEAN se trouvait chez lui, alors que son neveu, qui vivait avec lui, était aller acheter à manger ;

87. Le 27 avril 2022, Daphney LOUIS, âgée de trente-quatre (34) ans et mère de trois (3) enfants, a été assassinée à Shada ;

88. Le 27 avril 2022, Peterson TOUSSAINT, âgé de dix-huit (18) ans, chauffeur de motocyclette, a été tué par des bandits armés, en tentant de fuir sa maison, située à Wout Tè, Shada ;

89. Le 28 avril 2022, James VILSON, né le 18 octobre 1999, a été tué. Il vivait à la Croix-des-Missions ;

90. Le 29 avril 2022, Hérisse JEAN BAPTISTE, alias Tiga, aide-chauffeur de camion, a été assassiné. Son cadavre a été remarqué par une de ses voisines. Selon les informations recueillies, de la part d’un cousin de la victime, Hérisse JEAN BAPTISTE alias Tiga s’était échappé avec sa mère. Mais, arrivé à Shada, il laissa sa mère sur place pour aller récupérer son téléphone. C’est alors qu’il a été assassiné ;

91. Le 1er mai 2022, Ducanesse SAINTINAT et Jérôme SAINTINAT, respectivement père et fils, ont été assassinés à Wout Tè, alors qu’ils tentaient de s’échapper ;

92. Le 2 mai 2022, Yves Laurent THOMAS, âgé de trente-deux (32) ans, père d’un (1) petit garçon de trois (3) ans, a été assassiné devant sa maison à Shada. Il tentait de s’échapper ;

93. Le 2 mai 2022, alors que des bandits s’affrontaient à Damien, plusieurs personnes ont été assassinées. Parmi les victimes, se trouve Marie Dianie JOSEPH, née le 26 septembre 1980. Elle était mère d’une fille de quatorze (14) ans, qui est, à présent, à la charge du frère de la victime ;

94. Le 2 mai 2022, Nadège JEAN BAPTISTE, âgée de trente-quatre (34) ans, a été tuée dans sa maison, à la Croix-des-Missions. Elle était mère de deux (2) enfants ;

95. Le 2 mai 2022, Lucie BENOIT, née le 3 janvier 1950 à Jérémie, a été tuée à Shada. Au moment de l’attaque, elle n’a pu prendre la fuite, car elle était très avancée en âge et souffrait d’hypertension artérielle. La maison, où logeait la victime, a été totalement incendiée ;

96. Le 2 mai 2022, Romane DUMOND a été tué dans la zone de Wout Tè ;

97. Le 2 mai 2022, Robenson EUGENE alias Ti Ga, né le 10 novembre 1999, vivait à Shada. Lors de l’attaque, il a été tué par balles dans l’enceinte-même de sa maison, qui a, par la suite, été incendiée ;

98. Le 3 mai 2022, les sœurs Elticia GELVARD et Estélivia GELVARD, âgées toutes deux de soixante-cinq (65) ans, ont été tuées, puis carbonisées chez elles, à la Croix-des-Missions, zone Barbancourt. Le fils d’Elticia GELVARD, lui-même ouvrier maçon, était allé travailler à Delmas 75, ce jour-là. Il a été appelé par un voisin, qui lui a conseillé de ne pas rentrer chez lui. La maison, où il habitait avec sa mère et sa tante, a été incendiée ;

99. Le 5 mai 2022, Vilès, un employé de l’entreprise AVIS, a été assassiné. Durant les affrontements, il s’était réfugié sur la place de Clercine. Ayant entendu dire qu’il y avait une trêve, le 5 mai 2022, il s’est rendu dans le quartier de Butte Boyer, à l’impasse François, dans le but de récupérer quelques effets. Il était alors accompagné d’une dame enceinte de six (6) mois. Des hommes armés, trouvés sur place, l’ont froidement abattu, mais ont décidé de laisser la vie sauve à la dame ;

100. Le 5 mai 2022, Pouchy OFIN, né le 15 décembre 1999, accompagné de sa nièce Laurie CHARLES, née le 15 octobre 2015, tentaient d’échapper à la fureur des gangs, lorsqu’ils ont été capturés par des bandits armés. Ils ont été tués, puis feu a été mis à leur cadavre. La mère de la fillette, qui est aussi sœur de Pouchy OFIN, affirme avoir photographié l’emplacement où les corps ont été calcinés ;

101. Le 5 mai 2022, Jean JULES, né le 5 décembre 2001, a été tué à Carrefour Shada ;

102. Le 5 mai 2022, Marcus JOSEPH, âgé de soixante (60) ans, a été tué, puis carbonisé à Shada ;

103. Le 6 mai 2022, Idermane JEAN BAPTISTE, âgé de quatre-vingt-sept (87) ans, se trouvait chez lui, au # 58, Butte Boyer 11, lorsqu’il a été carbonisé, à l’intérieur même de sa maison ; Selon ce qu’a rapporté son fils, Idermane JEAN BAPTISTE ne voulait pas sortir de chez lui ;

104. Le 9 mai 2022, Youseline JOSEPH, née le 12 avril 1992 et mère d’une (1) fillette, a été tuée à Shada. Ce jour-là, son conjoint avait emmené leur fille à Cazeau chez une parente. Au retour de celui-ci, il n’a pas pu entrer chez lui, la zone ayant été alors occupée par des bandits armés. Le 13 mai 2022, il a simplement constaté que feu a été mis à sa maison ;

105. Widlyne DERIVAL, mère d’une fillette de treize (13) ans, a été tuée. Sa fille est aujourd’hui à la charge de sa tante ;

106. Le 5 mai 2022, Claudin LECTOR, âgé de dix-neuf (19) ans, se cachait chez lui au # 40, Wout Tè, Shada, au moment des attaques. Des bandits se sont introduits dans sa maison et l’ont assassiné. Son corps a été calciné ;

107. Joubert CICERON, âgé de trente-quatre (34) ans, père de trois (3) enfants âgés respectivement de treize (13) ans, onze (11) ans et quatre (4) ans, a été tué chez lui à Shada. Son cadavre a brûlé avec sa maison ;

108. Licia PIERRE a été calcinée vive dans sa maison, située à Shada, Wout tè. Elle était mère de trois (3) enfants ;

109. Léon LEBLANC, âgé de soixante-huit (68) ans, a été assassiné, puis carbonisé à Shada. Après avoir travaillé au parlement haïtien, il était devenu entrepreneur. Selon plusieurs riverains, il a été systématiquement recherché par les membres du gang des 400 Mawozo, qui le soupçonnaient de financer la base des Chen Mechan ;

110. Annezan CHRISTOPHE, âgé de quarante (40) ans, a été tué à Santo 22. Il était chez lui, au moment où il a été assassiné par les bandits ;

111. Robert GUSTAVE, âgé de vingt-neuf (29) ans, a été décapité à Lakou 7 Kout Kouto, à la Croix-des-Missions ;

112. Joanel AUGUSTIN, âgé de trente-deux (32) ans, a été décapité, puis calciné à Butte Boyer ;

113. Stéphane NICOLAS, âgé de quarante-deux (42) ans, a été assassiné à Butte Boyer ;

114. Nadine CHARLES, âgée de trente-et-un (31) ans, a été assassinée à carrefour Saint-Martial, zone Butte Boyer ;

115. Richard GUILLAUME, âgé de trente-huit (38) ans, a été assassiné à Butte Boyer ;

116. Jeanty LAROSE, un passant qui ne résidait pas dans la zone du conflit, a été assassiné à la Croix-des-Missions ;

117. Mercidieu JOSEPH, âgé de quarante-quatre (44) ans, et Céline RICHARD, âgée de dix-sept (17) ans, sont morts calcinés à l’intérieur de leur maison, sise à Wout Tè ;

118. Ghislaine ANTENUS, âgée de soixante-douze (72) ans, a été calcinée vive dans sa résidence à Ti Ginen, dans la Croix-des-Missions. Au moment de l’assaut, elle ne pouvait prendre la fuite, car elle souffrait de fortes douleurs et ne pouvait pas se déplacer seule ;

119. Beliot CAJUSTE, âgé de cinquante-six (56) ans, est mort calciné, à l’intérieur de sa maison, avec ses deux (2) enfants, à savoir Wislet CAJUSTE, âgé de trente-six (36) ans, et Marie Maude CAJUSTE, âgée de vingt-trois (23) ans ;

120. Soirilia JOSEPH et Soirilie JOSEPH sont deux (2) sœurs jumelles, âgées de quatre-vingt-six (86) ans, qui ont été calcinées dans leur maison, sise à la Croix-des-Missions, zone Dèyè Simityè ;

121. Linda DESROSIERS a reçu une balle et en est morte. Elle était la grand-mère d’une orpheline, qui vivait avec elle à la Croix-des-Missions, non loin de la succursale de la Banque nationale de Crédit (Bnc). Aujourd’hui, la petite-fille de Linda DESROSIERS, élève en Nouveau Secondaire 3 (NS3), se retrouve seule au monde. Elle a été accueillie par une amie ;

122. Jeanicie LAMARQUE, âgée de soixante (60) ans, vivait à Wout Tè avec l’une de ses filles, qui s’était rendue à Petit-Goâve, avant les affrontements. Ayant appris ce qui s’était passé, elle est retournée à Wout Tè, à la recherche de sa mère. C’est ainsi qu’elle a appris que Jeanicie LAMARQUE a brûlé avec la maison ;

123. Fidnerson PIERRE-NOËL, un menuisier, qui habitait près du Tribunal de paix de la Croix-des-Missions, a brûlé vif avec sa maison ;

124. Jacques THELUS s’était caché chez lui, lorsque des bandits armés ont pénétré sa maison. En tentant de s’enfuir, il a été froidement abattu ;

125. Israël JEAN PAUL, âgé de trente-trois (33) ans et père d’une fillette de quatre (4) ans, a été assassiné, au moment où il tentait de retourner chez lui, en vue de récupérer une somme d’argent, qu’il n’avait pas eu le temps d’emporter, lorsqu’il avait abandonné sa maison avec précipitation, le premier jour de l’attaque ;

126. Oreste LAFALAISE, âgé de soixante-quatre (64) ans, père de trois (3) enfants, a été tué à Butte Boyer ;

127. Rosemonde ELCIRIN, âgée de trente-huit (38) ans et mère de trois (3) enfants, se trouvait chez elle, à Koridò Djo, Croix-des-Missions, lorsqu’elle a été emmenée de force au bord de la Rivière Grise, où elle a été tuée ;

128. Similorme HENRY était chez lui, à Butte Boyer 6, lorsque des hommes armés ont envahi la zone, tirant dans toutes les directions. Profitant d’un moment de calme, sa conjointe a pris la fuite avec leur bébé de trois (3) mois, laissant Similorme HENRY dans la maison. Quelques jours plus tard, la conjointe de la victime a simplement constaté que leur maison a été incendiée. Le corps de son mari n’a pas été retrouvé ;

129. Judeline NAZAIRE, Silia TICEL et Siliana LEBLANC sont trois (3) marchandes ambulantes, portées disparues depuis les événements. Elles avaient l’habitude de se rendre à Santo, Shada et à la Croix-des-Missions, pour écouler leurs marchandises. Selon leurs fournisseurs, les membres de leur famille n’ont pas retrouvé leur trace ;

130. Watson DÉBOIS n’a pas voulu quitter sa maison, contrairement à sa conjointe, qui a eu le temps de prendre la fuite avec leur fille âgée d’un (1) an. Elle n’a jamais reçu des nouvelles de Watson DÉBOIS ;

131. Stéphanie CHARLES, âgée de vingt-six (26) ans, est portée disparue, selon sa famille, qui affirme ne pas avoir de ses nouvelles depuis les événements. Elle habitait à Butte Boyer ;

132. Le 2 mai 2022, Micheline PIERRE, une buandière, a laissé sa maison à Shada pour n’y jamais revenir. Malgré les nombreuses recherches, effectuées par sa famille, elle n’a pas été retrouvée ;

B. Personnes assassinées, présentées comme étant des bandits

133. Selon des riverains, rencontrés dans le cadre de cette enquête, dans les deux (2) camps qui se battaient, des bandits armés ont aussi été tués. Certaines personnes tuées chez elles, dans la communauté, ont aussi été présentées soit comme des proches des bandits armés, soit comme ayant été recherchées par les bandits armés, en raison de leur lien avec le gang adverse. Voici les informations qui ont été communiquées au Rnddh en ce sens :

134. Le 24 avril 2022, dix-sept (17) jeunes femmes, qui se trouvaient dans un motel à Nan Galèt, zone Butte Boyer, ont été surprises par le gang des 400 Mawozo, qui leur reproche de faire partie de la base Koko Fè, réputée proche de la base des Chen Mechan. Elles ont été assassinées, avant d’être jetées dans des puits d’eau et des latrines. D’aucuns affirment qu’elles ont aussi été violées, avant d’être tuées. Voici le nom complet de treize (13) parmi elles :

• Sophia BELLEVUE

• Junette BRILLANT

• Marie Claire CLERGE

• Marie-Ange DOMINIQUE

• Marie-Rose HYPPOLITE

• Tamara MOÏSE alias Manman Baz

• Jacqueline PIERRE

• Pierre Rose PREVOST

• Dieuline RICHEMOND

• Marie Fifi RENE alias Tifi

• Mamoune SAINT HUBERT

• Schneidine SAINT LOUIS

• Lunise TIMOTHEE

135. Dans les échanges de coups de feu, treize (13) personnes, présentées comme étant proches de la base des Chen Mechan, ont été assassinées. Il s’agit de :

• Jean Félix ALCINDOR

• Frantz AUGUSTIN

• Danise EXANTUS

• Bernado FERVIL

• Cajoux FRENEL

• Saint Frant GUYVAUD

• Bellefort JEAN JULES

• Enock JEAN LOUIS

• Antonite JEAN PIERRE

• Marie Chantale JOSEPH

• Léonise NAPOLÉON

• Judenel PHATON

• Gérald PHILOGÈNE

136. Il est aussi reproché à Claudy CELESTIN, alias Chen Mechan, connu encore sous le nom de Stevenson PIERRE, chef de la base des Chen Mechan, d’avoir, de ses propres mains, assassiné sept (7) parmi les membres de sa base. Certains riverains estiment qu’ils ont été assassinés, pour avoir avoué ne plus pouvoir continuer à se battre. D’autres ont, cependant, affirmé qu’ils ont été démasqués par Claudy CELESTIN, alias Chen Mechan, comme étant des traîtres. Le Rnddh a pu recueillir les noms de trois (3) parmi eux :

• Dagobert DORLUS alias Demon

• Roodson DUVEAU

• Junior JEAN alias Dread Janjan

137. Claudy CELESTIN, alias Chen Mechan, a également exécuté André DEMOSTHERNES en date du 4 mai 2022. Il a reproché à celui-ci d’avoir fourni nourriture aux bandits des 400 Mawozo, pendant les affrontements. Un adolescent, qui se trouvait aussi avec André DEMOSTHENES dans sa maison, a subi le même sort qu’André DEMOSTHERNES : il a été tué, puis calciné.

138. Il a aussi été rapporté au Rnddh que des membres du gang armé des 400 Mawozo ont aussi été tués. Il s’agit de :

• Henry AUCIEL

• Wisny BAROMETRE

• Olrich EMILE alias Pè Lebrun

• Jean Marie FORTUNE

• Antoine LOISEAU

• Roodson MIDY

• Stéphane MONPREMIER

139. Pour sa part, Olrtich EMILE, alias Pè Lebren, a reçu une balle dès le premier jour des affrontements. Il se trouvait à Butte Boyer, lorsqu’il a été blessé. Le 25 avril 2022, les bandits de Chen Mechan ont mené une nouvelle attaque dans la zone, qui était alors occupée par les bandits de 400 Mawozo, ce qui a obligé les proches d’Olritch EMILE, alias Pè Lebren, de l’emmener à Cité Doudoune, au fief du gang armé dirigé par Dominique, lui-même allié des 400 Mawozo.

140. Les bandits de la base des Chen Mechan les ont traqués et Olritch EMILE, alias Pè Lebren, a été capturé pour être décapité. Sa tête a été emportée et feu a été mis à ses restes.

141. Par ailleurs, le commissariat de Tabarre a affirmé que deux (2) bandits ont été tués, lors d’une intervention policière et qu’un (1) troisième a été lynché par la population.

C. Femmes victimes de viols

142. Il a été signalé que de nombreuses femmes ont été violées, avant d’être tuées. Tel est le cas, par exemple, des dix-sept (17) femmes membres de la base Koko Fè, surprises par les bandits du gang des 400 Mawozo dans un motel. Elles ont été toutes violées avec beaucoup de violences, avant d’être assassinées, selon les riverains.

143. D’autres victimes de viols collectifs ont aussi été recensées. Par exemple, le lundi 2 mai 2022, les bandits ont envahi la zone de Shada, tuant les hommes sur leur passage. J.P. était chez elle avec son conjoint et sa fille de onze (11) mois. Ayant cru que seuls les hommes étaient exécutés, elle a proposé à son conjoint de se cacher sous des vêtements, en-dessous du lit. Lorsque les bandits armés sont arrivés chez elle, ils l’ont violée à plusieurs reprises. Le mari, qui était caché sous le lit, a vécu ce viol collectif, alors que la fillette pour sa part, n’arrêtait pas de pleurer.

D. Personnes blessées

144. Au sein de la population civile, plusieurs personnes ont été blessées par balles ou à l’arme blanche. Certaines ont même été laissées pour mortes. Voici quelques exemples :

145. Jeantilus DECIALUS, se trouvait dans sa maison, au moment où les bandits ont tiré en direction de sa conjointe. C’est cependant lui-même, qui a reçu le projectile ; Il a été soigné dans un centre hospitalier ;

146. Viviane JOSEPH, âgée de quarante-deux (42) ans, vivait à Koridò Djo, dans la Croix-des-Missions. En essayant d’échapper à l’attaque des gangs armés, elle a été interceptée par les bandits. L’un d’entre eux lui a donné un coup de machette au pied. Elle est grièvement blessée ;

147. Il a aussi été rapporté au Rnddh que des bandits sont sortis blessés lors de ces affrontements. Par exemple :

• Roodisson CHARLES a été atteint d’une balle à l’épaule, une autre balle lui a effleuré la tête. Il est actuellement sous le contrôle de la Sdpj ;

• Junior Steeve JEAN BAPTISTE a été atteint d’une balle à la jambe, il est incarcéré à la Prison civile de la Croix-des-Bouquets.

E. Maisons pillées et / ou incendiées

148. Les bandits des 400 Mawozo ainsi que ceux de la base des Chen Mechan avaient décidé de mettre la Plaine du Cul-de-Sac à feu.

149. Toutes les maisons de Butte Boyer devaient d’abord être passées au peigne fin par la base des Chen Mechan, avant de partir en fumée. L’individu, au sein de cette base, chargée de cette tâche, est connu sous le nom de Kesny.

150. Quatre-vingt-une (81) maisons au moins ont été pillées et / ou incendiées dans les zones attaquées. Le Rnddh a pu s’entretenir avec soixante-quinze (75) parmi les victimes, propriétaires ou locataires :

151. Jacqueline ALEXIS vivait à l’impasse La Foi, Butte Boyer. Le 25 avril 2022, elle a fui sa maison. Quelques jours plus tard, elle est retournée chez elle avec l’intention de récupérer quelques effets personnels. Elle a constaté que sa maison a été incendiée ;

152. Nalia ANTOINE s’est réfugiée à Pétionville chez un proche avec ses deux (2) garçons. Sa maison de deux (2) pièces a été incendiée ;

153. Le 24 avril 2022, des bandits des 400 Mawozo ont incendié plusieurs maisons, dont celle de Maniette ADME située au # 15, impasse Gernado, Butte Boyer ;

154. Idamène JOSEPH habitait au # 28 Wout Tè, Croix-des-Missions. Le 24 avril 2022, sa maison a été incendiée par des bandits armés ;

155. M.D. vivait au # 56 impasse François, Butte Boyer. Il se trouvait au marché de la Croix-des-Missions, au moment de l’attaque du 24 avril 2022. Sa maison a été incendiée ;

156. Le 24 avril 2022, Joseph Julio ELASME a fui sa maison, de justesse avec sa conjointe et sa fille de treize (13) ans. Trois (3) jours plus tard, un voisin lui a appris que sa demeure, localisée à l’impasse Guerrier, a été incendiée ;

157. Le 24 avril 2022, Servilia JOSEPH, mère de quatre (4) enfants, commerçante, s’était rendue au marché de viande à Damien, dans la Croix-des-Missions, en vue de renouveler son stock de marchandises, lorsque des bandits armés ont attaqué Shada. A son retour du marché, elle ne pouvait même pas regagner sa demeure, la zone ayant été complètement bouclée. Elle a dû rebrousser chemin, a dormi quelque temps dans les rues avant de trouver refuge chez une belle-sœur à Jérusalem 3. Sa maison a été incendiée ;

158. R.J., âgé de soixante-deux (62) ans, vivait à Shada, dans la Croix-des-Missions. Il a pris la fuite, le 24 avril 2022, pour apprendre, quelques jours plus tard, que sa maison ainsi que tout ce qui s’y trouvait ont été incendiés ;

159. Mimose MONIMA, née le 3 septembre 1984 et mère de deux (2) enfants, habitait à la Croix-des-Missions, avec sa mère Célimène PIERRE et son frère, Félix MONIMA au dos du Tribunal de paix. Sa maison a été incendiée le 24 avril 2022. Sa mère et son frère ont péri dans le feu ;

160. P.G., maçon de profession, était propriétaire d’une maison située au # 46, Marécage prolongé, Butte Boyer. Lors de l’attaque du 24 avril 2022, sa maison a été totalement incendiée. Il a perdu toutes ses affaires y compris ses outils de travail ;

161. A.C., né le 10 juillet 1970, père de cinq (5) enfants, habitait à Koridò Djo, à la Croix-des-Missions. Sa maison a totalement brûlé le 24 avril 2022 ;

162. M.G. vivait au # 3, Anba Mapou, Croix-des-Missions. Elle s’est échappée de sa maison, le 24 avril 2022. Elle a appris que celle-ci est totalement partie en fumée ;

163. Le 25 avril 2022, Florence JACQUES a dû demander aux individus armés, postés devant sa maison, localisée au # 9 impasse Cangé, Butte Boyer, l’autorisation de quitter la zone, avec d’autres membres de sa famille, dont un bébé. A son retour le 6 mai 2022, elle n’a trouvé que les ruines de sa maison ;

164. Le 25 avril 2022, Hérode JEAN BAPTISTE a quitté sa maison avec sa famille. Le 5 mai 2022, son frère l’a informé que sa maison, située à Wout Tè, Shada # 24, a été incendiée. Il a pu le constater de ses yeux, le lendemain ;

165. Le 25 avril 2022, la maison d’Elizabeth MONDESIR a été incendiée par des bandits armés portant le T-shirt des 400 Mawozo ;

166. M.B., âgée de soixante-quatorze (74) ans, vivait seule à la Croix-des-Missions. Elle s’est enfuie,le 25 avril 2022. Quelques jours après, elle est retournée chez elle, récupérer quelques effets personnels. Elle a alors constaté que sa maison a entièrement brûlé. Et selon ses dires, cinq (5) autres maisons, qui se trouvaient à proximité de la sienne, ont également été incendiées ;

167. Le 30 mars 2022, Tertilia TALON a payé les frais de location de sa maison, située à l’impasse Guerrier, Butte Boyer. Le 25 avril 2022, elle a abandonné sa maison avec sa fille de seize (16) ans. La maison a été totalement incendiée ;

168. Le 25 avril 2022, la maison de Patricia TOUSSAINT a été incendiée par des bandits armés. Elle est souffrante et son conjoint Jean BOYER, ayant perdu la vue, vit avec une incapacité sensorielle ;

169. Le 26 avril 2022, la maison de Jolina SENAT, localisée à Lakou Samson, Butte Boyer, est complètement partie en fumée. Jolina SENAT est une commerçante, qui a aussi tout perdu ;

170. Le 26 avril 2022, Luckner ALMEZIS, sa conjointe ainsi que ses quatre (4) enfants ont dû quitter leur maison, localisée au # 39, impasse Litane, pour échapper aux attaques armées. Celle-ci est totalement partie en fumée ;

171. Marie Ange FENELUS a affermé une maison sise au # 30, Lakou Sonson, Butte Boyer, Croix-des-Missions. Le 26 avril 2022, elle a abandonné sa maison pour apprendre, par la suite, qu’elle a entièrement brûlé ;

172. Arlène COLASTON, âgé de soixante-cinq (65) ans, vivait à l’impasse François, zone Marécage, Butte Boyer. Elle a dû laisser sa maison, le 24 avril 2022, et s’est réfugiée sur la place publique de Clercine. Elle est retournée chez elle, le 28 avril 2022, et a même pu récupérer quelques effets personnels ainsi que des pièces d’identité. Elle a appris, par la suite, par une voisine, que sa maison a été totalement incendiée ;

173. Yliana APREDIEU est restée chez elle avec ses cinq (5) enfants, à Shada, Wout Tè, du 24 avril jusqu’au 2 mai 2022, date à laquelle elle avait finalement décidé de s’en aller. Sa maison a été incendiée. Elle se trouve actuellement chez un proche à Jérusalem 3 ;

174. Castana GERMAIN vivait dans une cour, à Butte Boyer, qui avait plusieurs maisons. Le 6 mai 2022, elle a constaté que sa maison ainsi que cinq (5) autres avaient été incendiées ;

175. Greny ETIENNE résidait au quartier de Santo 2 prolongé, zone Wout Tè. Le 2 mai 2022, sa maison a été incendiée ;

176. Le 2 mai 2022, la maison de Guerline NOËL a été totalement incendiée à Carrefour Shada. Cette dernière est mère de deux (2) garçons, âgés respectivement de seize (16) et douze (12) ans ;

177. Dalusnah TELUSMAH vivait avec sa famille dans une maison, sise à Wout Tè, Shada. Le 2 mai 2022, ils se sont enfuis et ont, par la suite, appris que leur maison a entièrement brûlé ;

178. Le 3 mai 2022, Santo 2 prolongée, la localité où habite Dieulourde OMISCAR, a été prise pour cible par des membres du gang armé des 400 Mawozo. Au cours de cette attaque, la maison familiale des OMISCAR a été incendiée. Les membres de cette famille ont pu s’échapper de justesse ;

179. Le 3 mai 2022, la maison de Céseline CHARLES, située à la Croix-des-Missions, a été incendiée. Elle s’est réfugiée à Gérald Bataille, chez une amie, avec son garçon de onze (11) ans ;

180. Vilson PREVALUS est père de deux (2) enfants. Ils habitaient une maison, située à impasse Cangé, Butte Boyer. Le 4 mai 2022, celle-ci a été incendiée ;

181. Le 5 mai 2022, Wilson PREVALUS avait décidé de se rendre chez lui à Butte Boyer 11. A son arrivée sur les lieux, sa maison était encore en feu. Wilson PREVALUS est père de quatre (4) enfants et vit actuellement sur la place de Clercine, mais il passe la nuit à l’Eglise Eben Ezer. Il est le frère jumeau de Vilson PREVALUS.

182. Génite BAYARD avait loué une maison à Shada, Wout Tè, et vivait avec ses trois (3) enfants, dont deux (2) filles. Lors des affrontements, elle est allée se cacher dans une église, située à Koridò Djo. Le 5 mai 2022, elle a constaté que sa maison a été incendiée ;

183. Le 5 mai 2022, la maison de Remice LECTOR, située au # 40, Wout Tè, Shada, a été incendiée. Le cadavre de son cousin Claudin LECTOR, âgé de dix-neuf (19) ans, a également brûlé avec la maison ;

184. Le 5 mai 2022, certains proches de Rodrigue RESIL lui ont annoncé que sa maison a été incendiée. Le 6 mai 2022, il s’est rendu sur les lieux et a pu en constater les cendres ;

185. Le 5 mai 2022, la maison de Joseph CADET est partie en fumée. Elle était localisée à Butte Boyer 11, zone Gran Lakou ;

186. Le 5 mai 2022 vers 9 heures, J.M.C. se trouvait dans sa maison, en train de prendre quelques effets, lorsque quinze (15) des bandits de Chen Mechan, armés de machettes, couteaux et d’armes à feu, sont apparus. Ti mal ainsi connu, membre de la base des Chen Mechan, l’a menacé de son arme et l’a sommé de partir. Feu a été mis à sa maison ;

187. K.J. B. possédait une maison de quatre (4) pièces, située à l’impasse Cangé, Butte Boyer, sur une vaste propriété, qui comptait aussi d’autres résidences de la même famille. Le 5 mai 2022, vers 9 hres, l’un de ses cousins s’est rendu dans sa propre maison, située également sur ce même terrain. Il a surpris les hommes de Chen Mechan en train de mettre le feu partout. Plus de trente-cinq (35) maisons ont été réduites en cendre dans ce même espace, dont celle de K.J.B. ;

188. Natacha JEAN BAPTISTE vivait avec ses deux (2) filles et une (1) nièce dans une maison, sise à Butte Boyer 11. Le 5 mai 2022, elle a surpris les hommes de Chen Mechan en train d’incendier des maisons au carrefour de Butte Boyer. Le lendemain, elle est revenue dans la zone et a constaté que sa maison n’a pas été épargnée ;

189. La maison de Gentil JEUNE a été incendiée, en date du 5 mai 2022, à Carrefour Marassa, au cours d’un assaut du gang armé des 400 Mawozo. Gentil JEUNE se trouvait, au moment des faits, dans le garage où il travaille. Feu a aussi été mis à deux (2) voitures, qui lui ont été confiées, pour reparation, par des clients : Il s’agit d’un véhicule de marque Toyota Rav 4, année 2008, de couleur rouge, immatriculée 34108 et d’un Tracker de couleur noire. Sa conjointe ainsi que leurs deux (2) enfants se sont sauvés de justesse ;

190. Après avoir abandonné sa maison à Gran Lakou, Butte Boyer, le 25 avril 2022, Molène JILUS a appris que celle-ci a été totalement incendiée le 5 mai 2022 ;

191. M.C. était propriétaire d’une maison de sept (7) pièces, localisée au # 10, Rivière Grise, Shada. Le 25 avril 2022, elle s’est échappée avec ses enfants. Le 6 mai 2022, elle a appris que sa maison a entièrement brûlé. Retournée dans la zone quelques jours plus tard, elle n’en a trouvé que l’emplacement ;

192. Le 6 mai 2022, la maison de Brignol JEAN BAPTISTE située au # 58, Butte Boyer 11, a été incendiée ;

193. Marie Nicole CLÉMENT habitait à Lakou Samson, Croix-des-Missions. Sa maison ainsi que tout ce qu’elle possédait ont été incendiés ;

194. Sterlin CYPRIEN vivait à Butte Boyer, Gran Lakou, avec sa mère. Ils ont dû quitter la zone pour échapper au carnage. De retour le 6 mai 2022, Sterlin CYPRIEN n’a pu constater que les ruines de sa maison incendiée ;

195. Daphney DOMOND, mère de deux (2) enfants, est retournée chez elle le 6 mai 2022 et a trouvé les ruines de sa maison complètement incendiée ;

196. La maison d’Emmanuel DESSALINES, orphelin, âgé de vingt-quatre (24) ans, réparateur de motocyclettes, ainsi que son petit commerce, localisés à l’impasse Guerrier, ont été totalement incendiés ;

197. Rosemithe FRANCILUS, mère de cinq (5) enfants, dont trois (3) filles, a perdu sa maison, qui a été totalement incendiée par les bandits. Elle habitait à Butte Boyer, impasse Cangé prolongée ;

198. La maison, où vivait Michaëlle GRACIA avec sa mère à Shada, près de la Banque nationale de Crédit (Bnc), a été complètement incendiée ;

199. Grégory Pierre JEAN est père de deux (2) filles. Il habitait dans une maison, située à l’impasse Rivière Grise, Croix-des-Missions depuis vingt-deux (22) ans. Celle-ci est totalement partie en fumée ;

200. Madeline JEAN vivait à Wout Tè, dans la Croix-des-Missions. Elle a profité d’un moment de calme pour fuir la zone, avec ses enfants. Revenue après quelques jours, elle a constaté que sa maison a été entièrement incendiée ;

201. Samuel JEAN BAPTISTE, propriétaire de Horizon Pest Control Services, habitait à l’impasse Léonord, Butte Boyer. Sa résidence ainsi que son entreprise ont été incendiées ;

202. Après avoir passé huit (8) jours, enfermée dans sa maison à Wout Tè, Nahomie JEAN PIERRE s’est échappée de justesse avec ses deux (2) filles. Feu a été mis par la suite dans plusieurs maisons, dont celle de Nahomie JEAN PIERRE ;

203. Marie Jordina JORDONNE, mère de deux (2) enfants, dont un bébé de sept (7) mois, habitait à Butte Boyer. Elle possédait un dépôt de produits cosmétiques, situé devant sa maison. Celle-ci ainsi que le dépôt en question sont partis en fumée ;

204. A.J. a fui sa maison située au #60, Wout Tè, Shada. Elle a emmené ses enfants en province, en n’emportant que quelques effets personnels. Quelques jours plus tard, elle a appris, par sa cousine, que sa maison est partie en fumée. Elle s’est rendue sur place pour constater les dégâts de ses propres yeux. Elle était propriétaire d’une boutique contiguë à sa maison, qui, pour sa part, a été pillée ;

205. Ismaël JOSEPH habitait à Tabarre 9, près de la résidence de Chariot CASIMIR. Sa maison, celle de Chariot CASIMIR ainsi que cinq (5) autres maisons, localisées dans la même zone, ont été incendiées ;

206. Philomène JOSEPH habitait à Shada, à l’entrée de Wout Tè, zone lòt Bò Pon, # 60. Elle est partie pour échapper aux attaques armées ; Elle a appris, par la suite, que sa maison a été totalement incendiée ;

207. Alex LAFALAISE, né le 1er juillet 1966 et père de trois (3) enfants, habitait au # 36, Butte Boyer, à proximité du Tribunal de paix. Sa maison a été totalement incendiée ;

208. Anite LOUIS habitait au #16 Wout Tè avec sa fille de dix (10) ans et son garçon de six (6) ans. La maison qu’elle a louée ainsi que son dépôt de produits alimentaires ont été incendiés. Elle a dû se séparer de ses enfants ;

209. La maison de Synda MATHURIN, située à Shada, zone Wout Tè, a été incendiée ;

210. Saintilia MILIEN a affermé une maison à Butte Boyer. Celle-ci a été incendiée ;

211. La maison de Félicia NELSON, située au # 29, impasse Cangé, Butte Boyer, a été incendiée par des membres du gang des 400 Mawozo ;

212. Natacha NOATÈRE, née le 12 mai 1977 et mère de sept (7) enfants, habitait à Anba Mapou, dans la Croix-des-Missions. Le 24 avril 2022, sa maison a été totalement incendiée ;

213. Jacquelin NOËL vivait à Butte Boyer, dans une maison qu’il a affermée. Feu a été mis à celle-ci ;

214. La maison, dans laquelle habitait J.L.C.P., se trouvait à proximité de celle d’un membre de la base des Chen Mechan. Les bandits des 400 Mawozo y ont mis feu et celui-ci s’est propagé à la maison de la victime ;

215. Marie Maude RICHE, âgée de quarante-six (46) ans, vivait avec son mari et ses cinq (5) enfants, à Wout Tè, Shada. Elle a dû fuir la maison avec ses enfants pour se réfugier à Jérusalem 7. De retour chez elles, elle a constaté que sa maison a été incendiée ;

216. Après avoir passé plusieurs jours à l’Eglise Eben-Ezer de Clercine, Marie Natacha Noël SAINT-FORT était allée dans sa maison, à Butte Boyer, en vue de récupérer quelques effets. Arrivée sur les lieux, elle a constaté que sa maison, totalement incendiée, fumait encore ;

217. V.S. a loué une maison à Shada, au dos de la Banque nationale de Crédit (Bnc). Celle-ci a été incendiée et elle se retrouve actuellement chez une dame, vivant dans la zone Radio MBC ;

218. Johane SUPRIEN, commerçante, mère de sept (7) enfants, dont deux (2) filles, avait affermé une maison à Butte Boyer. Celle-ci est complètement carbonisée ;

219. Elna Louis JEUNE, âgée de cinquante-cinq (55) ans et mère de cinq (5) enfants, se trouvait à Cabaret, pour faire des achats. Pendant les tirs, ses enfants ont fui Wout Tè, pour aller la rejoindre à Cabaret. De retour sur les lieux après dix (10) jours, son fils a remarqué que la maison a été pillée.

V. VEHICULES INCENDIES

220. Cinquante-sept (57) véhicules ont été incendiés au moins, soit vingt-cinq (25) à Butte Boyer et à Marécage, et trente-deux (32) entre Koridò Djo et Santo 2. Voici quelques exemples :

• Dans la cour, où habitait Kenneth JEAN BAPTISTE, se trouvaient quatre (4) voitures. Elles ont toutes été incendiées par les bandits de Chen Mechan. Il s’agit d’une camionnette, d’une Toyota Land Cruiser de couleur rouge, d’un 4 Runner gris, et d’une Honda rouge grenat.

• Une voiture de marque Toyota Rav 4 de couleur grise, immatriculée 34108, et Tracker de couleur noire. Ces deux (2) voitures étaient confiées à Gentil JEUNE pour réparation. La maison de ce dernier a aussi été incendiée à Carrefour Marassa.

221. Plusieurs autres véhicules, qui se trouvaient au garage dominicain, situé à Wout Tè, ont été incendiés.

VI. ENTRETIENS AVEC LES RESPONSABLES JUDICIAIRES ET POLICIERS

222. Selon les autorités policières, en dépit du manque crucial de matériels d’interventions, les agents de la Pnh sont intervenus sur le terrain. En ce sens, de concert avec des unités spécialisées de la Pnh, plus de trente (30) opérations ont été conduites dans différentes zones de la Plaine du Cul-de-Sac, ce qui a abouti à l’interpellation de plusieurs individus. Il s’agit, entre autres, de :

• Roberto ISAAC, membre influent du gang Baz 222, basé dans la commune de Tabarre, affilié au gang 400 mawozo. Selon l’institution policière, Roberto ISAAC a avoué avoir participé dans plus de onze (11) assassinats, dont celui d’un (1) commissaire de police assassiné à Tabarre 23 ;

• Wilner JEROME et Saint Jean FRANÇOIS, deux (2) individus placés sur le pont de Tabarre par le gang armé des 400 Mawozo, afin de contrôler le déplacement des chars blindés de la police.

223. De plus, au moins cinq (5) armes à feu saisies. Il s’agit d’un fusil de calibre M4, un Galil, un fusil de calibre 12 et de deux (2) autres armes respectivement de calibres trente-huit (38) millimètres et neuf (9) millimètres. Sept (7) véhicules, qui ont été volés par les bandits armés, ont aussi été récupérés par la Pnh.

224. Au moins trente (30) plaintes ont été reçues par l’institution policière. Treize (13) d’entre elles ont été déposées par des proches de personnes assassinées ou portées disparues, au cours du Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac.

225. La Pnh a aussi affirmé au Rnddh déplorer que de nombreux cadavres n’aient pas été constatés, aucun juge de paix n’ayant été disponible pour effectuer les constats et en dresser procès-verbal.

226. Enfin, de nouvelles dispositions ont été prises, selon les responsables de la Pnh, pour accompagner la population. En ce sens, les patrouilles ont été renforcées, les points fixes ont été multipliés ou rendus effectifs. De nouvelles antennes de police ont été placées dans plusieurs points.

227. L’Inspection Générale de la Pnh a affirmé au Rnddh n’avoir pas été au courant de l’utilisation du matériel et des équipements policiers dans la perpétration du Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac. Et, par conséquent, aucune enquête n’est à l’ordre du jour autour de ce fait.

228. De leur côté, les autorités judiciaires ont affirmé n’avoir pas pu avancer avec le dossier. Le juge titulaire du Tribunal de paix de la Croix-des-Missions, avec qui le Rnddh s’est entretenu, n’a reçu aucune demande spécifique de constat, de la part des citoyens-nes.

229. Le Juge titulaire du Tribunal de paix de la Croix-des-Bouquets, qui avait procédé au constat de trois (3) cadavres, quelques jours après leur assassinat, n’a rien pu faire d’autre. Le commissaire du gouvernement près le Tribunal de Première Instance de la Croix-des-Bouquets n’a pu, de son côté, fournir information au Rnddh sur le suivi judiciaire accordé au Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac.

VII. SITUATION ACTUELLE A LA PLAINE DU CUL-DE-SAC

230. Deux (2) mois après le Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac, la situation générale de la zone reste encore très précaire. Les victimes vivent dans la peur constante d’autres attaques du gang armé des 400 Mawozo, alors qu’elles continuent de subir des raids sporadiques, menés par la base des Chen Mechan, qui continue de rechercher, au sein de la population, des personnes qui pourraient avoir des liens avec le gang des 400 Mawozo.

231. En ce sens, la chasse aux sorcières, initiée par la base des Chen Mechan, n’a toujours pas terminé. Par exemple, le 22 juin 2022, un jeune homme a été assassiné par balles à Damien, avant d’être carbonisé, dans les bois adjacents. Il lui était reproché d’effectuer un travail de surveillance au profit du gang des 400 Mawozo.

232. De nombreuses familles, qui s’étaient enfuies, ne veulent toujours pas retourner dans la zone. Elles affirment attendre que les autorités policières reprennent le contrôle de la zone et démantèlent les gangs armés 400 Mawozo et Chen Mechan.

233. Entre-temps, la pression est mise sur les personnes déplacées, qui s’étaient réfugiées sur la place publique de Clercine. Il leur est demandé de vider les lieux. Il s’agit, pourtant, pour la plupart, de victimes, qui ont tout perdu dans le feu. Et, il convient de souligner que certaines d’entre elles sont des nourrissons, des enfants en bas âge ainsi que des personnes âgées.

234. De nombreux établissements scolaires, qui avaient fermé leurs portes, n’ont jamais vraiment repris les activités. Ils fonctionnent au gré de la tension dans la zone. De nombreux élèves ne sont pas, non plus, retournés sur les bancs de l’école, sans que les responsables de ces établissements ne puissent affirmer s’il s’agit de victimes d’assassinats, de disparitions ou si, tout simplement, ces enfants ont été obligés de se déplacer avec leurs parents, à cause du carnage.

235. De plus, sans que le Rnddh ne puisse fournir de chiffres y relatifs, il convient de souligner que plusieurs établissements scolaires ont été incendiés, totalement détruits et/ou partiellement endommagés.

VIII. COMMENTAIRES ET RECOMMANDATIONS

236. Du 24 avril au 6 mai 2022, avec la complicité des autorités étatiques, qui offrent protection et bénédiction aux gangs armés, la population de la Plaine du Cul-de-Sac a vécu l’enfer : des personnes ont été tuées par balles, hachées en menus morceaux, carbonisées, jetées dans des puits d’eau ou des latrines et jetées dans la Rivière Grise. De nombreuses femmes ont été violées à repetition, avant d’être assassinées. Des maisons et des véhicules ont été incendiés.

237. Le bilan de ce véritable carnage est lourd : au moins cent-quatre-vingt-onze (191) personnes ont été assassinées, dont cent-sept (107) hommes, soixante-seize (76) femmes, six (6) filles et deux (2) garçons. Vingt-neuf (29), parmi ces victimes, étaient âgées de plus de soixante (60) ans.

238. Parmi les victimes, trente-huit (38) au moins, dont quatorze (14) femmes et filles, ont péri chez elles, dans le feu, mis à leur maison par les bandits armés de 400 Mawozo et de Chen Mechan.

239. Quatre-vingt-une (81) maisons ont été incendiées, après avoir été pillées, pour la plupart, et cinquante-sept (57) véhicules au moins, ont été carbonisés.

240. Quarante-huit (48), parmi les personnes tuées, ont été présentées au Rnddh comme faisant partie des gangs armés rivaux, qui s’affrontaient ou comme des personnes réputées proches de la base des Chen Mechan.

241. De nombreuses autres personnes ont été blessées par balles ou à l’arme blanche.

242. Des familles entières sont disséminées. Des personnes, âgées entre soixante-douze (72) et quatre-vingt-six (86) ans, ont été carbonisées à l’intérieur de leurs maisons. Si certaines d’entre elles avaient choisi de ne pas se déplacer, d’autres n’auraient pu fuir sans l’aide de quelqu’un, étant immobilisées par des maladies.

243. De nombreuses personnes sont considérées portées disparues par leurs proches, qui ne peuvent encore concevoir qu’elles aient été assassinées avec autant de facilité. Et, au moins cent-cinquante-huit (158) enfants sont, depuis ce carnage, devenus orphelins.

244. Outre les nombreuses pertes en vies humaines, et les nombreux dégâts matériels enregistrés, ce massacre d’une ampleur inouïe laisse une population meurtrie : des enfants ont dû faire le choix d’abandonner leurs parents en âge avancé, des conjoints ont abandonné leurs compagnes, et vice-versa. Plusieurs femmes ont été violées à répétition, dont au moins une en présence de son conjoint. Des pères et des mères de famille ont été assassinés en présence de leurs enfants, en bas âge, pour la plupart. De même, des enfants ont été assassinés, sous le regard impuissant de leurs parents. Enfin, de nombreuses familles ont vu partir en fumée le travail de toute une vie. Il s’agit, pour le Rmddh, de victimes qui ne pourront jamais s’en sortir, sans un accompagnement médical et psychologique, tenant compte de leurs besoins spécifiques.

245. Le Rnddh s’insurge contre le fait que, dès le premier jour de l’attaque, soit le 24 avril 2022, du matériel ainsi que des équipements policiers, dont au moins un (1) blindé affecté à l’Unité départementale pour le maintien de l’ordre (Udmo), aient été utilisés par les membres du G-9 an Fanmi e Alye, pour venir en aide à la base des Chen Mechan, qui faiblissait, lui aussi membre de la coalition. Or, il a fallu attendre cinq (5) jours, avant que l’institution policière ne décide de patrouiller dans la zone.

246. Il est clair, pour le Rnddh, que les équipements et matériels affectés à l’Udmo ont été acquis par les autorités étatiques au bénéfice du G-9 an Fanmi e Alye. Le Rnddh en veut pour preuve le fait que ces matériels soient toujours utilisés lors des luttes entre gangs armés, non pas pour venir en aide à la population civile et la protéger, mais pour prendre fait et cause pour les bandits membres du G-9 an Fanmi e Alye. On se le rappelle, des blindés affectés à l’Udmo ont été utilisés, à maintes reprises, dans de nombreux autres massacres enregistrés dans le pays, depuis 2018.

247. Le Rnddh estime qu’il est clair aussi que, dans le cadre du Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac, l’institution policière a opté pour une posture non-interventionniste, en dépit des nombreux appels en détresse, qui ont été lancés par la population aux abois. Attendre cinq (5) jours, avant d’intervenir sur le terrain, c’est tout simplement choisir délibérément de livrer la population à la fureur des gangs.

248. Deux (2) mois après le Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac, les autorités judiciaires, pour leur part, pataugent dans des poursuites, qui ne sont pas encore – ou ne seront jamais, plus vraisemblablement – engagées. Pourtant, parallèlement, la chasse aux sorcières continue avec les membres de la base des Chen Mechan, qui, sous prétexte que des membres de la population fournissent des informations au gang des 400 Mawozo, assassinent des jeunes.

249. Par ailleurs, le Rnddh ne comprend pas que, dans ce contexte de terreur, où des membres de la population sont assassinés chaque jour, des journalistes ainsi que d’autres personnalités publiques mènent campagne pour des bandits armés, dans une tentative échouée d’avance de les présenter comme des citoyens paisibles ou comme des groupes armés défendant une vision.

250. Le Rnddh souligne, à l’attention de tous et de toutes, que les gangs armés, qui sèment le deuil dans les familles depuis tellement longtemps, constituent de véritables associations de malfaiteurs. Celles-ci comptent en leur sein des criminels, qui veulent contrôler des zones stratégiques pour préserver leurs intérêts politiques, économiques, électoralistes et financiers, tout en permettant à leurs proches au pouvoir, de s’y maintenir.

251. De plus, le Rnddh rappelle que, dans des cas de violations massives de droits humains, tel qu’enregistré à la Plaine du Cul-de-Sac, il est du devoir des autorités étatiques d’intervenir, pour protéger la population et garantir la jouissance des droits à la vie, à la sécurité, à la circulation et au logement. Il s’agit de droits consacrés, tant par la Constitution haïtienne en vigueur que par différents instruments internationaux et régionaux de protection des droits humains, auxquels Haïti est partie.

252. Jusqu’à date, les autorités étatiques restent muettes sur les événements de la Plaine du Cul-de-Sac, un mutisme qui clame fort leurs accointances avec les bandits armés.

253. Le Rnddh, fort de tout ce qui précède, recommande aux autorités étatiques de :

• Fournir un accompagnement financier, médical et psychologique aux survivants-tes du Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac ;

• Porter la Dcpj à enquêter sur les actes attentatoires aux vies et aux biens, perpétrés à la Plaine du Cul-de-Sac du 24 avril au 6 mai 2022, en vue de transmettre aux autorités judiciaires un rapport circonstancié, pour la mise en mouvement de l’action publique à l’encontre de tous ceux qui y sont impliqués ;

• Porter la Dcpj à enquêter sur les relations de proximité existantes entre certains journalistes, des personnalités publiques et des bandits armés ;

• Porter l’IgPnh à enquêter sur l’implication de matériels et équipements policiers - notamment de l’Udmo - dans la perpétration du Carnage de la Plaine du Cul-de-Sac ;

• Mettre fin aux distributions des armes et munitions aux bandits armés ;

• Remettre en place les brigades anti-contrebande, en vue de freiner l’entrée sur le territoire national, des armes et munitions illégales.