P-au-P, 12 mai 2021 [AlterPresse] --- Tout en continuant d’appeler la population à se mobiliser pour défendre leurs droits et leur dignité, le Réseau national de défense de droits humains (Rnddh) dénonce un pouvoir « délinquant » qui banalise la vie des citoyennes et citoyens en Haïti, dans une interview à l’agence en ligne AlterPresse.
« Depuis une semaine, le pouvoir à travers la Commission nationale de désarmement, démantèlement et réinsertion (Cnddr) et le Palais national, a pris la disposition de transférer de l’argent aux gangs du G9 et alliés, pour qu’ils puissent observer une trêve dans les actes de kidnapping. Ils ont déjà commencé à transférer de l’argent aux gangs », fait savoir à AlterPresse, Pierre Espérance, directeur exécutif du Rnddh.
Cette trêve concerne exclusivement le kidnapping. C’est une manœuvre pour montrer à la communauté internationale que les conditions seraient réunies pour pouvoir organiser les élections et le référendum, relève le Rnddh.
Il ne s’agit pas de renforcement de la Police nationale d’Haïti, ni de dispositions du Conseil supérieur de la police nationale (Cspn) pour contrôler les gangs armés. D’autres gangs sont impliqués dans le kidnapping, à part ceux de Gran Ravin et de Village de Dieu, rappelle-t-il.
« Tous les gangs du G9 et alliés sont impliqués dans le kidnapping. Cependant, tous les gangs ne séquestrent pas les otages dans leur fief, ils sont interconnectés et détiennent des otages pour un autre ».
Dans un communiqué, en date du 11 mai 2021, le gouvernement de facto, à travers le Ministère de la culture et de la communication (Mcc), dément les allégations, selon lesquelles il aurait octroyé de l’argent à des gangs armés pour observer une trêve dans les actes de kidnapping en Haïti.
Le Mcc se dit scandalisé d’avoir appris, à travers les médias, de la part de voix autorisées, que le gouvernement et même Jovenel Moïse, dont le mandat a pris fin depuis le 7 février 2021, aurait même payé des gangs pour stopper ou faire baisser le kidnapping dans le pays.
« Le mensonge est donc devenu un cheval de bataille politique et quand il s’avère aussi effronté, il devient ridicule », déclare le Mcc.
Le dialogue, qui avait été engagé par le président de facto avec tous les secteurs de la vie nationale (le ministère de la culture ne mentionne pas les secteurs, avec lesquels un dialogue aurait été engagé), se poursuit, « en vue de trouver enfin un climat d’apaisement, qui soit, d’une part, susceptible de permettre à ce peuple, pris spectaculairement en otage, de mieux respirer, et aux élections suivies du référendum constitutionnel, autant que possible, de se réaliser dans la perspective d’une passation de pouvoir le 7 février 2022 en douce ».
Cependant, au mois d’avril 2021, les actes de kidnapping ont augmenté de 300% en Haïti, où 91 cas d’enlèvement ont été enregistrés, contre 27 cas en mars 2021, selon un rapport de la cellule observation de la criminalité du Centre d’analyse et de recherche en droits humain (Cardh).
Après des négociations avec la Commission nationale de désarmement, démantèlement et réinsertion, les gangs de Gran Ravin et de Village de Dieu, deux des trois principaux groupes armés impliqués dans les actes de kidnapping, ont observé, depuis plus d’une semaine, une pause, a confié une source de la Cndrr au journal Le Nouvelliste.
Ayant procédé à la libération des otages qu’ils détenaient, les gangs affirment qu’ils ne procéderaient à aucun acte de kidnapping pendant cette période, poursuit la source qui n’était pas en mesure de donner des précisions sur la période en question. [mj emb rc apr 12/05/2021 13:25]