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Haïti : L’Anmh appelle à un réveil citoyen contre la criminalité

Par Marlyne Jean

P-au-P, 04 avril 2022 [AlterPresse] --- Interpellée par le phénomène de l’insécurité, qui gangrène la société, l’Association nationale des médias haïtiens (Anmh) appelle la population à se réveiller contre les actes de criminalité, dont le kidnapping en Haïti, lors d’une émission spéciale, le dimanche 3 avril 2022, sur le climat de terreur qui y fait rage, suivie par l’agence en ligne AlterPresse.

L’émission a été diffusée sur les différents médias, membres de l’Anmh à Port-au-Prince et dans les villes de province.

« Il faut que la peur change de camp. Il faut que les gens sachent qu’ils ne doivent pas avoir peur et arrêtent de penser que ce sont les délinquants, qui ont droit de cité. Nous devrions savoir que nous sommes des personnes et que nous devrions réagir », déclare le président de l’Anmh, Jacques Sampeur, directeur général de la Radio Antilles Internationale.

D’autres pays, qui étaient occupés dans le passé, sont devenus des puissances mondiales aujourd’hui, grâce au réveil de leurs populations, ajoute-t-il.

L’Anmh déplore le climat de terreur, qui paralyse toutes les branches des activités économiques en Haïti, comme dans le grand Sud (départements du Sud-Est, du Sud, de la Grande Anse et des Nippes / Sud-Ouest d’Haïti), où il est compliquee de se rendre, depuis le premier juin 2021, en plus du problème de kidnapping, souligne Hérold Jean François, président directeur général de la Radio Ibo, membre de l’Anmh.

Les produits alimentaires locaux ne peuvent pas, non plus, rentrer à Port-au-Prince, poursuit-il.

« Nous avons l’impression que ce qui se passe ne concerne personne… Cela ne peut pas continuer ainsi. Depuis l’échec de l’opération de la police au Village de Dieu, le vendredi 12 mars 2021, où 5 policiers ont été tués, nous ne ressentons plus, dans la société, une velléité d’expression d’État, pour mettre un frein au kidnapping et au banditisme », critique-t-il.

« La conclusion que nous pouvons en tirer, c’est que ces bandits qui agissent sont des partenaires de l’État. La création, en juin 2020, de la fédération des gangs G9 an fanmi e alye (en famille et alliés), applaudie par le Bureau intégré des Nations unies en Haïti (Binuh) dans un rapport officiel, nous montre que nous avons affaire à une association de malfaiteurs et que l’État est l’un des alliés, car il n’a pas levé le petit doigt », affirme-t-il.

Le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh) avait dénoncé, lors d’une réunion virtuelle organisée le mercredi 8 septembre 2021, avec le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (Onu), le support du Binuh à la fédération des gangs armés, dite G9 an fanmi ak alye.

Le Binuh avait estimé que cette fédération était une bonne chose pour le pays et qu’elle aurait conduit à une réduction des homicides.

L’Anmh déplore aussi cette situation d’insécurité, qui résulte, notamment, de la négligence de la société, de l’indifférence et de l’irresponsabilité de l’État, a affirmé la journaliste Liliane Pierre-Paul, co-fondatrice de la RadioTélé Kiskeya, membre de l’Anmh.

« Nous avons des bandits (comme un réservoir inépuisable), parce que nous avons abandonné nos quartiers. Il n’y a aucun investissement dans le domaine social, culturel et éducatif. Nous ne pouvons pas avoir un pays, où la majorité de la population est marginalisée », critique, d’une voie émue, Liliane Pierre-Paul.

La journaliste plaide pour des accompagnements sociaux, économiques et politiques, et la mise en place de mécanismes répressifs pour contrer le phénomène de l’insécurité.

« La société doit prendre conscience et cesser de prendre le pays comme une résidence secondaire ».

Liliane Pierre-Paul s’indigne contre cette mentalité d’indifférence, par rapport à ce qui se passe dans l’environnement de la république d’Haïti, qui cesse d’être considérée comme un pays par les gens.

131 personnes ont été tuées, de janvier à mars 2022, dans les actes de violences enregistrées dans la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince, d’après la Commission épiscopale nationale (catholique romaine) Justice et Paix (Ce-Jilap).

Lors de sa participation à cette émission spéciale, le dimanche 3 avril 2022, par l’Anmh, la directrice exécutive de la Ce-Jilap, Jocelyne Colas, a dénoncé le manque de volonté politique des autorités étatiques, pour résoudre le problème de l’insécurité dans le pays.

A travers cette émission, animée par les journalistes Wendell Théodore (Radio Télé Métropole), Roberson Alphonse (Radio Magik 9, journal Le Nouvelliste), Marie Raphaëlle Pierre (Radio Ibo) et Jean Monard Métellus (Radio Télé Vision Caraïbes / Rtvc), l’Anmh a diffusé plusieurs reportages sur l’insécurité, produits par des journalistes travaillant dans les médias membres de l’Anmh.

Cette initiative a également réuni des psychologues, des sociologues, des responsables d’organisations de droits humains, des criminologues, des représentants de chambres de commerces, des représentants d’Organisations non gouvernementales (Ong), des économistes, qui ont, toutes et tous, partagé leurs points de vue sur la situation de terreur et de criminalité, entretenue, en toute impunité, par les gangs armés en Haïti. [mj emb rc apr 04/04/2021 16:00]