P-au-P, 05 juillet 2005 [Alter Presse] --- Des organisations sociales projettent d’organiser, ce jeudi 7 juillet 2005, une activité culturelle devant le siège du Ministère du Commerce et de l’ Industrie (MCI) dans la capitale haïtienne, à l’idée de porter les autorités intérimaires à plancher sur la cherté de la vie et la nouvelle hausse du prix du carburant enregistrée le 30 juin dernier sur le marché local.
« Nous sommes très préoccupés par cette situation qui se développe dans le pays. Au niveau de la société civile, nous organisons des sit-in devant le ‘Ministère de la Vie chère’ (forme péjorative utilisée pour ridiculiser le Ministre du Commerce et de l’Industrie) dans l’objectif de faire valoir nos revendications, de porter les autorités à améliorer les conditions de vie dans le pays », a déclaré à AlterPresse Carole Jacob, une des dirigeantes de la Solidarité des Femmes Haïtiennes (SOFA).
Parallèlement, un regroupement de chauffeurs de transports publics, dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, envisage de recourir à des mouvements de protestattion, dont la grève de transports, pour demander au gouvernement provisoire le retrait de la mesure d’augmentation, voire des ajustements de tarifs sur différents trajets, a appris AlterPresse.
La nouvelle augmentation des prix des produits pétroliers sur le marché national, qui aura des répercussions sur les prix des produits de première nécessité, ne fera que contribuer à une détérioration poussée des conditions de vie dans le pays, prédit la responsable de la SOFA.
Interrogée par AlterPresse sur l’absence d’Haïti au premier Sommet « Petrocaribe » déroulé à Puerto La Cruz, près de Caracas (Venezuela) le 29 juin 2005, la militante féministe estime que la gestion de l’équipe actuelle de transition en Haïti n’a pas divorcé d’avec les manœuvres politiciennes de l’ancien régime Lavalas de Jean Bertrand Aristide.
« A l’heure actuelle, le Venezuela (cinquième pays exportateur mondial de
pétrole) joue avec son pétrole un rôle important dans le continent américain. Des efforts auraient pu être déployés pour faciliter la présence d’Haïti à ce sommet. En outre, le gouvernement intérimaire devrait entretenir des démarches en construisant une diplomatie, un bon service de relations internationales incluant des membres d’organisations de la société civile ayant des rapports avec Hugo Chavez, Fidel Castro en vue de rétablir les relations d’Haïti avec les pays réfractaires à la chute d’Aristide », a estimé Carole Jacob.
Chavez, qui a toujours vu dans la chute de l’ancien régime un rapt concocté par une partie de la communauté internationale, considère que l’ex-dictateur Jean Bertrand Aristide serait jusqu’à présent le président élu d’Haïti.
Au Sommet Petrocaribe, sur les 16 pays présents, 14 ont approuvé la déclaration finale de Puerto La Cruz visant la création d’une compagnie devant garantir le ravitaillement des nations de la Caraïbe en produits pétroliers.
Dommage que, pour les Caraïbes, c’est le président Leonel Fernandez de la République Dominicaine qui a le leadership du pétrole, a déploré la dirigeante de la SOFA qui pense qu’Haïti serait en mesure de pallier certains problèmes si elle était présente à ces assises.
« Lorsqu’on dispose d’une industrie de raffinement de pétrole, la chance d’ être victime des spéculations internationales est très minime. Ainsi, sera-t-on en mesure de créer des milliers d’emplois dans le pays », a-t-elle ajouté.
Carole Jacob, qui affirme n’avoir pas l’intention d’abandonner le mouvement, a fait savoir que les organisateurs avaient observé une pause, pendant quelques semaines, afin d’étudier d’autres stratégies de lutte visant à convaincre les autorités étatiques de la justesse de leurs desiderata.
La dernière activité publique des secteurs sociaux contre la hausse, sur le marché national des prix des produits pétroliers, remonte au vendredi 17 juin 2005 devant le bureau du Ministère du Commerce, quand, dans le cadre d’ une levée de boucliers mise en œuvre depuis plusieurs mois, d’autres appels avaient été lancés aux autorités de transition pour exiger la baisse du coût de la vie aux fins de soulager le sort des masses vulnérables du pays.
« Le gouvernement peut avoir d’autres priorités, mais ce qui nous préoccupe actuellement c’est la violation systématique par le régime en place des droits à la nourriture, à la santé, le droit de vivre dans un pays sécuritaire. L’insécurité qui empêche le fonctionnement normal du secteur commercial, vient de nos jours s’ajouter à la liste des malheurs du peuple haïtien et renforce la misère chez les déshérités du pays », avaient scandé les manifestants se référant à la montée vertigineuse des prix des biens essentiels sur le marché national.
Yves Barthélemy, professeur à l’Université d’Etat d’Haïti, avait alors indiqué que la mobilisation avait pris de l’ampleur.
« Nous avons l’adhésion d’un ensemble d’autres secteurs qui viennent de l’ université et même des employés du ministère du commerce. Les dirigeants sont toujours insensibles aux cris d’alarme de la population, et, quant aux prix, ils ne cessent de grimper depuis le début des mobilisations », s‘était indigné le professeur.
« Nous crevons tous de faim et ils nous parlent d’élections, ils ont 3 ans d ’exonérations sur les importations, et ils nous parlent de contrat social », étaient, entre autres, les refrains entonnés par les manifestants.
Jusqu’à date, le régime en place est resté sourd aux requêtes des organisations sociales qui réclament une diminution du profit de l’Etat sur le carburant, principal responsable, selon elles, de l’aggravation de la situation de misère qui s’installe dans le pays.
L’Etat devrait percevoir 20 gourdes (US $ 0.50 environ) sur le gallon du carburant au lieu de 50 gourdes, tandis que les distributeurs de produits pétroliers devaient consentir à diminuer de moitié leur profit (10 gourdes au lieu de 20 gourdes) sur chaque gallon de carburant, n’ont pas cessé de suggérer les secteurs sociaux. [do rc lf apr 05/07/05 15 : 00]