P-au-P, 21 juill. 2021 [AlterPresse] --- « Dans la gouvernance du pays, l’option d’un exécutif, sans un président de la république, ayant à sa tête un premier ministre, aura de graves conséquences sur l’avenir du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj), en particulier, et sur toute l’institution judiciaire », mettent en garde l’Association professionnelle des magistrats (Apm), l’Association nationale des magistrats haïtiens (Anamah), le Réseau national des magistrats haïtiens (Renamah) et l’Association des juges de paix haïtiens (Ajupha), dans une prise de position dont a pris connaissance l’agence en ligne AlterPresse.
Le Secteur démocratique et populaire (Sdp) déclare appuyer la position des différentes associations de magistrats-juges, qui rejettent totalement l’option d’un exécutif sans président, imposé par la communauté internationale.
Cette option, contraire à la loi, entravera la bonne marche du pays, affirme le Sdp.
Les associations de magistrats-juges souhaitent que leur position soit prise en compte dans toutes démarches, visant à résoudre la crise qui met en péril l’État de droit et la démocratie en Haïti.
Toute solution doit nécessairement passer par la préservation et le renforcement des institutions de la république, soulignent les associations de magistrats-juges.
Sous la pression internationale, Ariel Henry a été installé, le mardi 20 juillet 2021, comme nouveau chef de gouvernement de facto, après la formation, la veille, de son cabinet ministériel.
Le premier ministre de facto entend privilégier l’ordre et la sécurité pour pouvoir assurer le bon déroulement des élections en Haïti.
Ariel Henry prend les rênes du pays sans un consensus véritable avec les partis politiques de l’opposition et la société civile organisée, a fustigé la Coalition des acteurs de la société civile.
Cette coalition d’acteurs de la société civile dénonce le comportement de la communauté internationale, spécialement le Bureau intégré des Nations unies en Haïti (Binuh) et le Core Group [1], qui ont imposé un gouvernement avec des membres du Parti haïtien tèt kale (Phtk) et alliés, entraînant le pays dans une faillite totale.
Les associations de juges attirent l’attention sur l’aggravation de la crise politique et institutionnelle, depuis la mort, le 23 juin 2021, du président de la Cour de cassation et du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj), le juge René Sylvestre, et l’assassinat, le 7 juillet 2021, du président de facto Jovenel Moïse.
Elles déplorent le dysfonctionnement, depuis le samedi 3 juillet 2021, du Cspj, en raison de la non installation des nouveaux membres élus et désignés.
Sans président, la Cour de Cassation fonctionne actuellement avec un effectif réduit de juges, alors que, dans les prochains mois, le mandat de certains d’entre eux arrivera à terme, ce qui rendra dysfonctionnelle la Cour de Cassation.
« La Constitution et les lois haïtiennes font du président de la république un pilier incontournable dans le fonctionnement du Cspj et du pouvoir judiciaire. Il a, entre autres, les prérogatives de faire publier, dans le Moniteur, les noms des membres élus et désignés du Cspj, et la réception de leur serment d’usage », rappellent les associations de magistrats-juges.
Aucune solution, qui ne prend pas en compte le fonctionnement régulier du Cspj, seul organe d’administration, de délibération, de contrôle et de discipline du Pouvoir Judiciaire, ne sera acceptée, avertissent les associations de magistrats-juges aux protagonistes politiques et futurs gouvernants. [emb rc apr 21/07/2021 12:15]
[1] Le Core Group est composé des ambassadeurs d’Allemagne, du Brésil, du Canada, d’Espagne, des États-Unis d’Amérique, de France, de l’Union européenne (Ue), du représentant spécial de l’Organisation des États américains (Oea) et de la représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies.