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Haïti : Des entraves à l’enquête sur l’assassinat de Jovenel Moïse, révèle la chaîne américaine Cnn

P-au-P, 27 juill. 2021 [AlterPresse] --- Il existe de nombreuses entraves à l’enquête sur l’assassinat, le mercredi 7 juillet 2021, de l’ancien président de facto Jovenel Moïse, en sa résidence privée à Pèlerin 5 (périphérie est de la capitale, Port-au-Prince), selon le site de la chaîne américaine Cnn, consulté par l’agence en ligne AlterPresse.

Parmi les entraves, figurent des menaces de mort, envoyées à plusieurs responsables haïtiens, notamment les greffiers qui assistent cette enquête, des tentatives mystérieuses d’influencer le dossier, des difficultés d’accès à la scène de crime, aux témoins et aux preuves, énumère la chaîne américaine.

Carl Henry Destin, le juge de paix qui a officiellement effectué le procès verbal de la maison et du corps sans vie de Moïse, quelques heures après la fusillade, a été contraint d’entrer dans la clandestinité deux jours plus tard, fait savoir Cnn.

Des documents mentionnent que des greffiers, qui travaillent avec Destin, et d’autres juges d’instruction ont également été visés par ces menaces.

L’Association nationale des greffiers haïtiens (Anagh) a appelé à une attention « nationale et internationale » aux menaces de mort, reçues par deux greffiers locaux, Marcelin Valentin et Waky Philostene, à travers une lettre ouverte publiée le 12 juillet 2021.

La lettre exige une action du titulaire du Ministère de la justice et de la sécurité publique (Mjsp), Rockefeller Vincent, pour garantir leur sécurité.

Les greffiers ont déposé des plaintes formelles, les samedi 17 et mardi 20 juillet 2021, pour avoir reçu des menaces de mort, à partir d’un même numéro de téléphone.

Selon le registre officiel des plaintes, Valentin a été menacé de mort, s’il refusait d’ajouter certains noms dans son rapport ou de modifier les déclarations des témoins.

Les greffiers et juges sont obligés de fuir leur domicile, suite à des menaces de mort à leur encontre, confirme à AlterPresse/AlterRadio l’Association nationale des greffiers haïtiens (Anagh).

Des démarches, menées auprès des autorités pour renforcer la sécurité des magistrats, demeurent encore sans résultat, fait savoir Me. Martin Ainé, président de l’Anagh, appelant les greffiers et juges à porter plainte.

Irrespect du protocole de traitement des preuves et de la scène de crime

Les enquêteurs judiciaires avaient été renvoyés à plusieurs reprises, lorsqu’ils ont tenté de regarder les images de vidéosurveillance, détenues par la police, selon les témoignages de sources à Cnn.

Destin a également déclaré que lui et d’autres n’avaient pas été immédiatement autorisés à entrer sur le site, où Moïse a été attaqué vers 1:00 du matin (5:00 gmt), le mercredi 7 juillet 2021.

« Malgré son rôle essentiel dans la documentation de la scène, la justice n’a pas été autorisée à pénétrer dans le périmètre de la police pendant des heures. Un délai très inhabituel, qui, selon les initiés, soulève le spectre d’une falsification de preuves ».

Lors d’opérations policières, suite à l’assassinat de Jovenel Moïse, plusieurs suspects supposés auraient été tués au coin de la rue, où se situe la résidence de la victime.

Plusieurs voitures, stationnées dans la zone et qui appartiendraient aux assaillants, ont également été incendiées, un acte de destruction que les autorités attribuent aux résidents locaux en colère, rapporte Cnn.

Déplacer des corps et permettre la destruction de preuves potentielles constituent un signal d’alarme pour une éventuelle falsification de la scène de crime, selon les experts et les initiés, cités par la chaîne américaine.

« Il y a beaucoup de choses qui n’ont pas de sens dans la gestion de la scène de crime. Des voitures ont été incendiées… c’est le genre de choses qui semblent incompatibles avec la recherche de la vérité exacte », a déclaré Brian Concannon, un expert américain du système juridique haïtien.

Les précisions de la Police nationale d’Haïti

Jean Laguel Civil, coordinateur de la sécurité du président, a été arrêté le 26 juillet 2021, a-t-on appris.

Le chef de l’Unité de sécurité générale du palais national (Usgpn), Dimitri Hérard, est toujours en isolement. Vingt-quatre policiers font l’objet d’une enquête administrative, selon les autorités policières.

Trois ressortissants étrangers, résidant aux États-Unis d’Amérique, auraient participé au financement de l’assassinat de facto, Jovenel Moïse.

La Pnh annonce avoir procédé à trois nouvelles arrestations et à la saisie d’environ une soixantaine d’armes à feu, entre autres, dans le cadre de l’enquête relative à l’assassinat de Jovenel Moïse.

59 armes à feu ont été saisies, dont 45 fusils et 14 pistolets. Certains appartiendraient à la Pnh.

Des centaines de cartouches de divers calibres, un drone, trois grenades et des gilets pare-balles ont été également retrouvés dans ces résidences.

Les trois personnes arrêtées sont les policiers nationaux Boni Grégoire et Clifton Hyppolite, ainsi que le citoyen Dominick Cauvain, qui aurait été présent dans toutes les réunions de planification concernant cet assassinat, selon la Pnh.

L’incertitude plane autour de l’enquête qui ne permet pas, jusqu’à présent, d’identifier les véritables commanditaires et auteurs intellectuels de l’assassinat de Jovenel Moïse.

Lors des funérailles de son mari, le vendredi 23 juillet 2021, l’épouse de l’ancien président, Martine Joseph Moïse, a affirmé que les assassins « sont là, ils nous regardent, nous écoutent, dans l’espoir de nous faire peur ». [emb gp apr 27/07/2021 12:45]