1] Feu aux poudres à Port-au-Prince et aux Gonaives 2] Multiplication de missions étrangères à Port-au-Prince à la veille de la mise en application de la résolution de l’OEA
1] FEU AUX POUDRES à€ PORT-AU-PRINCE ET AUX GONAIVES
La situation s’est nettement dégradée aux Gonaives, département de l’Artibonite, suite à l’assassinat a Port-au-Prince le 17 février du député lavalas de cette ville, Marc André Diogène, dont l’enterrement est prévu pour ce 26 février. Des funérailles nationales se dérouleront à la capitale et une autre partie de la cérémonie aura lieu aux Gonaives.
Mais aux Gonaives, la situation est précaire. A part les manifestations qui ont suivi l’assassinat, la tension a régné dans la ville au cours de la semaine écoulée, avec des affrontements armés entre des groupes appartenant à 2 quartiers populaires de la ville. Selon les correspondants locaux, 16 personnes ont été blessées par balles et deux autobus incendiés.
Les groupes sont divisés à propos du maintien en prison d’un certain Guy-Louis Jacques accusé de tentative d’assassinat sur un des chefs de bande. Le 22 février des détonations d’armes de fort calibre ont semé le trouble dans la ville. La police a eu du mal à calmer la situation. Le Commissariat de la ville a même essuyé des tirs et, selon des témoignages, des policiers se sont enfuis. Les renforts venus de Port-au-Prince sont parvenus à rétablir l’ordre, mais la tension demeure.
Un porte-parole de la présidence, Jacques Maurice, a fait savoir que les incidents de Gonaives résultaient d’une tentative de déstabilisation, des armes ayant été distribuées a la population. Il a prévenu que des tentatives pareilles devaient aussi se produire en ce début de semaine dans plusieurs quartiers populaires de la capitale. Interrogé par Radio Kiskeya, Jacques Maurice n’a pas indiqué les secteurs a l’origine de ces opérations. Dans une interview a Radio Haïti, le porte-parole a indiqué que des étrangers se trouvaient en Haïti a des fins de déstabilisation.
Le président Jean-Bertrand Aristide a reçu le 25 février au palais national les membres des groupes en conflit aux Gonaives pour les porter à faire la paix. Mais il n’y a pas que Gonaives, puisque la situation continue d’être conflictuelle a Cite Soleil, banlieue nord de Port-au-Prince, tandis que des accès de tension ont été observés les 24 et 25 février dans d’autres quartiers de la capitale.
Les incidents entre bandes rivales à Cité Soleil ont fait ces derniers jours, jusqu’à ce 25 février, environ 20 morts, suivant des évaluations faites par la presse. La population, prise en étau entre les deux groupes, a rendu responsable personnellement le président Aristide. La tension a également régné dans les quartiers de Bel-Air, Poupelard et Fort-National, au cœur de la ville, où des barricades ont été dressées et où des tirs nourris ont été entendus. La police a du intervenir pour rétablir l’ordre.
Des organismes de défense des droits humains dans le sud du pays fustigent le comportement des autorités en place qui "parlent de complot", au lieu d’appréhender les fauteurs de troubles.
2] MULTIPLICATION DE MISSIONS ETRANGàˆRES A PORT-AU-PRINCE à€ LA VEILLE DE LA MISE EN APPLICATION DE LA RESOLUTION DE L’OEA
On assiste ces jours-ci a un ballet de délégations étrangères à Port-au-Prince. La visite attendue ce 27 février en Haïti du Secrétaire Général adjoint de l’OEA, Luigi Einaudi, survient après 4 missions étrangères dans le pays.
Luigi Einaudi vient préparer le terrain pour le déploiement d’une autre mission, celle prévue par la résolution du 15 janvier de l’OEA, en vue, dit le document, du renforcement de la démocratie dans le pays. La semaine dernière, deux membres de la Commission Interaméricaine des Droits Humains de l’OEA, Deborah Benchoam et Raquel Alexandra Poitevien Cabral, etaient à Port-au-Prince pour recueillir des informations autour des incidents du 17 décembre 2001.
Le 17 décembre 2001, le palais national a été attaqué. Le gouvernement avait dénoncé une "tentative de coup d’état" et ses partisans s’en etaient pris aux locaux de partis d’opposition et résidences de responsables politiques qui ont été saccagés et incendiés.
Durant la semaine dernière également une délégation bipartite du Congrès Américain, une autre de l’Institut Républicain International - IRI, du Parti Républicain, au pouvoir aux Etats-Unis, et deux députés du Black Caucus, les démocrates John Conyers et Carrie Meek, ont séjourné en Haiti.
Les membres de l’IRI n’ont fait aucune déclaration publique a l’issu de leur tournée, au cours de laquelle ils ont rencontré divers secteurs, sauf les représentants du pouvoir en place. Ce n’était pas le cas pour les députés noirs américains, qui ont renouvelé leur appui au président Jean Bertrand Aristide, tout en exprimant leur préoccupation sur l’état général du pays.
John Conyers et Carrie Meek ont appelé à la reprise de l’aide étrangère à Haïti, en préconisant son utilisation de manière "convenable". Ils ont aussi désapprouvé la corruption au sein du gouvernement et demandé au Chef de l’état de prendre l’initiative de relance du dialogue avec l’opposition.
En bref :
Le dossier de l’enquête autour de l’assassinat du Directeur de Radio Haïti, Jean Dominique et du gardien de cette station, Jean-Claude Louissaint a été relancé ce 25 février. Le juge Josiar Agnant nouvellement en charge du dossier depuis un mois a entendu la veuve de Jean Dominique, la journaliste Michelle Montas. Elle a exprimé son inquiétude du fait que le mandat du juge Caudy Gassant n’a pas été renouvelé. Sur la liste des personnes convoquées par le juge Agnant, figure également le principal inculpé jusqu’à présent, le sénateur Dany Toussaint.
La Banque de la République d’Haïti a décidé la fermeture de la Banque Haitienne de Développement (BHD), qui serait en situation de faillite.
Le rapport annuel de l’Institut International de la Presse (IPI), mis en ligne cette semaine, décrit Haïti comme l’un des pays ou la situation de la presse est très critique. Le Rapport Mondial sur la Liberté de la Presse relève que les persécutions et attaques contre les journalistes se sont accrues en Haïti durant l’année écoulée. "La majorité des incidents a été perpétrée par la police ou des supporters du gouvernement lavalas", indique le rapport. Il ajoute qu’une tendance à la peur se développe parmi les journalistes, pris pour cibles dans le cadre d’une lutte pour le pouvoir, parvenue à son paroxysme à la fin de l’année 2001, avec l’assassinat du journaliste Brignol Lindor par des partisans du pouvoir.
Un court métrage de trente minutes sur le vodou et ses esprits, les "lwa", sera projeté à Charlotte Street Gallery, à Londres, le 8 mars 2002. "Lineaments of the lwa", réalisé par Leah Gordon, Ranu Mukherjee et Maggie Roberts, présente les esprits tels qu’ils sont dépeints dans l’art haïtien.