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Crise : Face à l’illégitimité et l’incapacité du régime de facto actuel, un ex-représentant spécial des Nations unies en Haïti préconise un gouvernement de transition

P-au-P, 06 mai 2021 [AlterPresse] --- L’ancien représentant spécial et chef de la Mission des Nations unies en Haïti, le Chilien Juan Gabriel Valdés, également ancien ambassadeur du Chili aux États-Unis d’Amérique, appelle la communauté internationale à souligner clairement l’illégitimité et l’incapacité du gouvernement actuel à résoudre la crise en Haïti, dans des déclarations rapportées par le site « The dialogue », consulté par l’agence en ligne AlterPresse.

« Cela implique de faciliter une sortie de crise, par la mise en place d’un gouvernement de transition », avant de convoquer des élections et contrôler la violence, suggère-t-il.

Seul un gouvernement, qui a une légitimité institutionnelle et populaire, peut accomplir ces deux tâches, estime Valdés, tout en soulignant combien la crise actuelle (en 2021) est plus aigue que celle de 2004, qui a provoqué la mise en place de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah).

« L’État haïtien a pratiquement disparu. Ses institutions, déjà faibles dans le passé, se sont effondrées devant le caractère autocratique de l’exécutif, qui n’a pas hésité à violer systématiquement la Constitution pour renforcer son pouvoir ».

Jovenel Moïse veut, à tout prix, organiser, en juin 2021, un référendum illégal, interdit par la Constitution, et, en septembre 2021, des élections irrégulières, malgré la grogne exprimée par les forces vives de l’opposition contre ces tentatives qui viseraient, selon elles, à installer une dictature dans le pays.

Préoccupante criminalité

Juan Gabriel Valdés évoque aussi l’existence de bandes armées, qui vivent d’enlèvements de personnes, et le manque de préparation de la police pour y faire face, sans oublier un certain degré de complicité des hautes sphères publiques ou privées dans les actes de kidnappings, dénoncé par de nombreux Haïtiens et Haïtiennes.

En Haïti, on continue d’assister à une recrudescence des actes de criminalité, comme les enlèvements, sans aucune volonté réelle des autorités étatiques pour les freiner.

80% des enlèvements en Haïti sont de nature politique, tente de justifier le président de facto Jovenel Moïse, dont le mandat a pris fin depuis le 7 février 2021.

Les mesures, sans cesse promises par le gouvernement de facto, n’ont pas rassuré la population et ont eu l’effet inverse, en renforçant l’audace des ravisseurs, affirme, pour sa part, Jacky Lumarque, membre du Dialogue interaméricain et recteur de l’Université privée Quisqueya à Port-au-Prince.

« Aucun chef de gang connu n’a été arrêté, malgré leur apparition ouverte lors d’événements publics, et rien n’a été fait pour enquêter sur aucun des assassinats très médiatisés ».

« Le modèle de violence, de violations des droits humains et de refus du gouvernement de tenir les auteurs responsables de leurs actes ...équivaut probablement à des crimes contre l’humanité », a indiqué un rapport récent de la Clinique internationale des droits humains de la Harvard Law School et de l’Observatoire haïtien des crimes contre l’humanité.

Trois massacres ont été perpétrés, entre 2018 et 2020, dans des quartiers défavorisés de la capitale, Port-au-Prince : La Saline, Bel Air et Cité Soleil, avec l’appui de l’État haïtien, selon ce rapport.

Ces massacres ont coûté la vie à au moins 240 civils.

« Les défenseurs des droits humains en Haïti tirent la sonnette d’alarme à propos de l’insécurité croissante et des liens de l’administration Moïse avec les attaques meurtrières contre les plus vulnérables, depuis 2018 », rappelle Gabrielle Apollon, co-directrice du projet Haïti à la Global Justice Clinic de la Nyu School of Law. [emb rc apr 06/05/2021 11:30]