P-au-P, 18 juin 2021 [AlterPresse] --- Entre les 1er février et 31 mai 2021, des groupes criminels ont été responsables de 78 homicides et d’innombrables agressions et viols, indique la représentante spéciale du secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, l’Américaine Helen Ruth Meagher La Lime, lors d’une déclaration, le jeudi 18 juin 2021, devant le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (Onu), à New York, aux États-Unis d’Amérique, dont a pris connaissance l’agence en ligne AlterPresse.
Il est du devoir des autorités haïtiennes de mettre fin à la violence en Haïti. Les auteurs de tels actes doivent également être tenus responsables de leurs crimes, souhaite la diplomate onusienne.
Plusieurs incidents préoccupants et de graves atteintes aux droits humains, perpétrés par des gangs armés, contre les communautés civiles, ont été enregistrés, ces derniers mois, dans le pays, déplore-t-elle.
« En outre, des épisodes répétés de violence de gangs ont entraîné le déplacement de plus de seize mille personnes des quartiers métropolitains de Port-au-Prince de Bas-Delmas, Bel-Air, Martissant, Tabarre-Issa et Toussaint Brave depuis le début de l’année. »
Le premier ministre de facto par intérim, Claude Joseph, impute la responsabilité de la situation socioéconomique difficile, qui paralyse le pays, à une frange de l’opposition, lors de son intervention de l’Onu.
« Le pays connaît une situation socio-économique difficile, caractérisée par des tentatives récurrentes de déstabilisation et des troubles à l’ordre public, orchestrés par une certaine frange de l’opposition, qui ne jure que par le désordre et l’instabilité », allègue Claude Joseph.
C’est le pouvoir délinquant actuel, qui a créé, fédéré et alimenté les gangs en armes à feu, munitions et argent, pour créer des troubles dans le pays et un climat de peur chez la population, dans le but de continuer à régner, affirme, à AlterPresse/AlterRadio, le porte-parole de l’organisation du peuple en lutte (Opl), Danio Siriac, réagissant à ces accusations, qu’il qualifie de mensongères.
L’Opl dénonce une complicité entre les Nations unies et le président de facto Jovenel Moïse, dans la perspective de réaliser un référendum inconstitutionnel et illégal, reporté sine die par le gouvernement, qui invoque l’épidémie de Covid-19 (le nouveau coronavirus).
Claude Joseph sollicite l’appui de la communauté internationale, en termes d’assistance technique et de renforcement de la capacité opérationnelle de la Police nationale d’Haïti (Pnh), pour pouvoir combattre les actes de banditisme et de kidnapping, en vue de rétablir la sécurité en Haïti.
Il a aussi réitéré la volonté de l’équipe de facto, qui s’est accaparé le pouvoir, depuis le 7 février 2021, d’organiser les élections dans le pays, tentant de rassurer que la question cruciale de la sécurité serait en cours de solution, dans tous ses aspects.
« L’environnement sécuritaire, le contexte sociopolitique actuel rendent très difficile, pour ne pas dire impossible, la mobilisation de la population pour sa participation à un quelconque processus électoral », rétorque, pour sa part, Me. Chantal Hudicourt-Ewald, membre de la société civile haïtienne et ancienne membre de l’Assemblée Constituante de 1986-1987.
La première préoccupation de la population haïtienne, majoritairement pauvre, qui vit dans la précarité financière et sécuritaire, tourne autour de la satisfaction de ses besoins primaires, souligne l’avocate.
Les gangs font la loi, kidnappent, volent, violent, et ces crimes n’épargnent aucune communauté, notamment celle des quartiers populaires, dénonce Me. Chantal Hudicourt-Ewald.
Malgré les mesures, sans cesse annoncées par le Conseil supérieur de la police nationale (Cspn), la situation de terreur continue de régner dans plusieurs quartiers de la capitale, Port-au-Prince, notamment à Martissant (sud de la capitale) et au bas de Delmas.
Depuis les affrontements, qui ont éclaté le mardi 1er juin 2021, entre les gangs armés, la situation reste toujours tendue à Martissant, où de nombreuses familles ont été obligées de fuir vers d’autres lieux plus sécuritaires.
Ces tensions persistent encore, ce vendredi 18 juin 2021, au bas de Delmas et dans plusieurs autres quartiers, dans la zone metropolitaine de la capitale, Port-au-Prince, où des tirs sporadiques ont été entendus, lors d’affrontements armés entre des membres de la fédération de gangs dénommée G9 an fanmi ak alye et des agents de la Police nationale d’Haïti (Pnh).
Ce climat de terreur, qui règne au bas de Delmas et dans d’autres quartiers, a fait également fuir plusieurs familles.
Le Bureau intégré des Nations unies en Haïti (Binuh) avait critiqué l’inefficacité des mesures, prises par les pouvoirs publics, pour lutter contre la criminalité et la violence des bandes armées en Haïti, dans un récent rapport.
Pour souligner cette inefficacité, le Binuh met en avant plusieurs affaires graves, notamment l’évasion de nombreux détenus, survenue à la prison de la Croix-des-Bouquets (nord-est de la capitale), le jeudi 25 février 2021, l’opération de police ratée à Village de Dieu le vendredi 12 mars 2021 et les attaques menées par des bandes organisées à Bel Air (au centre-ville), les mercredi 31 mars et jeudi 1er avril 2021.
Le Binuh évoque aussi le sentiment d’insécurité, exacerbé par la flambée de certaines formes de criminalité, dont les enlèvements et séquestrations de personnes qui ont connu une augmentation de 36 % au cours des quatre premiers mois de l’année 2021. [mj emb rc apr 18/06/2021 16:50]