Español English French Kwéyol

Haïti-Justice : Plusieurs organisations de magistrats et de droits humains exigent l’installation des nouveaux membres du Cspj

P-au-P, 05 juillet 2021 [AlterPresse] --- Plusieurs associations de magistrats et de droits humains appellent les magistrats-juges à oeuvrer fermement pour l’installation de la 4e judiciature au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj), rendu inopérant, le vendredi 2 juillet 2021, en raison de l’absence de dispositions administratives institutionnelles adéquates, selon les informations rassemblées par l’agence en ligne AlterPresse.

Depuis plusieurs semaines, les associations de magistrats alertent l’opinion publique sur de nouvelles menaces, dans la lutte pour l’indépendance réelle de la justice en Haïti, qui n’arrive pas encore à s’affranchir de la mainmise du ministère de la justice et d’autres courroies gouvernementales.

Comme elle l’a fait pour le parlement, en janvier 2020, l’équipe de facto voudrait créer une Commission de pouvoir judiciaire (Cpj), pour remplacer le Cspj, analyse Me. Evens Fils, bâtonnier de l’Ordre des Avocates et Avocats de Fort-Liberté (Nord-Est), membre élu au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (2021-2024), pour représenter la Fédération des Barreaux d’Haïti (Fbh).

En juillet 2021, se pose la question de savoir comment les nouveaux membres élus au Cspj pourraient prêter serment devant un président illégal, dont le Cspj avait reconnu, le 6 février 2021, la fin de mandat constitutionnel à la date du dimanche 7 février 2021.

Autre hic, c’est le décès, à 58 ans, le mercredi 23 juin 2021, de Me. René Sylvestre (né à Saint-Marc le 14 septembre 1962 et mort à Mirebalais le 23 juin 2021, des suites du Covid-19), président de la Cour de Cassation et président du Cspj.

« Nous devons prendre notre destin en main pour combattre, sans merci, ce plan macabre et pour exiger l’installation de la 4e judiciature. Nous ne devons aucunement ménager nos forces dans la lutte pour l’indépendance réelle de la justice haïtienne », souligne Me. Wando Saint-Villier, le doyen du tribunal civil de Jacmel, représentant élu des Tribunaux de première instance devant siéger au Cspj, dans un message adressé aux magistrats le dimanche 4 juillet 2021.

Dans des circonstances normales, il reviendrait à un président régulier de la république de choisir l’un des juges de la Cour de Cassation pour faire office de nouveau président du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, de publier les noms des membres élus et de déterminer une date pour la cérémonie d’installation des membres élus au Cspj.

Ce qui aurait dû avoir lieu, avant la date du 2 juillet 2021.

Comme les associations de magistrats-juges ont déjà émis un avertissement explicite, Me Wando Saint-Villier, représentant élu des tribunaux de première instance, rejette, à l’avance, toute éventuelle tentative de mise en place d’une commission, par le ministère de la justice, pour assumer les responsabilités afférentes au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire.

Une telle « commission exercerait les prérogatives constitutionnelles et légales, conférées aux conseillers. Elle serait intronisée, après la formation d’un nouveau gouvernement », avait signalé, dans un message, le titulaire de facto de la justice, Rockefeller Vincent.

Une telle commission, qui remplacerait le Cspj, engendrerait une crise sans précédent au sein du système judiciaire, soutient l’Association professionnelle des magistrats (Apm).

L’Apm déplore l’attitude de Me René Sylvestre, président de la Cour de cassation de la république et du troisième Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (décédé du coronavirus le mercredi 23 juin 2021) qui n’a pas assumé ses responsabilités, en acheminant au président de la république pour nomination, selon le vœu de l’article 6 de la loi portant création du Cspj, les noms des membres devant composer la 4e judiciature, suite aux élections organisées en avril 2021.

« Le refus catégorique du vice-président du Cspj de prendre charge, après le décès du président Sylvestre, et d’acheminer les noms au président de la république, en dépit de l’insistance des magistrats membres du Conseil, est davantage confus et stupéfiant », estime l’Apm.

De son côté, le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh) préconise la porsuite de la lutte, chez les magistrats-juges, pour rétablir le Cspj dans ses droits, mais surtout pour exiger le retrait de l’arrêté mettant à la retraite les juges à la Cour de Cassation Wendelle Coq Thélot, Yvickel Dieujuste Dabrézil et Joseph Mécène Jean-Louis.

Les noms de ces trois juges, inamovibles, de la Cour de cassation, dont le mandat court jusqu’en 2029, étaient sur la courte liste de l’opposition pour remplacer Jovenel Moïse, à la fin de son mandat constitutionnel, le 7 février 2021.

« S’ils mènent seulement une bataille pour rétablir le Cspj, Jovenel Moïse pourrait s’entendre avec les nommés à la Cour de Cassation (Octélus Dorvilien, Louiselmé Joseph et Pierre Harry Alexis, qui n’ont jamais prêté serment comme nouveaux juges). S’ils disent combattre pour l’État de droit et l’indépendance du système judiciaire, ils doivent le faire bien. Les magistrats ne doivent pas alimenter ce qui se passe », affirme Pierre Espérance, le directeur exécutif du Rnddh.

Il faut qu’il y ait le retrait de cet arrêté, pour permettre à la Cour de Cassation de redevenir fonctionnel, souhaite le Rnddh, qui rappelle combien tous les indicateurs de l’État de droit en Haïti sont au rouge avec un pouvoir exécutif qui continue d’instrumentaliser toutes les institutions du pays. [mj rc apr 05/07/2021 12:55]