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Haïti : Sensibiliser les citoyens de la commune des Gonaïves sur leur rôle dans le développement local

Gonaïves (Haïti), 13 mai 2021 [AlterPresse]--- C’est avec une représentation de théâtre dans les rues des Gonaives que le projet Toujou Pi Fò Ansanm, cofinancé par l’Union Européenne, a choisi, le 12 mai 2021, de sensibiliser les citoyens et citoyennes de cette commune sur des thématiques importantes, comme la décentralisation, la participation citoyenne, la concertation entre autorités locales et la société civile, la transparence, la reddition de compte et l’amélioration de la qualité de la vie.

Environ une quinzaine de comédiens, comédiennes, danseurs et danseuses ont simulé une mission d’évangélisation mélangeant protestantisme, vodou et danses urbaines, afin d’attirer l’attention du public sur le rôle incontournable des citoyens et citoyennes dans le développement local.

En plus de la représentation théâtrale, diverses pancartes portant des slogans/revendications autour du développement local et l’amélioration de la qualité de la vie ont été exhibés par les comédiens.

« Le dialogue entre la société Civile et les autorités locales est fondamental pour l’amélioration de la vie de la communauté », « Ne jamais rater l’occasion de dire son mot sur la vie de sa communauté », « Citoyens, citoyennes, vous êtes le centre du développement de votre communauté », sont entr’autres slogans inscrits sur les pancartes.

Ces jeunes proviennent de 9 troupes de 4 communes du département que sont Terre Neuve, Saint-Michel de l’Attalaye, Verrettes et les Gonaives. Ils ont participé à plus de 6 semaines de répétition-formation sous la houlette du comédien, conteur et diseur international, Chelson Ermoza, accompagné de la comédienne Abydarlyne Jouth et du tambourineur expérimenté Rony Joseph.

La pièce a fait le tour des Gonaïves, suivie par des dizaines de riverains de tous âges. Certains reprennent avec les comédiens les chants évangéliques, d’autres applaudissent. Le public danse et chante au son des roulements du tambour tout en chantant avec les « comédiens-missionnaires » : « Ne gaspillez pas votre temps. Si aujourd’hui est le dernier jour, employez vos dons et vos talents ».

De temps en temps, un « Amen », un Alléluia, un « Gloire à Dieu », un « Le Sang de Jesus Biw » est crié par une voix dans le public. L’ambiance voulue par les comédiens est créé. La foule grossit un peu. Et près de la Mairie des Gonaïves, la troupe « Toujou Pi Fò Ansanm » s’arrête brusquement.

Un comédien semble être possédé par le « Saint Esprit ». Il parle une langue apparemment inconnue de tous, mais que seul un interprète du groupe peut traduire.

« Gonaïves, Là-Haut vous envoie dire que vous ne pouvez pas vivre en côtoyant les détritus tous les jours. Le Saint Esprit n’aime pas les gens malpropres », lance l’interprète traduisant les sons gutturaux du possédé. Et dans le public, un élève crie « Jésus-Christ, frappez-les, la ville est trop sale ».

« Le Saint Esprit vous dit que les problèmes de la communauté, les besoins de la commune doivent préoccuper tout bon citoyen. La véritable démocratie repose sur la transparence, la bonne gouvernance, la reddition de compte, la participation citoyenne. Les citoyens doivent questionner les autorités sur leur travail dans la commune. Ils doivent dialoguer constamment. C’est la seule façon de commencer à vivre le paradis sur terre », conclut-il.

Roulement de tambour. Les fidèles se transforment en breakdancer, exécutant des mouvements acrobatiques, alors que la foule applaudit. Le Break dance est à l’honneur sous les vifs applaudissements du public. Cependant, certains commencent à exprimer des doutes sur l’authenticité de ce groupe « religieux ».

« C’est du théâtre. Cela ne peut être autrement, Franchement ! Ce n’est pas une évangélisation réelle du Grand Dieu », affirme une dame dans la foule en se basant sur le fait que vodou, hip hop et christianisme se sont croisés dans la représentation de théâtre de rue à vocation sensibilisatrice.

Le théâtre de rue un outil efficace

Le théâtre de rue connait une expansion remarquable en Haïti depuis les premières représentations de la Brigade d’intervention Théâtrale d’Haïti (BIT-Haïti) en 2011. Il est de plus en plus popularisé comme outil de sensibilisation de masse. Et c’est non sans fierté que Chelson Ermoza, membre de BIT-Haïti, fait cette nouvelle expérience avec les jeunes comédiens, comédiennes, danseurs, danseuses de l’Artibonite dans le cadre de Toujou Pi Fò Ansanm.

« C’est l’un des outils de sensibilisation les plus efficaces de nos jours. Il permet de se rapprocher des populations pour mieux communiquer les messages et attirer l’attention sur une série de thématiques. Le théâtre de rue dans son organisation et dans sa représentation offre la possibilité de se mettre ensemble pour se renforcer », soutient Ermoza d’un air satisfait.

Denilson Normil, comédien, considère le théâtre de rue comme « un moyen de revendication » pour les citoyens avec les citoyens, et croit que toute l’originalité vient du fait que les scènes ne sont pas étrangères à la réalité des communautés.

Persuadée que c’est le meilleur choix de sensibilisation que le projet ait pu faire, Milanda Jean, habituée des performances de rue avance que toute la force de l’activité réside dans la surprise ou le choc du public et le fait de faire de lui un acteur du spectacle sans s’en rendre compte.

« C’est un moyen de communication très sur », avance-t-elle.

« Certains projets ne répondant pas aux besoins des citoyens sont réalisés dans certaines communes parce que les citoyens ne sont pas vraiment impliqués dans la chose communautaire. S’il n’y a pas de dialogue entre les Autorités et les organisations de base comme des acteurs capables d’identifier les vrais problèmes, les actions exécutées dans les communautés ne pourront jamais satisfaire les gens. La représentation d’aujourd’hui veut faire circuler le message de la nécessité de la participation citoyenne dans le développement local », précise Ermoza.

Ce spectacle itinérant a déjà eu lieu à Saint-Michel de l’Attalaye (8 mai), à Terre Neuve (11 mai), aux Verrettes (dans la matinée du 12 mai) avant d’avoir sa dernière représentation dans la cité de l’Indépendance, nous informe Madjolah Pierre, Coordonatrice de Communication du projet, précisant que d’autres activités comme des campagnes et des concours de musique renforcent la sensibilisation des citoyens, citoyennes du département comme acteurs centraux du développement.

Lancé en octobre 2018 et exécuté par un consortium international dirigé par le Groupe Medialternatif, le projet TPFA, en favorisant le renforcement des interactions entre Organisations de la Société Civile (OSC) et les Autorités Locales (AL), vise leur participation efficace à la définition, le suivi et l’évaluation des priorités du développement local, selon Pierre [apr 13/05/2021 10 :18]